Primaire de l’écologie – Rien n’est joué

Retrouvez cette lettre d’Eva Joly sur son site

Chers amis, Chères amies,

Dans les dernières heures de notre primaire,  après un débat de Grenoble qui s’est déroulé de manière satisfaisante, j’ai voulu une fois encore vous faire part de mon analyse sur la situation des écologistes et vous inviter à demeurer mobilisés pour remporter la primaire.

1) VOTER  ET FAIRE VOTER

Le premier tour de notre primaire m’a portée en tête avec près de la moitié des votants. Croyez-bien que je suis consciente de la responsabilité qui est la mienne. Je remercie encore une fois toutes celles et tous ceux qui ont voté pour moi.  Mais croyez-moi, rien n’est acquis. Les médias m’annoncent aujourd’hui quasi candidate. Je suis bien placée pour savoir qu’ils peuvent se tromper. Gardez-vous de tout excès de confiance. La primaire n’est pas finie. Chaque voix va compter. Jusqu’au bout je vous demande de rester mobilisés. Votez, et faites voter.  Aidez-moi à convaincre les hésitants. Aidez-moi à rallier les sceptiques. Aidez-moi à décider les abstentionnistes.

La primaire n’est pas déconnectée du reste de l’élection présidentielle. Je dois réaliser le meilleur score possible pour débuter notre campagne dans les meilleures conditions. La présidentielle sera difficile. Tellement difficile que certains, pensent déjà que nous devrions nous retirer. Je crois sincèrement qu’ils ont tort. Je veux tenter de les convaincre que  le temps des écologistes est venu et que nous devons prendre toute notre place dans le débat de l’élection présidentielle, avec détermination et combativité.

2) RESISTER A LA PRESSION

Jamais la société n’a été aussi disponible pour nos idées. Qu’on observe comment l’opinion a évolué sur la question de la sortie du nucléaire : le rapport de force s’est inversé. Parce que nous n’avons jamais cessé de défendre nos positions, élection après élection, nous avons fini par être entendus par le plus grand nombre. Dommage qu’il ait fallu attendre la catastrophe de Fukushima pour que le mouvement s’accélère. Mais avouez qu’il serait paradoxal de ne pas présenter de candidat dans ce contexte. Nicolas Hulot lui-même qui n’était pas convaincu de la nécessité d’entrer en politique à choisi de participer à notre primaire parce qu’il sait que l’écologie a besoin d’un candidat pour se faire entendre.  Il a pris des risques et quelques coups. Je ne l’ai pas ménagé dans le débat et lui non plus. Mais nous sommes d’accord sur le fait qu’il faut un candidat écologiste autonome et libre.

A un an de la présidentielle, il faut résister à la pression qui voudrait que les écologistes s’effacent.

Ceux qui professent que nous n’avons pas besoin de présenter un candidat commettent de bonne foi une vraie erreur politique. Je ne désespère pas d’arriver à les convaincre si je suis désignée candidate.  Nous ne pouvons ignorer que la crise économique et sociale qui touche l’Europe alimente la tentation de faire passer les enjeux écologiques au second plan. Ne pas présenter de candidat accentuerait ce risque. Nous devons au contraire montrer comment les écologistes apportent des réponses aux enjeux sociaux et économiques, qui touchent tout les pays européens.

Du coup la question de la primaire est « quel est le meilleur profil de candidat pour une présidentielle par temps de crise ? » C’est cette question que vous devez trancher.

3) AFFIRMER NOTRE PROJET

La candidature écolo n’est ni décorative, ni  optionnelle. Elle participe de la construction d’un nécessaire rapport de force démocratique pour changer le cours de nos sociétés.

Nous devons porter la vision d’une nouvelle société, fondée sur la transition écologique et la capacité de résilience. Nous devons affronter un triple choc, climatique, pétrolier et nucléaire qui change profondément nos modes de vie, de production et de consommation. Si nous voulons sortir de ces trois impasses, le dérèglement climatique, le pic de Hubbert et l’hiver nucléaire, nous devons anticiper ces chocs pour pouvoir rebondir. Il le faut d’autant plus que la crise est globale. Elle est écologique, économique, financière, et sociale.

La transition, c’est la voie que les écologistes défendent, celle que je vous propose de porter à l’élection présidentielle. Cette voie est différente du capitalisme vert, rose ou bleu. C’est le chemin qui nous mène vers une société de l’émancipation, une société écologiste.

Qu’on m’explique comment faire avancer nos idées si nous ne les portons pas.  Sans candidat écologiste, qui demandera la fermeture  urgente de Fessenheim et la sortie progressive du nucléaire ?  Qui fera de la lutte contre le réchauffement climatique une priorité ? Qui exigera la régularisation des sans papiers ? Qui militera pour la sixième République et la limitation stricte du cumul des mandats ?  Personne.

Cette absence serait préjudiciable à l’écologie, et fatale à la gauche.   Car si notre voix manque dans le débat, nos voix manqueront dans les urnes.

4) CONSTRUIRE UNE DOUBLE VICTOIRE.

Pas de candidat écolo ? Vraiment ? Quel joli cadeau fait à la droite ! Nous abandonnerions le champ de l’écologie à Monsieur Borloo qui serait ravi de ne pas avoir de candidat écologiste pour dénoncer son double discours. C’est la meilleure manière de faire perdre la gauche tout en faisant reculer l’écologie.

Ce que je vous propose c’est tout le contraire.  Si je suis votre candidate, je vous propose de travailler à une double victoire : celle des écologistes et celle de la gauche. L’écologie n’arrivera pas au pouvoir sans créer une majorité  alternative dont nous serions les pivots. Mais pour être majoritaire, la gauche doit adopter les idées des écologistes. Nous sommes la seule force qui affronte les enjeux du temps présent et préserve l’avenir.

Aller à l’élection présidentielle, ce n’est pas une promenade de santé. Mais c’est une nécessité. Nous devons être capables de résister. Être fidèles à nous-mêmes, y compris quand c’est difficile.  Ne rien lâcher.

Disons les choses clairement. Dans la nouvelle majorité à construire, nous ne serons pas les petits frères du parti socialiste. Car nous ne sommes pas des enfants sous tutelle. Nous ne sommes pas non plus des adolescents en crise. Nous serons des partenaires exigeants et fiables. Parce que l’écologie est rentrée dans l’âge adulte.

Appelez la « écologie de combat » ou « écologie de la pédagogie », appelez-la comme vous voulez.  Mais faites en sorte que l’écologie soit forte, indépendante, tenace, capable de gouverner, c’est à dire de transformer en convaincus des gens qui ne l’étaient pas et capable d’affronter les puissances qui s’opposent à l’intérêt général. En 2012, nous ne serons pas la pour faire de la figuration. J’aspire à vous représenter dans cette compétition présidentielle. Alors, si tel est votre choix, donnez moi le score le plus important, pour que notre campagne démarre sous les meilleures auspices, celle du rassemblement et de la légitimité.

La double victoire est nécessaire. A vous de la rendre possible.

 

Eva Joly

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