Efficacité énergétique, pas de sanction avant 2014

Efficacité énergétique, pas de sanction avant 2014

22 juin 2011

 

Pour rattraper le retard dans les objectifs d’;économies d’;énergie de l’;UE pour 2020, la Commission propose de nouvelles mesures. Mais aucune sanction ne sera prise avant 2014.

Une nouvelle tentative pour remettre l’Europe sur la voie des économies d’énergie. C’est ainsi que la Commission européenne a présenté, mercredi 22 juin, une proposition de directive qui doit permettre à l’UE d’atteindre son objectif de 20% d’efficacité énergétique en 2020.

C’est le volet lacunaire des politiques européennes de développement durable. Parmi les orientations fixées par l’UE en 2008, c’est la seule qui ne soit pas contraignante. Or, selon les chiffres avancés par la Commission européenne, au rythme où vont les réformes dans les pays, l’Europe pourrait simplement atteindre 10% d’économie d’énergie en 2020, par rapport à 2005.

Depuis trois ans, les écologistes, mais pas seulement, plaident pour que l’UE prenne des mesures contraignantes dans ce domaine pour forcer les Etats à agir. Car c’est bien sur les économies d’énergie que les progrès peuvent être faits. Et permettre de gagner 50 milliards d’euros par an et de créer environ 280 000 nouveaux emplois, selon les chiffres dévoilés par Bruxelles.

En mars dernier, la Commission a donc dévoilé un plan d’action sur l’efficacité énergétique. La proposition de directive met en musique ces orientations. Mais toujours pas de coups de bâtons en vue.

Objectifs sectoriels

Dans un premier temps, le texte propose aux Etats de prendre une série de mesures sectorielles:

Le secteur public sera plus particulièrement impliqué dans la construction et la rénovation des bâtiments placés sous sa gestion. La Commission souhaite arriver à une augmentation de l’efficacité énergétique des constructions publiques de 3% par an, actuellement elle n’augmente que de 1 ,5% en Europe.

Les consommateurs seront davantage impliqués dans la gestion et le contrôle de leur consommation en énergie, notamment via l’utilisation des compteurs dits intelligents, comme en France le prototype Linky.

Les grandes entreprises et PME devront procéder chaque année à des audits de leur consommation énergétique, censées les aider à déceler les domaines où des économies d’énergie sont possibles.

Les industries énergétiques devront se plier à l’utilisation systématique de la cogénération, consistant à recueillir et réutiliser la chaleur riche en énergie générée par leurs installations.

A partir de 2013, les Etats devront faire des rapports à la Commission sur les mesures mises en place et les progrès accomplis. Si les objectifs fixés ne sont pas atteints, des sanctions pourront alors être prises.

En France la ministre de l’environnement, Nathalie Kosciusko-Morizet, a mis sur pied, vendredi 17 juin, une table ronde sur l’efficacité énergétique. Les champs d’actions sont les mêmes que ceux visés par la Commission et l’ objectif annuel de 3% répond aux exigences européennes.

Rénovation

Mais, selon certains parlementaires européens, majoritairement du coté des écologistes, les exigences de la directive ne permettront pas la réalisation des objectifs. Le député Yannick Jadot (Verts/ALE) estime que la Commission européenne « oublie (…) l’enjeu de la rénovation des bâtiments, qui consomment pourtant 40% de notre énergie en Europe. On ne peut se satisfaire de l’objectif de rénover chaque année seulement 3% des bâtiments détenus par les autorités publiques! Rien n’est prévu pour les bâtiments qu’elles louent, ni pour ceux de nos concitoyens », regrette-t-il.

Une lacune qui se fera particulièrement ressentir en France pointe le chargé de projet en efficacité énergétique auprès du Comité de liaison pour les énergies renouvelables (CLER) Joël Vormus. « La rénovation des bâtiments privés n’est pas abordée dans le débat français sur l’efficacité énergétique. Les prêts à taux zéro accordés aux particuliers pour ce type de travaux ne suffisent pas ».

Sans contrainte

Mêmes doutes du côté de l’Agence de l’environnement et de la maitrise de l’Energie (Ademe). Selon la directrice exécutive des programmes Virginie Schwarz, il sera difficile pour la Commission d’évaluer globalement les progrès de l’UE si chaque Etat élabore sa propre stratégie, avec ses propres mesures de calculs. « Le diable se cache dans les détails », ironise t-elle.

La Commission a par exemple renoncé au dernier moment à imposer aux compagnies énergétiques des économies d’énergie représentant 1,5% de leurs ventes en volume sur leur consommation sous la forme de certificats. Le texte leur laisse la possibilité de proposer d’autres dispositifs comme par exemple des programmes de financement pour réduire leurs dépenses en approvisionnement énergétique.

« Les Etats membres doivent pouvoir mettre en œuvre[les économies d’énergie] de la manière dont ils le veulent. Il y a des modèles qui ont fait leurs preuves, mais ils ne doivent pas être obligatoires», s’est justifié le commissaire Günther Oettinger lors d’un point presse.

Discordance

En laissant une marge de manœuvre importante aux Etats, la Commission risque d’avoir du mal à imposer certains de ses objectifs sectoriels.

En France, par exemple, les entreprises distributrices d’énergie ne pratiquent la cogénération que durant une période de 5 à 6 mois. Mais la directive pourrait imposer un recours permanent à ce procédé. Or « la France peut très bien considérer que la cogénération ponctuelle fait partie de sa stratégie personnelle, et ne pas vouloir transiger sur ce point », note la directrice de l’Ademe.

« Nous nous attendons à un round de négociations très riche, nos propositions restent ouvertes et ne contrarieront pas la stratégie nationales», promet le chef d’unité à l’Agence exécutive pour la compétitivité et l’innovation auprés de la Commission européenne, Vincent Berruto.

CALENDRIER

Juillet 2011 : le Parlement européen nommera un rapporteur sur le texte de la proposition de directive.

Sept/décembre 2011 : discussions au Parlement européen/Discussions au Conseil

Janvier 2012 : accord politique entre le Parlement européen et le Conseil

Juin/décembre 2012 : finalisation des négociations et entrée en vigueur à la fin de l’année 2012.

Décembre 2013 : fin de la mise en œuvre de la directive dans les Etats.

Juin 2014 : évaluation des progrès dans les Etats.

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