Comme annoncé, le député européen a quitté le parti écologiste dans lequel il ne se reconnaît plus. Il vient de créer un think tank avec son ami Yannick Jadot.
En retrait depuis plusieurs mois, Daniel Cohn-Bendit n’a eu de cesse de critiquer les « incohérences » d’un parti tiraillé entre ses convictions et la solidarité gouvernementale. Dès septembre, il menaçait de faire sécession, lors des discussions sur le traité budgétaire européen. Il avait alors « mis sa participation entre parenthèses provisoirement ».
Renouer le dialogue
« Dany est très mal à l’aise par rapport à l’évolution du mouvement », explique son ami et complice Yannick Jadot, qui ne croit pas au divorce. « Sa décision n’est pas définitive puisqu’il continue à payer » ses cotisations, assure-t-il. Seulement, « il veut clairement construire du débat avec la société par d’autres moyens que la politique. » Cet autre moyen, c’est un laboratoire d’idées que les deux hommes viennent de fonder. Initialement baptisé « Europe et écologie », le groupe s’appellera finalement « EcoloEuropa ». Car il n’a pas vocation à concurrencer EELV, bien au contraire. « Clairement ça n’a jamais été construit comme une scission ou comme la préfiguration d’une liste aux européennes », assure Yannick Jadot, qui le préside. Le député européen entend ainsi « combler le déficit de débat » sur la question européenne. « Il y a les partis politiques, c’est normal, mais il doit aussi y avoir des lieux complémentaires pour animer le débat public », avance-t-il.
Le groupe de réflexion a tenu sa première réunion jeudi 6 décembre sur le thème des relations franco-algériennes, juste avant le départ du président Hollande en Algérie. « Pleinement actif au sein du mouvement EELV », Yannick Jadot comprend malgré tout le malaise de son complice. Pour lui, la défection de Daniel Cohn-Bendit doit retentir comme un signal d’alarme aux oreilles des dirigeants écologistes, dont « l’image est brouillée ». Selon lui, « il y a un vrai travail à faire pour retrouver le lien avec les citoyens comme on l’avait trouvé pendant la campagne de 2009 ». A l’époque, la liste emmenée par Daniel Cohn-Bendit avait recueilli 16,3 % des suffrages aux élections européennes.
Mais les revirements de l’électron libre, loin de les alarmer, agacent certains responsables du parti. « Il part tous les trois mois, de préférence un matin juste avant une réunion du parti. J’en ai ras le bol, il fait ce qu’il veut, il ne m’intéresse plus », a par exemple lancé Jean-Vincent Placé, chef de file des écologistes du Sénat. « Daniel Cohn-Bendit a des défauts évidemment, comme tout le monde », répond Yannick Jadot, « quand il interroge les pratiques politiques en France, tout le monde trouve ça génial. Quand il pose les mêmes questions au sein de notre mouvement, tout le monde trouve ça scandaleux. » Et d’ajouter : « Je comprends que ce soit irritant, mais quand le meilleur d’entre nous est mal à l’aise, il faut aussi qu’on s’interroge sur ce que ça veut dire ».
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Le rôle du parti dans la majorité reste encore à préciser. Pour Yannick Jadot, EELV doit « tenter de peser sur tous les grands choix qui vont arriver », citant la transition énergétique et la fiscalité verte. Mais les écologistes « se réservent le droit de critiquer » sur des sujets comme l’EPR ou Notre-Dame-des-Landes.