Prévenir le cumul des mandats : moduler les indemnités

Par Marie Bové – Intervention en séance plénière du 27 juin 2011

 

Le 27 juin 2011 les écologistes ont soumis au vote une délibération, modifiant l’article 77 du règlement intérieur afin de moduler les indemnités des élu(e)s régionaux en fonction de leur présence. Cette mesure annoncée pendant la campagne électorale régionale et figurant dans le contrat de mandature actuel, devient aujourd’hui une réalité.

Cette avancée est le fruit d’un long travail de concertation avec l’ensemble des groupes politiques : une volonté politique de valoriser le rôle de l’élu(e) dans l’exercice de son mandat.  Mais le caractère juridique de cette délibération ne saurait faire abstraction de sa dimension éthique à l’égard des citoyens et  de la responsabilité de leurs représentants.

Ainsi, la Région emboite le pas au  Conseil Economique Social et Environnemental Régional de l’Aquitaine (CESER) : de 40 à 60 % d’absences non justifiées constatées sur un semestre donnent lieu à un abattement de 30 % sur le montant de l’indemnité mensuelle servie, et, au-delà de 60 % d’absences non justifiées constatées sur un semestre, le montant de l’indemnité mensuelle servie est affecté d’un abattement de 50 %.

Cette modulation déjà adoptée en Ile de France pourrait être renforcée dans un sens plus restrictif sans toutefois dépasser le cadre fixé par la loi : l’abattement maximum est de 50% sur le montant de l’indemnité (L4135-16).

 

Prévenir l’absentéisme

Comment imaginer une politique régionale d’intérêt général sans une présence assidue des représentants des citoyens ?

Confrontée à l’absentéisme chronique des élu(e)s, les commissions sont désertées et l’élaboration de la politique régionale affaiblie. De même, la qualité des débats politiques  est vacillante, mettant en péril les forces de proposition de l’assemblée et l’exercice de la vie démocratique.

Pourtant, le Code général des collectivités territoriales (CGCT)  indique que « Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région » (L4221-1). En conformité avec la loi, le Conseil régional d’Aquitaine détaille à l’article 53 de ses statuts que « pour l’étude de ses orientations et la préparation de ses délibérations, il crée des commissions par délibération spécifique de l’assemblée plénière. »

Au nombre de huit, les Commissions examinent les dossiers dans les principaux domaines de compétence du Conseil régional et préparent les travaux de l’Assemblée réunie en session plénière.

En outre, huit Groupes inter-Assemblées (GIA), spécificité de la Région Aquitaine, composés de huit élu(e)s du Conseil régional et de huit membres du CESER sont consultés pour avis sur les projets de décisions présentés à la Commission permanente (CP).
C’est pourquoi en application de l’article L4135-16 du CGCT, cette modification contraignante du règlement intérieur  vise en tout premier lieu à prévenir l’absentéisme de l’élu(e) dans la collectivité : «Le conseil régional peut, dans des conditions fixées par son règlement intérieur, réduire le montant des indemnités qu’il alloue à ses membres en fonction de leur participation aux séances plénières, aux réunions des commissions dont ils sont membres et aux réunions des organismes dans lesquels ils représentent la région (…) »

 

Donner un signe fort contre le cumul des mandats

Les élus seraient-ils sur tous les fronts quand les citoyens se plaignent d’un fossé infranchissable avec le politique ?  Les causes de ce désaveu sont évidemment multiples. Mais en tout état de cause, le cumul des mandats y contribue : être partout à la fois  sans être présent nulle part.

La modulation des indemnités des élu(e)s au prorata de leur présence donne un signe fort contre le cumul des mandats.
Allant bien au-delà du simple vœu, cette mesure contraignante est à double détente.

  • Premièrement, il s’agit d’un mode opératoire objectif pour inciter la présence des élus dans les commissions, les GIA, les séances plénières et les CP. Ces quatre instances constituent en effet un socle global indissociable pour l’élaboration de la politique régionale. Et c’est sur la base de ce socle que seront calculées les absences..
  • D’autre part, cette modification du règlement intérieur anticipe sur l’institutionnalisation du cumul des mandats en application de la réforme des collectivités territoriales. A partir de 2014, les conseillers territoriaux agiront de fait sur l’espace départemental et régional. Mettre en place, dès aujourd’hui, des outils de prévention contre l’absentéisme, c’est prendre les devants sur les cumuls à venir, autorisés par le code électoral.

 

Redynamiser les commissions

L’ensemble des groupes politiques sont unanimes pour redynamiser le travail des commissions. L’obligation de présence des élu(e)s en commission impose différentes mesures de réorganisation, à commencer par une égalité de traitement entre les élus.

En effet, plusieurs élus ne font partie d’aucune commission ou d’aucun GIA : en l’état, la présence réglementaire varierait du simple au triple. A ce titre, les écologistes estiment nécessaire qu’il y ait une refonte du corps des élu(e)s siégeant en commission et en GIA à la proportionnelle des résultats électoraux.

D’autre part, une nouvelle gestion du travail des élu/es est tout à fait souhaitable. Il serait impensable qu’un(e) même élu(e) soit obligatoirement présent au même moment à deux endroits différents. Une harmonisation des agendas de réunions est indispensable.

De même, l’éloignement géographique pourrait être pris en compte  afin d’éviter des déplacements excessifs en temps, en budget et en bilan carbone. L’expérimentation des outils web de collaboration et des visioconférences restent à expérimenter afin de favoriser la participation des élu(e)s.

Je vous remercie.

 

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