2èmes assises de la biodiversité en Champagne-Ardenne
Discours inaugural de Raymond Joannesse
Je vous présente les excuses du Président Bachy de ne pas être présent à cette heure mais qui sera là pour clôturer ces assises.
Je vous remercie de participer à ces deuxièmes assises régionales de la biodiversité en Champagne-Ardenne et j’ai l’honneur de vous présenter ce jour les travaux menés sur la Charte de la biodiversité. Je voudrais également remercier celles et ceux qui ont participé activement à son élaboration au cours de ces derniers mois (acteurs du monde associatif, collectivités, représentant du monde agricole et rural mais aussi agences consulaires et organismes privés), vous tous qui avez participé aux 6 ateliers thématiques et aux 4 ateliers transversaux, ceci sous la responsabilité des cabinets CRT et Gondwana qui ont mené à bien ce travail dans un temps volontairement contraint. Je remercie le service Environnement de la région, qui sous la direction de Jean Marie Rollet et l’implication de Sophie de Champsavin a permis que ce travail se passe dans les meilleures conditions.
Suite aux 1ères assises régionales de la biodiversité organisées par la Région en décembre 2010, j’ai décidé de lancer une stratégie pour la Champagne-Ardenne. La Région doit être moteur en matière de prise en compte de la biodiversité sur son territoire. Car je le relève encore, le déclin de la biodiversité est alarmant. Encore plus qu’hier, il est urgent d’agir aujourd’hui.
Mais qu’est-ce que la biodiversité ? Car tel est bien le débat ! Ce n’est pas qu’une « lubie d’écolo ». La biodiversité n’est pas limitée à quelques espèces emblématiques de faune ou de flore qu’il faudrait protéger comme les derniers vestiges d’une vie passée.
Dans mon esprit, il s’agit, en réalité, de la diversité biologique grâce à laquelle nous pouvons nous nourrir, nous vêtir, fertiliser naturellement les sols, résister aux phénomènes naturels, absorber le CO2, diversifier les paysages, notamment.
La biodiversité est omniprésente et a des conséquences directes sur toute la société, bien au-delà de nos frontières.
La nature, riche et belle de cette richesse, je voudrais qu’on la préserve parce qu’on l’aime.
Étant, vous le savez, un pragmatique, je voudrais insister sur les raisons pour lesquelles protéger la biodiversité est, non pas un choix, ni même une option, mais une nécessité !
Des travaux réalisés dans le cadre de l’évaluation des écosystèmes pour le millénaire ont permis de définir les concepts extrêmement intéressants de «services écologiques» et de «services écosystémiques», qui mettent en lumière à quel point la biodiversité est présente dans nos vies. Par ces expressions, il faut entendre les bénéfices que les humains tirent de la nature, de manière directe ou indirecte. Il s’agit de défendre la nature non seulement en tant que telle, mais aussi en raison de ce qu’elle nous apporte.
La biodiversité est inestimable.
Pour autant, cette richesse est exploitée par les entreprises sans qu’elles en subissent les coûts.
Le rapport du groupe de travail présidé par Bernard Chevassus-au-Louis et intitulé Approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes détaille les enjeux socioéconomiques majeurs que représente, pour la France, la biodiversité, ainsi que la valeur des services écosystémiques pour aujourd’hui et, encore plus, pour demain.
Notre ex président de la République, après une petite période écolo virtuelle, nous a fait part de son sentiment final, lequel, je crois, est le plus sincère : « L’environnement, ça commence à bien faire ! » Comme sur d’autres sujets, je dirai qu’il n’était pas à la hauteur des enjeux !
D’une part, les pertes irremplaçables des services écosystémiques vont conduire naturellement à une augmentation des prix que supporteront les consommateurs. … Peut-on aujourd’hui évaluer les conséquences des bois et forêts dévastés ?
D’autre part, les dégâts résultant de la perte de la biodiversité doivent être supportés ou compensés par la société et donc par les contribuables.
Qu’il s’agisse du pouvoir d’achat ou des finances publiques, tous deux ont des conséquences sur la biodiversité. Et la réciproque est vraie.
Au-delà de ces considérations, la biodiversité a également des impacts sociaux. Que ce soit en ville ou à la campagne, chacun sent intuitivement qu’un environnement est sain quand il côtoie insectes, oiseaux, poissons ou toutes sortes de fleurs. Les ménages sont à la recherche d’un cadre de vie naturel, de meilleure qualité et apaisé. Tel est le cas, par exemple, dans notre région avec le parc naturel régional de la Forêt d’Orient, celui des Ardennes et celui que je connais le mieux de la Montagne de Reims.
Le cadre de vie a surtout des impacts sur la santé. La dimension environnementale des maladies cardiovasculaires est largement méconnue. Pourtant, près de cinq cents études scientifiques récentes mettent en évidence les multiples liens entre environnement, biodiversité et maladies cardiovasculaires. Le fait de vivre en milieu vert réduit de moitié la différence de mortalité cardiaque entre les plus modestes et les plus riches !
Enjeux économiques, finances publiques, équité sociale : on le constate, la biodiversité ne concerne pas seulement les amoureux de la nature ; elle concerne en priorité l’État, les acteurs publics et privés.
Les leviers d’action existent pourtant, dans les filières du BTP, de la fiscalité, de la production agricole, de l’industrie verte, ou encore en matière de responsabilité juridique environnementale.
La France est toujours à la traîne en matière de fiscalité verte, laquelle ne représentait que 1,5 % du PIB en 2009, contre le double en Slovénie. Bien évidemment, je n’ai rien contre les slovènes ! Au sein de l’Union européenne, notre pays se classe en la matière au vingt-quatrième rang sur vingt-sept !
En effet il est de notre responsabilité d’enrayer la perte de biodiversité, principalement due à l’action de l’homme.
La Région a impulsé la dynamique, mais elle doit être relayée à l’échelle infra régionale tant urbaine que rurale. C’est l’affaire de tous. Le travail amorcé par la Région Champagne-Ardenne a permis d’engager les acteurs du territoire dans la définition d’une stratégie du territoire régional en faveur de la biodiversité.
Il s’agit finalement de changer de vision : la biodiversité est un thème structurant, une manière différente de penser l’aménagement du territoire ; et non une contrainte supplémentaire. Cette transversalité est rendue possible grâce à une large concertation, qui constitue le pilier essentiel de notre démarche.
La charte offre un cadre de cohérence pour les actions déjà initiées. Elle vise également à proposer pour le territoire et ses acteurs, une stratégie de préservation et de valorisation de la biodiversité.
Comme il me plait de le rappeler souvent ; il ne s’agit pas de la stratégie de la collectivité territoriale, mais bien celle du territoire champardennais.
Ni exhaustive, ni définitive, cette Charte de la biodiversité en Champagne-Ardenne invite chacun à prendre connaissance des enjeux régionaux de prise en compte de la biodiversité, et propose aux acteurs du territoire de s’engager dans la mise en œuvre d’actions, d’initiatives favorables à la préservation de la biodiversité.
Par votre implication, la charte deviendra réellement une stratégie pour les acteurs de Champagne-Ardenne et pour son territoire.
Merci pour votre présence