Hier, le Parlement européen n’a pas réussi à se mettre d’accord sur le rapport de mon collègue écologiste Bas Eickhout, un rapport qui devait appeler à une plus grande ambition de l’Europe contre les changements climatiques. Un vote qui était très attendu, par les média, les ONG et les lobbys industriels. Un vote que j’attendais également avec beaucoup d’impatience, ayant passé plusieurs mois à batailler au sein de la Commission énergie où je suis en charge de ce dosser pour les Verts.
Malheureusement, les conservateurs rejoints par quelques libéraux et socialistes ont empêché le Parlement d’appeler à un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 30% en 2020. Pour seulement 2-3 voix, la victoire s’est envolée.
Devant ce manque d’ambition, une autre majorité s’est formée autour des Verts, réunissant la plupart de la gauche et quelques conservateurs, et a voté contre le rapport final. Le Parlement ne s’est donc in fine pas exprimé sur le sujet du climat…
Ce changement de majorité victorieuse – une conservatrice contre l’ambition et une progressiste qui refuse le statu quo – symbolise l’indécision du Parlement sur le climat. Exactement ce qui s’est passé lors d’un vote sur le nucléaire après Fukushima. En étant optimiste, on peut dire que les choses bougent au Parlement. Si nous avions voté il y a quelques temps pour que l’Europe réduise ses émissions de gaz à effet de serre de 30%, nous aurions probablement perdu. Aujourd’hui, le Parlement est coupé en deux. De même sur le nucléaire et l’importance d’en sortir progressivement.
Mais difficile d’être optimiste après cette non-victoire, qu’il faut peut être appeler échec. Difficile car j’ai peur que nos arguments en faveur de plus d’ambition climatique ont atteint leurs limites. Plus d’ambition climatique, c’est plus d’emplois, plus d’innovation, plus d’investissements dans les technologies vertes qui seront le cœur de la compétitivité de demain. Plus d’ambition climatique, c’est plus d’Europe portée par un projet commun dont on peut être fier, c’est plus de crédibilité sur la scène internationale face aux pays qui sont victimes des changements climatiques, c’est une dynamique renouvelée pour l’ONU. Plus d’ambition climatique c’est une exigence morale forte alors que 2010 fut l’année la plus chaude que l’humanité ait connue. Malgré cela, les conservateurs continuent à s’opposer à plus d’ambition climatique.
Pourquoi ? Car les conservateurs restent empêtrés dans leurs archaïsmes industriels et économiques. Car fondamentalement, ils ne croient pas en l’Europe. Car trop souvent, ils restent des « sceptiques du climat ». Mais ne négligeons pas un dernier facteur : pour les conservateurs, le climat est devenu un « marqueur politique », un jouet de la politique avec un tout petit « p ». A l’image des conservateurs anglais qui disent à leur premier ministre Cameron : « Tu veux moderniser notre parti en jouant le premier ministre écolo ? Nous, la base de ton mouvement, on s’y oppose en votant contre le climat au Parlement européen ». A l’image des députés UMP en France, qui après l’échec électoral des régionales, ont réclamé et se sont vus offrir la tête de la taxe carbone sur un plateau.
Quel bilan de tout cela ? On ne verdit pas un conservateur. Ou seulement à la marge. Agir contre les changements climatiques passe inévitablement par un changement de majorité politique, que ce soit en France ou au Parlement européen. Pour une nouvelle majorité qui a compris que les changements climatiques sont un enjeu de civilisation, qui a compris tous les bénéfices d’une conversion écologique de notre économie. Au Parlement comme en France, cela exclut les conservateurs…
(crédit photo : Parlement européen)