Ministre de l’Egalité des territoires et du Logement, Cécile Duflot (Europe Ecologie-les Verts), explique le sens et les enjeux du décret visant à bloquer les loyers dans les zones tendues. Le texte devrait être présenté au Conseil d’Etat à la fin du mois de juin et publié cet été, pour entrer en application à la rentrée.
Bloquer temporairement les loyers à la relocation, c’était l’urgence ?
Jean-Marc Ayrault nous a fixé une méthode de travail claire. Le gouvernement veut agir rapidement, dans le dialogue, et tenir les engagements pris. La crise du logement est une priorité partagée de la nouvelle majorité et un thème qui a été porté durant la campagne aussi bien par François Hollande que par Eva Joly. François Hollande avait promis l’encadrement des loyers et c’est dans cet objectif que s’inscrit ce projet de décret. Il s’agit d’une disposition d’urgence pour répondre à la crise du logement qui pèse sur les ménages.
Comment analysez-vous la situation du logement locatif en France ?
C’est un système qui s’est «embolisé», avec une logique de spéculation et un emballement des prix des loyers. Aujourd’hui, et à l’inverse d’autres pays européens où les loyers sont régulés, on est en France dans une situation intenable, où il est devenu impossible de se loger pour les jeunes et pour beaucoup de ménages, qui doivent fuir Paris et les grandes agglomérations.
Quand et comment avez-vous élaboré ce décret ?
Nous y travaillons depuis mon entrée au ministère, c’est-à-dire depuis quinze jours. J’ai proposé à Jean-Marc Ayrault une méthode en trois étapes pour parvenir à terme à redonner du pouvoir d’achat aux Français en faisant baisser les loyers.
Comment comptez-vous procéder ?
Nous allons intervenir sur trois plans simultanément. D’abord l’action : il s’agit de mettre en œuvre tout ce que la loi de 1989, qui régit les rapports locatifs, nous permet de faire pour aller dans le sens de la modération des loyers. Le décret que je prépare aura cet objectif : permettre que, dans les agglomérations et les zones où les loyers ont atteint des niveaux insupportables, l’accès à la location redevienne possible.
La deuxième étape, c’est l’information. Nous avons besoin de collecter des données très précises afin d’obtenir un panorama complet du logement et des loyers en France. L’objectif est d’aboutir à un «miroir» des loyers, qui servira de base de réflexion et d’action. Puis nous engagerons la concertation. Nous allons réunir tous les acteurs du logement – acteurs publics, acteurs privés, associations de propriétaires et de locataires – pour travailler sur la réforme de la loi de 1989.
Tout cela s’inscrit dans une démarche globale qui comportera deux autres points que le gouvernement considère comme majeurs : la cession de foncier public à titre gratuit pour construire des logements et l’instauration d’un mécanisme de caution solidaire par les pouvoirs publics pour faciliter l’accès des jeunes au logement.
Quelles autres réformes envisagez-vous à plus long terme ?
Après ces dispositifs d’urgence, nous engagerons des réformes de plus grande ampleur : l’effort de construction ; la rénovation thermique d’un million de logements par an ; une nouvelle étape de la loi SRU afin de porter le taux des logements sociaux de 20 à 25% – et nous comptons faire preuve d’une grande fermeté vis-à-vis des communes qui n’y mettraient pas assez de bonne volonté.
(Éliane Patriarca a réalisé cet entretien pour Libération)
En outre, Cécile Duflot a annoncé le 31 mai que le plafond des dépôts du livret A, actuellement de 15 300 euros, sera doublé. Cette mesure redonne enfin des moyens à la construction sociale.
La ministre a aussi annoncé la suppression du prélèvement de 245 millions d’euros par an sur 3 ans sur les organismes HLM.
Nous nous réjouissons de ces mesures de justice sociale, positives en faveur du logement social.