Accords énergétiques entre pays: plus de transparence

Le Parlement européen et la Commission européenne réfléchissent actuellement à une proposition visant à créer un mécanisme d’échange d’information sur les accords intergouvernementaux dans le domaine de l’énergie. (rapport Karins)

En clair : mieux informer la Commission européenne dès qu’un Etat membre négocie un accord énergétique avec un de ses partenaires. (gaz, pétrole, électricité…) et communiquer ces informations pour être sur que les accords ne contredisent pas le droit européen.

Yannick Jadot a été le rapporteur d’un avis sur le sujet, à cheval entre ses deux commissions parlementaires, puisque cela touche à la fois au commerce international, et au domaine de l’énergie. Il suit également le rapport en commission ITRE.

Pour comprendre un peu les enjeux de ce dossier…

Il est nécessaire de réduire sa dette énergétique vis-à-vis des pays tiers et d’accroître son indépendance géopolitique et sa sécurité énergétique. Même si elle restera longtemps importatrice nette d’énergie, la Commission doit élaborer une politique commerciale favorable aux échanges de produits énergétiques.

Le Conseil européen du 4 février 2011 avait mandaté la Commission pour préparer une Communication sur la dimension externe de la politique énergétique. Simultanément, il invitait les États membres à informer la Commission, dès le 1er janvier 2012, de tous les accords bilatéraux conclus avec des pays tiers en matière d’énergie. Les conclusions précisaient que la Commission devrait mettre ces informations à la disposition de tous les autres États membres sous une forme appropriée, en tenant compte de la nécessité de protéger les informations sensibles sur le plan commercial…

 

La Commission européenne décide aujourd’hui d’institutionnaliser ce processus. Un système d’échange d’informations transparent et régulier permettra d’assurer le bon fonctionnement du marché intérieur et d’améliorer la durabilité et la sécurité de l’approvisionnement énergétique, à l’intérieur et l’extérieur de l’Europe. Cela est donc cohérent avec les objectifs climatiques et énergétiques européennes.

Cette proposition a deux objectifs

  • être sûr que les accords énergétiques passés entre pays ne contredisent pas les règles européennes en vigueur dans le marché intérieur. La Commission européenne se posera en gardienne des traités, et en garante de l’intégrité du droit européen, en effectuant la coordination. Cette coordination assurée par la Commission va nécessairement renforcer le marché intérieur, en garantissant que les instruments législatifs, tels que le troisième paquet énergie, soient correctement mis en oeuvre. Grâce à de meilleures informations et des connaissances plus poussées sur l’évolution de la réglementation, la Commission sera également plus à même de définir sa politique commerciale vis-à-vis des principaux pays producteurs d’énergie, tels que la Russie.
  • Qui plus est, ce système d’échange d’informations pourrait contribuer à renforcer la sécurité de l’approvisionnement de l’Union par une coordination des efforts des États membres lors des négociations. Grâce aux informations recueillies sur les quantités et les sources d’énergie importées, il permet de concrétiser les mécanismes de solidarité prévus par le règlement sur la sécurité de l’approvisionnement en gaz, dans l’objectif de garantir la sécurité de l’approvisionnement énergétique de tous les États membres de l’Union. Il améliore aussi la sécurité énergétique en garantissant la pleine conformité des accords aux règles du marché intérieur de l’énergie et au droit de l’Union, et inscrit par conséquent les investissements réalisés dans le solide cadre juridique qui leur est nécessaire. Ce mécanisme aura également un impact positif sur la politique commerciale et d’investissement de l’Union. Cela pourra aussi être la première étape d’une « voix unique » pour l’approvisionnement énergétique, et donc créer plus de cohérence et de main-mise au processus, puisque coordonné par la Commission européenne.

Ce que nous demandons:

  • Afin de s’assurer que les accords intergouvernementaux sont conformes au droit et aux objectifs politiques à long terme de l’Union , la Commission européenne devrait procéder à un contrôle de compatibilité ex ante lors des négociations. Pour que le système soit efficace, la Commission devrait évaluer systématiquement tout nouvel accord avant qu’il ne soit conclu et donner son avis sur la compatibilité.
  • Si, de leur côté, les États membres souhaitent s’assurer que les accords sont juridiquement compatibles et qu’ils permettent d’améliorer la sécurité et la durabilité de l’approvisionnement, la Commission doit élaborer un avis pour évaluer et proposer éventuellement les modifications nécessaires.
  • L’État membre concerné doit pouvoir prendre connaissance de ces recommandations suffisamment tôt pour écarter le risque d’une insécurité juridique, de décisions non coordonnées, non durables ou économiquement mal fondées et d’une éventuelle procédure d’infraction que la Commission pourrait être amenée à engager à l’avenir.
  • La Commission devrait également évaluer les accords déjà en vigueur et transmettre ses observations aux États membres concernant d’éventuelles incompatibilités avec le droit de l’Union afin qu’ils puissent renégocier ces accords de façon appropriée.

La négociation avec les Etats membres risque d’être tendue! En effet les gouvernements européens estiment que les accords énergétiques relèvent de leur souveraineté propre, et que la Commission européenne ne devrait pas avoir à faire le lien ni à connaître des informations qu’ils jugent sensibles (et confidentielles), surtout dans le domaine de l’énergie. La France, par exemple, refuse que la Commission fasse un contrôle « ex ante » (=avant que l’accord soit conclu), mais propose en revanche que le contrôle soit effectué de façon volontaire! Encore une fois, tout est fait pour échapper aux contraintes !  Pourtant si la France respecte le droit européen dans ses accords, elle ne devrait rien avoir à craindre!

Par ailleurs, de nombreuses entreprises énergétiques semi-publiques ou privées s’opposent également à ce que la Commission européenne joue ce rôle d’intermédiaire, et possède une si grande compétence, même s’il est clair pour nous que la confidentialité des informations sera garantie!

 

Affaire à suivre donc!

 
Le vote aura lieu en réunion de commission parlementaire ITRE (energie – industrie) le 28 février.

 

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