LIEN FERROVIAIRE : saisine de la CNDP – Intervention de Sandrine Rousseau

Sandrine Rousseau 2

Concernant la saisine de la CNDP pour le projet de lien ferroviaire intégrant les objectifs et les scenarios d’amélioration de la mobilité entre la métropole et le bassin minier, Sandrine Rousseau s’est exprimée au nom du groupe EELV :

« Monsieur le Président, Monsieur le Vice-Président, mes chers collègues,

Parce que les embouteillages sont récurrents, nombreux et importants autour de la métropole lilloise et qu’ils engorgent cette métropole (comme d’ailleurs la plupart des métropoles françaises, rappelons que Lille n’est « que » en dixième place des métropoles françaises sur ce plan).

Parce que l’amélioration de la mobilité entre la métropole lilloise et le bassin minier, les deux aires les plus peuplées de notre région, est une nécessité.

Parce que la réponse qui nous est aujourd’hui proposée sort des réponses trop souvent apportées à ce type de problème à savoir de nouvelles routes qui elles mêmes génèrent plus de trafic et donc au bout de quelques mois ou années de nouveaux embouteillages qui rendent « indispensables » de nouvelles routes. Syndrome du hamster dans sa roue qui tourne en rond mais le plus vite possible.

Pour toutes ces raisons donc nous soutenons très fortement et sans hésitation toute solution qui va dans le sens de moins de voitures, de plus de transports en commun et qui présente une alternative réelle, de qualité et confortable pour les usagers à la congestion de Lille et de sa métropole.

Toutefois, nous avons plusieurs remarques sur l’opportunité de saisine de la CNDP qui nous est aujourd’hui proposée.

 1/ D’abord les études sur l’hypothèse d’une infrastructure nouvelle ont été menées en priorité. L’hypothèse de l’utilisation, amélioration et le perfectionnement des infrastructures existantes est ainsi passée un peu au second plan. Ce qui peut aisément se comprendre dans la perspective d’appuyer le dossier de nouvelle structure et donc de lui donner des chances de financement, apparaît cependant insuffisant. Nous avons en effet besoin d’étudier toutes les hypothèses et d’analyses multicritères comme cela a été réaffirmé dans le volet Schéma Régional des Transports et des Mobilités du SRADDT voté le 26 septembre dernier.

Nous regrettons donc qu’une partie des études n’arrive qu’après les débats.

 2/ Ensuite il faut intégrer ce projet dans une réflexion plus large et ce sur trois axes :

–        intégrer les facteurs d’aménagement du territoire. Il est impératif de maitriser l’étalement urbain, de réfléchir à la localisation des emplois, à la protection des espaces agricoles et naturels. Il s’agit tout simplement de ne pas perdre d’un côté ce que nous pourrions gagner d’un autre d’évitement d’émissions de CO2, de réduction de pollution, de protection de l’environnement.

–        D’avoir une politique de transport intégrée et globale des personnes et des marchandises. Quid du Fret ? De son développement ? Des créneaux laissés libres par le lien fixe, comment les optimiser ?

–        Enfin comment articuler tous les modes de mobilités douces et comment les encourager tous de concert. Nous ne devons ainsi pas négliger les voies réservées sur l’autoroute au co-voiturage, l’intermodalité etc. Parce que là aussi ne déplaçons pas le problème. Si du jour au lendemain des milliers de voitures engorgent Henin Beaumont ou d’autres villes accueillant des gares du lien fixe, et que cette pression s’amplifie du fait de la concentration des activités sur Lille nous aurons au final raté notre objectif.

L’enjeu ici est important. Aujourd’hui la répartition des flux est de 1 pour 3. Pour 1 personne quittant la métropole, 3 y entrent chaque jour. Il est indispensable de penser ce mouvement à long terme pour répartir les activités sur le territoire et non pas amplifier ce phénomène d’une grande métropole et d’une forme de banlieue à l’échelle régionale.  C’est un risque réel qui doit être étudié et contré.

Sur les nouvelles mobilités, les études partent d’hypothèses qui nous semblent modestes : diminution de 1% des déplacements domicile-travail pour le télétravail, augmentation de 2,5% du taux d’occupation des automobiles pour le covoiturage. Quant aux hypothèses sur le stationnement, elles doivent être co-élaborées avec les intercommunalités qui en tiennent les clés. Pour l’horizon 2030, nous proposons de développer des hypothèses plus ambitieuses.

Sur le télétravail : nous ne sommes qu’aux prémisses de ce qu’il est possible d’envisager. A l’heure où l’homme ou la femme moderne craint en premier lieu (avant la panne de voiture) la panne de connexion internet, il est possible de sortir du modèle très traditionnel du travail au moins dans les services et oser l’innovation et le soutien public à ces innovations. Sans détruire les collectifs de travail, imaginons d’autres manières de travailler quand cela est possible.

Sur le scénario d’optimisation des lignes existantes, les études nous apparaissent trop partielles (la branche ouest Lille – Lens via Don Sainghin doit aussi être étudiée) et fondées sur une hypothèse d’augmentation des mobilités discutable.

Enfin il convient aussi d’étudier la question sensible de « l’heure de pointe ». Toutes nos infrastructures sont aujourd’hui dimensionnées sur cette heure de pointe. Nous devons travailler pour étaler ce pic. Ceci nécessite là encore une politique ambitieuse, collective et partagée.

Je reviens maintenant sur ce scénario de ligne nouvelle et je pointe trois contraintes majeures et spécifiques des contextes de l’époque, de l’économie et du terrain sur lesquelles nous n’avons pas de visibilité :

  • d’abord, l’acceptabilité par les riverains des travaux puis des contraintes d’exploitation n’est pas acquise, pas plus que pour une route, nous en faisons l’expérience avec Railenium,
  • ensuite au-delà du coût de réalisation, sans-doute largement sous-estimé, les coûts d’exploitation ne sont pas pris en compte, non plus que la capacité pour la Région de les assumer. Un train rapide, ça coûte très cher, en exploitation et en maintenance de l’infrastructure, les limites du TGV sont maintenant connues.
  • Enfin, ces scénarios doivent être partagés avec les autres institutions publiques et les maîtres d’ouvrage ssociés (Etat, Intercommunalités concernées, autorités organisatrices des transports urbains, RFF, SNCF).

trainDeux scénarios à réellement élaborer et le scénario le plus avancé à garantir, leurs impacts à identifier, les comparaisons à établir, les contributions des partenaires à intégrer,  voici les éléments de base du dossier à étudier par la CNDP.

Monsieur le Vice-Président, c’est le sens de votre déclaration en commission transports qu’ « il ne s’agit pas de la réflexion sur un objet, mais d’une réflexion sur un territoire avec une proposition d’amélioration ferroviaire. » C’est le sens du Comité de Pilotage que vous avez annoncé et qui n’est pas en place.

Monsieur le Président, Monsieur le VP, c’est le sens de notre exigence. Notre vote « pour » s’appuie sur l’élaboration d’un calendrier réaliste de réflexion qui permette de verser au dossier de la concertation et du débat TOUTES les études complémentaires demandées, les scénarios d’évolution de l’aménagement du territoire consécutifs aux différentes hypothèses et leur impact sur le processus de métropolisation et de spécialisation des territoires, l’étalement urbain et l’impact sur la matrice agricole, la mise ne place d’un comité de pilotage qui – au delà de la commission transports – est une condition nécessaire à nos yeux à l’appropriation par les élus des enjeux de ce débat.

Vous l’avez dit M. le VP dans votre présentation orale, nous nous permettons d’insister : nous votons « pour » à la condition du respect de ces engagements. Soyez assuré de notre soutien vigilant!

Je vous remercie de votre attention. »

La saisine de la CNDP pour le projet de lien ferroviaire intégrant les objectifs et les scenarios d’amélioration de la mobilité entre la métropole et le bassin minier a été adoptée à l’unanimité de la plénière avec les conditions posées notamment par le groupe EELV.

Un commentaire pour “LIEN FERROVIAIRE : saisine de la CNDP – Intervention de Sandrine Rousseau”

  1. Mme Rousseau,
    Un grand merci et bravo pour votre témoignage!
    Continuez votre lutte, le bon sens finira par l’emporter!
    Antoine

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