Cela fait deux jours que je suis à Cancun pour participer, dans la délégation du parlement européen, au Sommet sur le climat de l’ONU. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on est loin de l’excitation de Copenhague. Le Sommet se termine vendredi soir et personne ne rêve d’un grand soir climatique. Objectif : éviter un psychodrame à la danoise, recréer de la confiance entre tous les pays, régler quelques sujets pour montrer que l’ONU peut faire avancer le dossier, préparer la négociation pour l’année prochaine.
Le Sommet de Cancun n’a pas pour objectif de sauver le climat mais plutôt de sauver le processus de négociation. L’urgence n’est plus climatique mais diplomatique. Cette étape est nécessaire mais elle a un goût amer. La séance de calino-thérapie sous le soleil mexicain ne doit pas nous faire oublier l’essentiel : malgré la neige en France, l’année 2010 sera probablement la plus chaude que l’humanité ait enregistré.
Jusqu’à maintenant, les choses se passent relativement bien du point de vue diplomatique. Mais tout pourrait encore basculer car les questions critiques vont être abordées par les ministres arrivés pour les derniers jours du Sommet: que faire du Protocole de Kyoto ? Doit-on viser un accord juridiquement contraignant fin 2011 ? Quel contrôle international mettre en place pour vérifier que les grands pays émergents tiennent leurs promesses ? Chaque pays cherche à mettre la pression sur les autres, de manière plus ou mois feutrée.
Feutrés, les japonais ne l’ont pas été : la semaine dernière, ils se sont vivement opposés aux pays en développement, en refusant de continuer à faire partie du Protocole de Kyoto. Est-ce une tactique de négociation ? A en croire les parlementaires japonais que j’ai rencontré à mon arrivée, non. Ils veulent réellement se débarrasser de cet outil qui ne couvre qu’un tiers des émissions mondiales. Ce serait cependant une erreur selon moi. Car les pays en développement tiennent à cet outil. Car c’est l’outil le plus abouti dont dispose la communauté internationale, le seul qui inscrit clairement la responsabilité spécifique des pays riches dans le réchauffement climatique. Repartir de zéro serait une perte de temps.
Espérons donc que les Japonais changent d’avis ou, tout du moins, montrent plus de flexibilité. Selon les discussions informelles que j’ai eu avec divers négociateurs, cela pourrait être le cas. Mais des avancées, de la part de la Chine principalement, sur le caractère contraignant de l’accord en 2011 ou sur la vérification des promesses seraient bienvenues.
Peut-on attendre cela de la Chine ? A priori oui sur la vérification. Sur le caractère contraignant de l’accord, les choses sont plus compliquées. C’est oui un jour, non l’autre. Mais quoiqu’il en soit, l’apparente ouverture chinoise lui permet de mettre la pression médiatique sur les autres pays. Si Cancun est un échec, ce ne sera pas de sa faute.
Quid des États-Unis ? Ils sont silencieux. Quasi-absents. Les dernières élections américaines ont considérablement affaibli un Obama qui peinait déjà l’année dernière à faire entrer son pays dans la lutte contre les changements climatiques. Si les États-Unis ne peuvent rien promettre de plus, espérons qu’ils ne feront pas dérailler le processus à Cancun. Quitte à rester sur la touche.
C’est d’ailleurs un des grands sujets de discussion à Cancun : ne devrait-on pas avancer sans les américains ? Ils sont en effet bloqués en interne pour encore plusieurs années. Dans ces conditions, le succès passe par une coalition de pays progressistes avec les européens bien sûr mais aussi le Brésil, l’Afrique du Sud et idéalement la Chine et l’Inde. A l’Union européenne d’oser prendre ses distances avec le grand frère américain et d’initier une telle coalition.
Prochain Billet sur les dossiers qui pourraient être finalisés demain : déforestation, financement, transfert de technologie.