Sur la révision du Plan Local d’Urbanisme de Créteil
Vous trouverez ci-dessous l'intervention de Catherine Calmet-Rebérioux, conseillère municipale Europe Écologie les Verts de Créteil, lors du conseil municipal du 8 décembre 2013 :
Nous voici donc au terme de la procédure de révision du Plan Local d’Urbanisme de Créteil engagée il y a 2 ans.
Contrairement aux procédures de modification – du type de celle que nous venons d’évoquer au sujet du secteur du Noyer-Abru, qui concernent généralement des éléments assez factuels et de moindre portée, une révision du PLU est un acte majeur, qui réoriente ou impacte de manière significative les règles d’urbanisme d’une commune.
Ainsi, une procédure de révision du PLU répond-elle à des règles précises : elle doit fixer les objectifs ainsi que des modalités précises de concertation et d’enquête publique, ce qui est bien normal s’agissant du cadre de vie, de l’offre de logement et de l’implantation de grands équipements publics sur notre territoire.
Il nous paraît donc utile de revenir à l’origine de ce projet en rappelant quels sont les objectifs qui ont été fixés en mars 2011. Notre assemblée a fixé 2 objectifs principaux :
- la mise en conformité du PLU avec le programme local de l’habitat adopté début 2011 ; il s’agit alors de mettre en rapport les droits à construire avec l’objectif affiché de créer 400 logements par an d’ici 2016. C’est ainsi que plusieurs dispositions du règlement du PLU modifié vont permettre de développer des opérations de créations de logement, de façon diffuse ou plus concentrée, selon les secteurs.
- le bilan et l’actualisation du PADD afin d’intégrer la prise en compte de projets supra communaux, et notamment le Grand Paris Express – et la future gare de la ligne 15 de métro à l’Echat.
En mars 2011, les modalités de concertation publique ont également été fixées. Outre des articles dans la presse, elles prévoyaient des réunions publiques, des expositions et la consultation des comités de quartier.
Il faut bien reconnaître que sur ce volet de la concertation publique, nous sommes restés largement sur notre faim.
Cette modification du PLU aura connu en tout et pour tout une réunion publique de présentation – le 17 décembre 2012 – à laquelle les membres des comités de quartier ont été invités… et donc, il faut supposer qu’ainsi la municipalité considère avoir répondu à ses engagements en matière de concertation.
L’enquête publique qui a suivi l’arrêt du projet de révision en juin s’est déroulée au mois d’octobre. Un simple avis dans Vivre Ensemble et là encore, les obligations réglementaires minimales sont respectées… et on trouve 4 personnes en tout et pour tout (dont le maire de Maisons-Alfort !) pour trouver le chemin des commissaires enquêteur et faire leur remarques…
Tout cela ne nous paraît pas raisonnable ! Et ce qui n’est pas raisonnable non plus, c’est de proposer d’adopter définitivement cette révision du PLU un dimanche matin en catimini, à quelques semaines de l’échéance des prochaines élections municipales.
Vous aviez vous-même indiqué en juin, Monsieur le Maire, qu’il n’y avait pas d’urgence et qu’il faudrait prendre le temps nécessaire… Finalement vous avez manifestement changé d’avis, et nous le regrettons.
Autre regret – ou plutôt interrogation : c’est la façon dont cette révision du PLU est résumée à la fin du rapport qui nous est soumis ce jour : il s’agit, pour le conseil municipal, d’adopter – je cite : « le projet de révision du PLU intégrant le nouveau zonage des jardins familiaux rue de la Prairie ainsi que l’exemption de l’application des règles au sein de l’article UK9 pour les construction et installations nécessaires au services publics ou d’intérêt collectifs » point, barre !
On est d’un seul coup bien loin du PLH et du Grand Paris Express, qui je le rappelle, sont les objectifs initiaux de cette révision…
Alors, pour en venir aux véritables projets qu’engage ce PLU, je voudrais m’arrêter sur 2 d’entre eux, qui nous paraissent bien plus significatifs pour l’avenir de notre ville, et bien plus en rapport avec les enjeux de ce projet de révision.
Deux mots tout d’abord sur l’emplacement réservé n°2 – c’est à dire des presque 3 hectares occupés par l’hôpital de jour au sud de l’hôpital Mondor, aujourd’hui entièrement végétalisés. C’est un périmètre qui se trouve à proximité immédiate de la future gare du Grand Paris que vous vous proposez de réserver en vue d’en faire un espace de stationnement… sans doute pour compenser le parking de surface sur lequel prendra place la future gare.
Ce choix ne nous paraît pas judicieux. L’arrivée du métro doit nous engager vers la définition d’un projet urbain d’ensemble sur tout le secteur, qui permette non seulement la bonne insertion de la gare mais soit aussi l’occasion de réaliser une offre de logements et de services à proximité.
Confirmer aujourd’hui que cet espace serait destiné au stationnement, c’est se priver d’une vision d’ensemble et d’un potentiel incontestable. Nous avons conscience que l’Assistance publique souhaite être assurée de pouvoir valoriser, le moment venu, ce périmètre, et qu’il est donc nécessaire d’afficher la volonté d’en maîtriser l’avenir. Mais au moins, ne gelons pas sa destination et intégrons-le à la concertation sur l’avenir du secteur, par exemple dans le cadre d’un futurécoquartier.
Le second sujet de « discorde » est connu : il s’agit de l’avenir du Centre Commercial.
Nous en avons déjà parlé lors du débat sur l’arrêt du projet en juin dernier. Je me souviens même que Jean-Jacques Porcheron avait exprimé à ce moment là son souhait que ce projet fasse l’objet d’une concertation spécifique. C’est exactement notre avis.
C’est un projet trop important, trop structurant pour notre ville, pour qu’il soit ainsi acté, sans débat public, sans concertation, et surtout sans scénarios alternatifs…
Car c’est incontestable : le Centre commercial est usé, vieilli et en perte de vitesse.
Mais face à cela, faut-il se précipiter et soutenir le projet de la société foncière Klépierre, filiale du groupe BNP Paribas et du fonds d’investissement américain Simon Property ?
On le sait, Klépierre avait déposé, avec le soutien actif de la municipalité, un nouveau projet d’extension : 200 M€ d’investissement pour 20 000 m² de surface commerciale supplémentaire (soit +25%) et 6 000 places de parking. Ce projet a fort heureusement été retoqué par la commission nationale de l’aménagement commercial, tant son impact environnemental était discutable.
Alors, aujourd’hui, nous avons le choix.
D’un côté, la « fuite en avant » projetée par Klépierre, avec toujours davantage de voitures, de m2 de commerce, de surconsommation ?
Or la consommation stagne, le commerce par internet se développe, la concurrence dans la grande distribution s’intensifie. De nouveaux espaces commerciaux se sont développés aux alentours et limitent ainsi la capacité de Créteil Soleil à attirer toujours plus de clients (et au demeurant, ce n’est pas l’offre commerciale qui génère du pouvoir d’achat des ménages… !).
Soutenir ce projet d’extension, c’est aussi continuer à dégrader les commerces de proximité cristoliens, y compris dans les centres de quartier rénovés à grand frais par la ville (l’Abbaye, le Palais, la Habette, l’Echat) et dans le centre ancien, où la rotation des commerces s’accélère. Pourtant, en plus des emplois locaux qu’ils créent, les commerces de proximité assurent la diversité des fonctions et participent à la vigueur du lien social dans nos quartiers.
L’augmentation conséquente de la capacité du parking, outre les fortes nuisances qu’elle entraînerait pour les riverains et l’ensemble des Cristoliens en aspirant un trafic automobile urbain déjà très dense, n’a aucune justification dans un lieu si bien desservi par les transports en commun. Mais encore faudrait-il que l’accès des piétons depuis le métro soit facilité et protégé et que les arrêts de bus à proximité soient vraiment attractifs pour dissuader de prendre la voiture. C’est loin d’être le cas, comme l’admet implicitement Klépierre, puisque son dernier projet envisageait l’aménagement d’un vrai mail sécurisé. Plus généralement, tous les cheminements piétons pourraient être améliorés, y compris depuis les arrêts bus, pour rendre agréables les trajets.
J’insiste : aujourd’hui, la situation des Cristoliens qui sortent du métro et sont relégués sous le cinéma, le long de la voie express, pour prendre leur bus et rentrer chez eux est proprement inacceptable. De même la signalétique, totalement absente, qui fait que tout administré non habitué qui veut rejoindre la Préfecture en sortant du métro vit un vrai parcours du combattant.
Le contournement piéton de Créteil Soleil est également très malaisé en raison des bretelles d’accès des voitures aux deux extrémités, de même que l’accès depuis le bas du Mont-Mesly. Le passage par les parkings est difficile, dangereux aux heures d’ouverture du CCR et lugubre en dehors. Ce n’est pas mieux pour les vélos : contournement impossible, accès au CCR difficile et dangereux…
Un autre choix est possible, qui s’appuie sur un autre type de cahier des charges que celui que Klépierre nous propose, sous-tendu dans ce PLU …
Il est possible de créer un autre avenir pour Créteil Soleil, plus chaleureux, plus diversifié, mieux inséré dans la ville et son environnement, moins tourné vers la consommation marchande et davantage vers la satisfaction des besoins de tous. Le centre peut accueillir des équipements publics, des espaces de loisirs et d’animation…
Donnons-nous les moyens de réaliser une opération de rénovation ambitieuse, au service des habitants, différente du projet actuel du promoteur. Imaginons un véritable projet urbain, social et environnemental pour ce mastodonte installé au cœur de la ville.
Tournons-nous vers l’avenir et délaissons les vieilles recettes du passé, qui montrent là toutes leurs limites.
Voilà des défis auxquels la ville devrait s’atteler, plutôt que d’accompagner purement et simplement un investissement financier dont l’avenir est plus qu’incertain.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous souhaitons que soit pris le temps d’une concertation plus approfondie, permettant à l’ensemble des Cristoliens de s’approprier la question de l’avenir du centre commercial Créteil Soleil, question clé de la vision que nous pouvons avoir pour l’avenir de notre ville.
Si en revanche vous souhaitez maintenir en l’état la révision du PLU, nous ne vous suivrons pas sur la voie que vous nous proposez et nous n’adopterons pas votre PLU révisé.
Liens recommandés :
- « Surproduction de surfaces commerciales, vers une bulle immobilière ? », note de l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-France – décembre 2013
- « Centre commercial Créteil Soleil : pour un autre avenir ! » – 28 novembre 2013
Laisser un commentaire