Créé le 10-07-2012 à 18h05 – Mis à jour à 18h05 – Par Mael Thierry
Le député européen appelle ses collègues parlementaires et militants écologistes à « marquer davantage [leurs] convictions ».
 La nouvelle ministre de l’Ecologie, Delphine Batho, a dressé dans « Libération » ses priorités pour  la conférence environnementale prévue à la rentrée : l’énergie et biodiversité. Vous êtes satisfait?
– Sur les priorités, rien à dire. Mais le problème c’est que je ne l’entends pas reprendre, pas plus qu’Ayrault dans son discours de politique générale, l’idée d’un grand débat public national et citoyen sur le modèle énergétique en France. C’était pourtant une promesse du candidat Hollande. Est-ce juste un « oubli » ou la volonté de réduire la voile pour s’en tenir à une discussion entre experts et acteurs sociaux comme au Grenelle ?
J’ajoute qu’il ne faudrait pas qu’on ouvre ce débat en en donnant déjà les conclusions. François Hollande a dit qu’il voulait passer de 75% à 50% d’électricité d’origine nucléaire à l’horizon 2025, ce qui, selon l’accord PS-EELV signifie la fermeture de 24 réacteurs. Ça ne peut pas être juste « on ferme Fessenheim » dans ce quinquennat et les 23 restants dans le suivant, y’a un truc qui ne va pas ! Il faut que les Français puissent discuter des scénarios, et qu’on se pose la question de l’option nucléaire en France au-delà de 2025.
Delphine Batho dit clairement son opposition au projet de taxe carbone défendu par Europe Ecologie-les verts…
– C’est le plus grave ! Je trouve qu’elle fait preuve d’une très grande légèreté, à plusieurs niveaux. D’abord sur le plan de la réflexion. Tout le monde perçoit aujourd’hui qu’il faut passer d’une fiscalité du travail à une fiscalité sur l’environnement.
C’est léger aussi par rapport à ce qui marche dans les autres pays européens. L’OCDE vient de rendre un rapport sur l’Allemagne qui montre que cette fiscalité sur l’environnement a permis de faire baisser la consommation d’énergie, les gaz à effet de serre, tout en stimulant l’emploi et en rendant l’économie plus compétitive. Cette contribution-climat-énergie est un projet éminemment social, indolore pour les plus modestes à court terme et qui redonne à moyen et long terme du pouvoir d’achat pour tout le monde.
C’est léger enfin par rapport à l’état de la réflexion politique en France, aux discussions qui ont déjà eu lieu avec les syndicats et les socialistes. Je rappelle que cette contribution-climat-énergie est prévue noir sur blanc dans l’accord signé entre EELV et le PS. Visiblement, elle a besoin de travailler le sujet !
Les écologistes semblent hésiter sur la ligne à tenir vis-à -vis du gouvernement. On les a peu entendus s’inquiéter de la disparition de Nicole Bricq. Etes-vous tenus par le devoir de solidarité ?
– Nos ministres oui ! Sans que cela se transforme en langue de bois. C’est un chemin difficile pour eux. Quant aux parlementaires et au mouvement, il faut qu’on marque davantage nos convictions. Quand on voit François Hollande réaffirmer au président nigérien l’importance des contrats d’uranium, ou Laurent Fabius dire au Japon qu’il veut relancer la coopération sur le nucléaire, on se dit que cela ressemble étrangement à ce qu’était l’attitude de la France il y a quelques mois… Si ce gouvernement continue à vendre le nucléaire au niveau international sans faire les ruptures nécessaires sur la fiscalité écolo, on aura très vite de gros soucis sur le fond !
Daniel Cohn-Bendit se désolait récemment de l’image d’ »arrivistes » des écologistes. C’est aussi votre avis ?
– On a clairement une image brouillée. Quand un petit parti passe un accord avec un gros parti pour être représenté à l’Assemblée, il passe toujours pour opportuniste. Même si cet accord, sur le fond, était bon. Mais dans la dernière période, c’est vrai qu’on a pu donner l’image d’une conquête de postes plus que d’une conquête de la société. A mon avis, le mouvement a trois chantiers devant lui : la participation forte au débat national sur l’énergie, l’organisation d’une grande réflexion sur la France dans l’Europe, et un chantier interne, changer nos pratiques pour retrouver l’élan d’Europe Ecologie.
Propos recueillis par Maël Thierry