Intervention relative au budget primitif 2013

Par Monique De Marco – Intervention en séance plénière du 17 décembre 2012.

Monsieur le Président, mes cher/es collègues,

Les négociations sur le climat à Doha se sont malheureusement achevées, comme à Durban l’an dernier, sur un accord a minima sans trouver d’engagement financier global pour lutter contre le changement climatique. En dépit de tous les clignotants en train de passer au rouge, les choix politiques et économiques mondiaux restent résolument tournés vers le passé.

C’est à nous, localement dans les Régions, de montrer qu’un changement de logiciel vers une transition écologique est possible. Ce changement, urgent et nécessaire, a besoin de moyens c’est pourquoi le vote du budget est un rendez-vous politique si important. Il s’agit de se donner les financements nécessaires à ses ambitions politiques.

Vous le savez : 2013 connaîtra un nouvel acte de décentralisation. Cette décentralisation ne peut se faire à moitié, en voulant faire plaisir à tout le monde. Nous sommes convaincus que la Région est la collectivité qui a la dimension idéale pour en finir avec un centralisme paralysant. Pour reprendre les propos introductifs du Président Rousset, « notre pays historiquement centralisé n’arrive pas à avoir une clarification des compétences, le Président doit trancher et trancher vite ».

Les Régions vont être placées au cœur du développement et de l’aménagement des territoires. Comme dans la grande majorité des pays européens, elles pourraient et devraient désormais disposer d’une capacité d’innovation règlementaire en matière environnementale, sociale et économique. Les écologistes considèrent néanmoins que les Régions doivent conserver la possibilité d’intervenir au-delà de leurs compétences obligatoires pour soutenir les dynamiques territoriales. Nous prônons le maintien de la clause de compétence générale.

Dans le même temps de nouvelles compétences leur seront déléguées. Seront-elles accompagnées d’un réel transfert des moyens financiers, administratifs et humains ? En effet, la réforme territoriale n’aura de sens sans une réelle réforme fiscale. Il est impératif pour les Régions de retrouver une marge d’autonomie fiscale.

La CVAE[1] et l’IFER[2], notamment, doivent être revisités pour garantir une meilleure lisibilité pluriannuelle des ressources. Dans le même temps, cela donne la possibilité de mettre en place une véritable fiscalité écologique en accompagnant la nécessaire réforme fiscale environnementale que l’État doit engager suite à la conférence environnementale. Par exemple la création d’une éco taxe poids lourds.

Comme nous l’avons déjà dit lors des orientations budgétaires, la situation financière de la Région Aquitaine est saine et plus qu’enviable : l’Aquitaine figure parmi les régions les moins endettées de France. Notre « budget écureuil », écureuil car la Région a un taux de désendettement d’à peine plus d’un an, nous permet de faire de réels choix politiques.

La capacité de désendettement de la Région Alsace est de 7-8 ans et la moyenne métropolitaine est de 4 ans, et ces autres Régions sont encore loin d’être au bord du gouffre.

Il y a certes une ligne rouge à ne pas franchir, nous en sommes conscients mais il y a aussi une ligne imaginaire qu’on agite parfois de manière démesurée pour agir sur les esprits et créer un sentiment d’insécurité financière qui n’a pas de réels fondements.

C’est pourquoi, il apparait déjà primordial de nous libérer du tabou actuellement associé au « fonctionnement ». Son montant global a été réduit de plusieurs millions lors de notre précédente plénière relative au budget 2012. Nous aurions pu éviter ce tassement du niveau d‘intervention des crédits de fonctionnement et de paiement affectés à certaines de nos compétences (Éducation, Formation, apprentissage…) dans le contexte économique actuel.

Dans le même temps, il nous faut aussi assumer toutes nos responsabilités dans la gestion de notre personnel. La région a vu au fil des années et des lois de décentralisation le nombre de ses agents fortement augmenter, ce qui demande une véritable politique de ressources humaines. Il est nécessaire d’engager des négociations, qui apporteraient un véritable échange entre l’institution et ses agents afin de parvenir à un accord sur une revalorisation progressive des agents des lycées. Les objectifs d’équité et d’emploi entre l’ensemble des salariés de notre collectivité nous paraissent essentiels pour le bon fonctionnement de notre institution. Il nous semble également nécessaire d’aborder la double autorité de gestion et d’envisager pour certains établissements des référents régionaux qui permettront de dénouer des situations conflictuelles et d’améliorer le bien-être professionnel de nos agents.

Dans le domaine des investissements, nous saluons le partenariat engagé en octobre dernier avec la BEI, qui confirme par ailleurs la confiance portée à la bonne santé financière de notre Région, et notamment sa capacité à financer de manière équilibrée ses investissements par l’épargne et l’emprunt. Ceci permet de limiter la pression des établissements bancaires classiques et de ne pas tomber dans le piège d’emprunter sur les marchés financiers dans le cadre d’un emprunt obligataire, en acceptant d’être « noté » par une agence de notation. Car avoir recours à ce système, c’est accepter de voir ses projets considérés comme utiles ou pas au seul prisme de la rentabilité financière. Je tiens d’ailleurs à remercier Force Aquitaine qui reprend avec un temps de retard nos propositions de recours à l’épargne populaire faite l’an passé lors du dernier budget en 2011.

Europe Écologie – Les Verts porte le projet de transition écologique. Ce projet consiste à appliquer les valeurs du développement durable dans les domaines de l’économie, de l’environnement, du social et de la gouvernance.

Cependant, ce budget semble prendre racine dans une optique de bâtisseur avec l’idée dépassée de l’influence des grands projets structurants. Pour les écologistes, ce sont plutôt des grands projets inutiles ! Pharaoniques, dépassés, dévoreurs de biodiversité, de terres agricoles et de subventions publiques, ils ne répondent pas à de réels besoins des populations mais à ceux d’un système productiviste. Ces projets se font concurrence dans la course à la croissance et la fuite en avant, ayant d’énormes conséquences écologiques, économiques et sociales.

Les dépenses publiques régionales doivent avant tout répondre à une utilité locale. Or nous investissons des sommes énormes sur des projets dont l’utilité et les intérêts locaux sont très contestables. La visibilité de l’investissement prenant trop souvent le pas sur son utilité sociale et environnementale. La politique de l’attractivité au service de la compétitivité à tout prix se fait au détriment de la politique au service des habitants et des territoires. Le développement économique et de l’emploi de notre région est certes un objectif qui nous anime tous mais nous doutons de l’efficacité des moyens que nous mettons en œuvre pour y arriver.

Plus de 15 M€ sur le projet de prestige, inutile, coûteux et destructeur pour l’environnement du Grand Stade, l’engagement de cet investissement dans un budget contraint ne peut s’opérer qu’au détriment du soutien aux associations sportives et à l’aide au sport pour tous (diminution de 34%).

Autre exemple : des études sérieuses ont montré que la construction de LGV n’avait pas favorisé l’emploi local. Mais bien pire, les horaires des TER avaient été revus pour s’adapter aux arrivées des lignes desservies par les LGV déstructurant l’organisation locale au détriment des besoins des usagers au quotidien.

Aussi, pourquoi privilégier une LGV quand trop d’aquitains sont malmenés au quotidien, entre retards, rames bondées et annulations  sur toutes les lignes TER ?

Dans le domaine de la recherche, certains choix nous laissent toujours interrogatifs. Faut-il vraiment continuer à injecter tant d’argent dans le projet PETAL, couplé aujourd’hui au laser Mégajoule ? Son financement devient au fil des années aussi ruineux et inutile que celui d’ITER, son concurrent au niveau des recherches sur la fusion nucléaire.

Les écologistes que nous sommes avons une autre vision du territoire moins centrée sur les grands projets concentrés dans les métropoles mais souhaitons un développement plus équilibré des territoires.

Pour cela, je voudrais prendre un exemple très concret pour recréer une spirale positive sur l’ensemble de notre Région. Il s’agit d’un renforcement ambitieux de notre PPI lycées, qui aurait permis un saut qualitatif dans le secteur du bâtiment et de l’énergie. L’amélioration de l’isolation et le recours aux énergies renouvelables dans tous les lycées aquitains auraient dynamisé une filière locale d’entretien et de maintenance. En prime, cela aurait baissé les coûts de fonctionnement de notre patrimoine et nous aurait permis de réinvestir, ce qui constitue le début d’un cercle économique vertueux. En combinant cette offre avec le soutien des prêts attractifs proposés par la BEI, les entreprises d’Aquitaine pourraient se développer localement avant de se tourner vers l’export.

Donner priorité à l’amélioration de la compétitivité des entreprises pour les aider à exporter plutôt que de chercher à relancer et réorienter par la demande des productions locales est un choix que le gouvernement semble avoir fait et qui a le soutien de la Région Aquitaine (j’en veux pour preuve le nouveau règlement d’intervention sur les exportations) mais qui peut avoir des conséquences à moyen terme sur notre économie locale.

Le vote

Revenons au cadre de ce Budget Primitif, le groupe Europe Écologie – Les Verts votera pour le budget car il contient des avancées positives que nous partageons.

Par contre nous ne voterons pas dans ce budget certains financements comme celui du Projet PETAL, la LGV ainsi que le Grand Stade avec les incidences sur les lignes correspondantes dans les chapitres d’investissement 909 (Action Économique), 903 (Culture Sports et Loisirs) et 908 (Transports). Nous nous abstiendrons sur le chapitre 932 (Enseignement) prenant en compte la problématique des agents de lycées.

Au sein de la majorité, notre vocation est d’insuffler une part d’écologie sur le projet régional afin d’obtenir des avancées. Et nous en avons, nous pouvons par exemple nous féliciter de l’avancée sur la Pau-Canfranc, la modernisation en cours de nos TER, la redynamisation du plan Climat, l’Office Public Interrégional de la Langue Occitane ou le renforcement des aides sur l’économie solidaire. Nous n’oublions pas non plus le volet de l’économie d’énergie qui est un des piliers de l’efficacité énergétique et l’impérative nécessité de dynamiser le marché de la rénovation énergétique du logement, source à la fois d’économie d’énergie et d’emplois non délocalisables.

Ces actions doivent nous permettre d’amorcer un changement de modèle et une nouvelle donne économique et écologique. La confiance dans la majorité n’empêche pas la franchise et la lucidité et les élus d’Europe Écologie – Les Verts continueront d’apporter leurs contributions constructives au débat mais aussi à l’action dans le cadre de leurs délégations respectives.

Le groupe Europe Écologie – Les Verts restera vigilant sur son évolution.

 

Monsieur le Président, mes cher/es collègues, je vous remercie.



[1]  CVAE : cotisation en fonction de la valeur ajoutée des entreprises

 

[2]  IFER : imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux

 

Remonter