Intervention de Jean-Paul Bachy, président du conseil régional Champagne-Ardenne

 

Intervention de Jean-Paul Bachy, président du conseil régionale Champagne-Ardenne
Budget primitif 2013
Préparer un budget, c’est se projeter dans l’avenir, non seulement pour l’année qui vient mais aussi les suivantes. Depuis quinze ans, gauche et droite confondues, sous des gouvernements et dans le cadre de majorités régionales différentes, nous avons ensemble, avec l’Etat et les autres collectivités de Champagne-Ardenne, décidé de programmes d’investissement et de cofinancement nécessaires à la modernisation  de notre territoire. Certains programmes sont de notre propre initiative. D’autres ont été imposés :

–       TGV Est
–       Renouvellement du matériel roulant TER
–       A 304
–       Extension de nos universités, UTT et URCA
–       Implantation de grandes écoles (Sciences Po ; Centrale ; Polytechnique féminine)
–       Electrification Paris-Troyes
–       Cofinancement des contrats d’agglo et de pays
–       Développement des formations paramédicales.

Nous avons jugé ces investissements indispensables. Ils correspondent à des urgences. Ils répondent aux besoins de nos populations. Une partie de la facture est réglée. L’essentiel reste devant nous. Or, il y a problème. Car des changements majeurs sont intervenus depuis dix ans.

La Loi Raffarin en 2004 a considérablement alourdi le budget régional et transféré des charges qui n’y figuraient pas auparavant : 1450 agents non enseignants dans les lycées, prise en charge des écoles d’infirmières et des services du patrimoine de la direction des affaires culturelles…

Le poids du fonctionnement plombe nos capacités d’investissement. Nous ne l’avons pas voulu. Mais c’est une contrainte qui est incontournable.

La loi Sarkozy de décembre 2010 nous a privés de toute recette propre. Les grands contrats passés avec l’Etat ou d’autres n’ont donc plus le même sens. On touche au paradoxe. Car tout se passe comme si les Régions étaient aujourd’hui réduites à un seul rôle : reverser à l’Etat le peu qu’il consent encore à leur donner. La réalité est là. Elle n’est ni de gauche ni de droite. De vraies menaces pèsent sur la capacité de l’Etat, des Régions comme d’autres collectivités à répondre aux grands projets que le pays attend.

Notre région plus encore que d’autres est concernée. Car si elle porte le nom de champagne, symbole de fête et de réussite, si elle trouve tous les jours sa capacité à prendre de nouvelles  initiatives et s’il y fait bon vivre, ce ne sont là que des trompe-l’œil. Avec son immense territoire, sa faible densité de population, ses lourds retards hérités des guerres, la Champagne-Ardenne a des charges de structures et des handicaps plus lourds que d’autres. Tel est le contexte dans lequel se prépare notre budget 2013.

Pour y faire face, notre stratégie doit se résumer en trois points :

  1. La fermeté face à nos partenaires. Un exemple : si demain l’Etat, RFF, ou d’autres imposent des retards dans le respect des calendriers (on pense à Paris-Troyes), il n’y a aucune raison que nous respections les nôtres (on pense au TGV Est).
  2. La clarté. Réaliser les travaux qui sont prévus est indispensable pour soutenir l’emploi et l’activité de nos entreprises. Plus que jamais l’économie est notre priorité. Il nous faut plus d’innovation, plus de recherche, plus de formation, plus d’exportation… Mais la mobilisation du budget régional ne peut dépendre uniquement du bon vouloir de ceux qui le financent. Nous proposerons donc à tous nos partenaires des avenants aux contrats que nous avons passés avec eux pour mieux maîtriser le calendrier de leur réalisation. Nous exigerons aussi plus de lisibilité et des garanties plus fermes en matière sociale et environnementale aux entreprises avec lesquelles nous contractualisons. Ce qui se passe aujourd’hui chez   Tecsom à Sedan n’est plus tolérable. Je proposerai qu’un toilettage de nos dispositifs dans le sens d’une plus grande conditionnalité environnementale et sociale soit assuré d’ici l’été. Des dispositions concrètes de travail seront mises en œuvre en ce sens.
  3. La responsabilité. Il s’agit surtout de maîtriser notre dette. C’est essentiel pour préserver l’avenir. Cette exigence ralentit fatalement l’investissement. Mais sans ressource propre, l’emprunt est le seul levier qui nous reste pour investir. Pour assurer 100 % de nos engagements en 2013, il nous faudrait environ 70 millions d’euros supplémentaires. Avec un taux prévisionnel de réalisation de l’ordre de 80 à 90 % et en tenant compte des recettes à réaliser en ce début d’année, on peut envisager de limiter la dette entre 20 et 30 millions d’euros. C’est l’équivalent de ce que nous pourrons rembourser. Nous ferons cela au moment de notre DM sur la base du résultat de notre compte administratif. Nous aurons alors plus de lisibilité sur nos capacités futures en CP et en AP.

 

Nous devons aussi limiter nos charges de fonctionnement. Certaines sont compressibles comme notre propre train de vie. Cette année encore, nous ferons des efforts sans précédent. D’autres sont obligatoires comme nos charges salariales, de chauffage ou d’éclairage. Il faut les assumer. Mais ni nous faisons dans les lycées ou les CFA sur l’ensemble de notre patrimoine des investissements en matière d’économie d’énergie et de développement des ressources renouvelables, c’est précisément pour réduire les dépenses de fonctionnement. D’autres correspondent enfin aux interventions que nous faisons. Nous priorisons nos compétences obligatoires comme la formation qui est la clé de l’emploi ou la qualité de vie de nos concitoyens. Dans d’autres domaines, nous nous efforçons de faire des économies.

L’essentiel n’est cependant pas là. Car à court et moyen terme, il nous faudra trouver de nouvelles ressources. C’est un enjeu qui concerne toutes  les collectivités, notamment les Région à qui la tentation est grande pour l’Etat de demander encore des sacrifices. On le voit bien par exemple avec la tentative du ministre des transports de vouloir faire passer dans l’escarcelle des Régions « les trains d’équilibre du territoire » et transférer vers elles une fois encore de nouvelles charges. En Champagne-Ardenne, cela représenterait 20 à 25 millions d’euros supplémentaires pour notre budget. Ce serait insupportable. Le projet de débat d’acte 3 de la décentralisation doit être l’occasion d’alerter l’ensemble des parlementaires sur ce dossier et quelques autres.  En Champagne-Ardenne, certains d’entre eux ont déjà bougé. Je compte aussi sur les autres.

Le débat sur l’acte 3 de la décentralisation, à l’initiative du gouvernement, représente une occasion unique d’ouvrir la discussion sur l’octroi aux Régions de nouvelles sources de financement. Cette volonté de dialogue tranche heureusement avec les blocages créés sous le précédent quinquennat. Encore faut-il faire bouger les lignes. Les trois groupes politiques de la majorité régionale ont élaboré ensemble un manifeste dans lequel figure un certain nombre de propositions. Elles ne sont pas exhaustives. Mais je souhaiterais autour de ces propositions que puisse s’engager une mobilisation de tous les élus de notre assemblée et de notre région.

Dès le vote du budget, et dans le même esprit, je souhaiterais engager avec vous et d’autres un ensemble de démarches vis-à-vis des ministères et des décideurs concernés pour mieux défendre les dossiers les plus importants pour l’avenir de notre région. Certains portent sur des contrats passés avec l’Etat et d’autres collectivités dont il s’agit de faire respecter le calendrier comme celui de Paris-Troyes. D’autres sur une actualité toute aussi urgente comme c’est le cas de la ligne Charleville-Givet-Dinant. Certains méritent débat avec la direction d’Aéroport de Paris comme Vatry ou avec les représentants de nos établissements universitaires que nous voulons moderniser, étendre et fédérer dans un même pôle académique. Certains n’ont pu aboutir la 1ère année comme le classement des paysages de champagne à l’UNESCO. Mais ils sont prometteurs et bien partis pour l’avenir. D’autres enfin paraissent moins immédiats mais sont tout aussi décisifs pour l’avenir comme le projet de liaison ferroviaire nord sud Châlons-Troyes ou celui de l’équipement de nos départements en très haut débit.

Il n’est pas imaginable que sur tous ces grands dossiers, nous nous enfermions dans unes stratégie de renoncement. Car ce sont là des causes d’intérêt général pour toute la Champagne-Ardenne. Elles ne doivent pas diviser mais nous unir. Il est des moments, Chers Collègues, où il faut que chacun mettent les couteaux au vestiaires et que nous soyons enfin solidaires et responsables vis-à-vis de nos concitoyens. C’est la règle que nous devons, chacun d’ entre nous, toujours respecter. Au moment où il s’agit de sortir le pays de la crise et de donner aux jeunes générations de notre région des raisons d’espérer, elle s’impose plus que jamais.

Emploi, développement économique, innovation, recherche, solidarité vis-à-vis des catégories et des territoires les plus vulnérables de Champagne-Ardenne, protection de l’environnement, transition énergétique, amélioration de la qualité de vie de nos concitoyens…Telles sont les priorités qui structurent notre projet de budget.

Un budget qui se donne pour objectif de tenir bon dans un contexte national et international difficile.

Un budget responsable qui préserve l’avenir.

Un budget volontariste qui ne s’accommode d’aucun renoncement.

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