Le traité Merkozy, ou l’impasse européenne
Il est à prévoir que Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, comme souvent, vont tenter d’imposer, ce soir, lors du sommet européen, leur compromis aux autres 25 Etats qui composent l’Union Européenne. Ils font également mine de pouvoir s’affranchir du Parlement européen alors que toute réforme des traités est impossible sans son consentement.
C’est d’autant plus choquant que le bilan de leurs rencontres bilatérales et de leur méthode de gouvernement est largement co-responsable de la crise dans laquelle nous sommes aujourd’hui.
En refusant de comprendre que l’union monétaire signifiait l’union fiscale et politique, les dirigeants européens, en cela bien menés par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ont freiné depuis de nombreuses années tout effort d’intégration et ainsi enfermé l’Europe dans l’impuissance politique dont nous sommes victimes aujourd’hui.
Une union budgétaire boiteuse
Ils prétendent se réveiller aujourd’hui en présentant à une Europe confrontée à ses plus grands défis depuis 50 ans, un nouveau Traité sans ambition ni le moindre projet d’intégration. «Merkozy» propose à l’Europe une union budgétaire boiteuse qui a pour seul horizon la sanction automatique alors même qu’elle a besoin d’être refondée, à commencer par son renouveau démocratique.
L’Union européenne ne peut en effet se résumer à la seule surveillance des budgets nationaux. Cela installerait l’Europe dans un rôle ingrat et permettrait aux gouvernements nationaux de continuer à rejeter la faute et la paternité des décisions impopulaires sur «Bruxelles» établissant une cassure encore plus profonde entre les citoyens et le projet européen. Seule une Union politique, solidaire et responsable nous sortira durablement et par le haut de la crise.
L’union économique repose pour nous sur 4 piliers indissociables: une coordination des budgets nationaux dans le cadre d’un pacte qui intègre des objectifs de soutenabilité et de cohésion sociale; l’émission d’eurobonds par un Trésor de la zone euro; l’augmentation du budget européen alimenté par exemple par la taxe sur les transactions financières et la taxe carbone dans et aux frontières de l’UE; et enfin l’harmonisation fiscale.
Une discipline budgétaire juste passe par la fin d’une concurrence fiscale entre Etats qui ne bénéfice qu’aux plus riches et aux plus puissants.
L’Europe fédérale, ni slogan, ni fétiche
L’Union politique est la deuxième face de la même pièce. Une Commission européenne aux pouvoirs renforcés doit être mieux contrôlée par le Parlement européen. Comme dans toute démocratie, elle devrait être issue de la majorité au parlement. Cette nouvelle étape de l’Europe politique ne pourra se faire qu’avec les citoyens à travers un véritable processus constituant donnant toute sa légitimité à cette réforme.
Néanmoins, avant l’établissement de ce nouveau Traité, nous ne sommes pas condamnés à l’inaction. Ainsi, dès aujourd’hui, la convergence fiscale peut être amorcée et la BCE peut racheter plus d’obligations d’Etats. Nous pouvons tout à fait utiliser à plein les traités actuels tout en engageant leur réforme profonde.
Loin de la germanophobie rampante de certains ou du mépris exprimé par d’autres, les écologistes européens développent en commun ces propositions. Convaincus que l’Europe ne survivra pas à un nouveau mandat de «Merkozy», nous préparons ensemble les échéances de 2012 en France, 2013 en Allemagne et 2014 en Europe.
Car l’Europe fédérale n’est pas un slogan ou un fétiche «d’euro-béat». En cette période de crises qui accélère l’histoire, il s’agit du seul choix crédible et raisonnable pour que l’Europe continue d’être un projet porteur de sens, et pour que les citoyens Européens retrouvent la maitrise de leur destin pour faire face aux défis de la mondialisation.