Pour une République européenne (dans Libération)

20.09.2012

Par Yannick Jadot, Sandrine Bélier, Jean-Paul Besset, José Bové, Dany Cohn-Bendit,

députés européens Europe Ecologie -les Verts

Nous savons les promesses non tenues de l’intégration européenne. Nous savons la colère des peuples. Mais nous savons tout autant que le «non» n’est pas un projet, qu’il est une facilité face à la crise et à la complexité d’une construction européenne faite de petits pas et de compromis frustrants.Voter oui au TSCG nous permettrait de prendre toute notre place au sein de la majorité et d’y peser avec nos propositions. Au moment où partout dans le monde, et en Europe, s’affirme la tentation du repli souverainiste, qu’il soit libéral, républicain ou écologiste, nous voulons faire le pari d’une Europe ambitieuse, ouverte et solidaire.

Ces dernières années, ces dirigeants ont abandonné des pans entiers de souveraineté aux marchés et à la finance mais ont refusé de se doter de capacités communes d’action, privant l’Europe d’une harmonisation fiscale, d’une politique industrielle ou d’un pacte social. L’Europe doit changer, profondément, car il n’y a pas de plan B, pas de sortie de crise ou d’écologie possible dans un seul pays.Quelle position dès lors adopter sur le traité budgétaire européen ? Face à la crise, les dirigeants européens ont agi trop tard, trop peu. Mal fagotés, des prêts ont néanmoins été accordés. En échange, l’Allemagne, chef de file des principaux pays contributeurs, a exigé la discipline. Mais la discipline portée par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy est devenue austérité, ajoutant de la récession à la récession. En impulsant une stratégie de relance, François Hollande a heureusement modifié la donne européenne. Très critiquable, le traité doit donc être appréhendé comme l’héritage d’un compromis passé. La France doit en prendre acte et le ratifier si elle souhaite que la dynamique amorcée par le président de la République s’amplifie et débouche sur un nouveau compromis. Le rejeter à l’inverse stopperait net ce mouvement.

Le nouveau contrat européen doit, selon nous, reposer sur quatre piliers : discipline, solidarité, investissement et démocratie.Ajuster la discipline. En période de crise, le traité budgétaire admet de déroger aux contraintes de déficit de 0,5 % prévues pour les situations économiques «normales». Il devrait surtout nous permettre de revenir sur le carcan budgétaire actuel, à savoir 3 % de déficit en 2013, intenable et dangereux au regard du contexte économique. Enfin, nous soutenons la proposition de Mario Monti de sortir les investissements d’avenir du calcul des déficits.Renforcer la solidarité. Les interventions récentes et positives de la Banque centrale européenne ne peuvent se substituer à la responsabilité des Etats. Les euro-obligations, pour mutualiser les dettes nationales et contrer les marchés, sont indispensables. La solidarité doit aussi trouver une déclinaison beaucoup plus sociale. En plus des fonds structurels, nous soutenons la proposition d’un fonds européen d’assurance chômage qui permette d’intervenir en urgence dans tous ces pays où, comme en Grèce aujourd’hui, les citoyens sont confrontés à la disparition de tout modèle social.Moderniser l’économie.

L’Europe a un besoin urgent d’investissements qui préparent l’avenir. La France, par exemple, aurait des capacités d’investissement si elle supprimait notamment les milliards d’euros de niches fiscales anti-écologiques ou si elle réorientait les fonds publics vers des investissements utiles : des tramways plutôt qu’un aéroport, des crèches plutôt des missiles à tête nucléaire… Le pacte de relance impulsé par le Président Hollande est un premier pas. Mais c’est néanmoins à l’échelle européenne que peuvent se structurer de grands projets d’investissement dans les renouvelables, le bâtiment ou les transports. Pour cela, le budget européen doit augmenter très substantiellement, notamment grâce à la mise en place d’une taxe sur les transactions financières et d’une contribution climat-énergie.Démocratiser l’Europe.

Les Européens ont le sentiment que l’Europe se fait sans eux ou contre eux. Nous devons construire une Europe parlementariste, avec une souveraineté partagée entre les parlements nationaux et le parlement européen. Dans l’immédiat, nous proposons qu’en amont de chaque Conseil européen, le gouvernement français présente devant les assemblées les positions qu’il va y défendre. Pour 2014, les écologistes proposeront que la ou le prochain président de la Commission européenne soit issu des élections européennes. Ainsi la Commission deviendra-t-elle une instance politique comptable devant des représentants élus.

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