Nature en ville : où s’arrête la ville, où commence la nature ?

Partout, et surtout dans les interstices, surgit dans la ville une surprenante nature, ici des coquelicots, des carottes sauvages, de l’avoine barbue… Les parcs et jardins eux-mêmes ne nous offrent pas souvent le loisir d’observer ces plantes pionnières et vagabondes, trop souvent considérées comme des « mauvaises herbes ».

Marseille est constituée de très nombreuses friches. Ces marges sont des interstices colonisés par les plantes (et les insectes), dont on ne sait pas trop que penser. Pourtant, une immense diversité s’exprime dans ces marges, non considérées par l’homme.

Est-ce de la ville, est-ce de la nature ? Tout sol, même bitumé, est vivant, c’est souvent une banque de graines ! La nature, bien vivante, est capable de coloniser la ville ! A condition toutefois que nous devenions capables de ne plus considérer la jeune pousse, la jeune herbe, comme quelque chose de « sale », mais bien comme une réponse de la nature. La terre n’a jamais été aussi sale, depuis que l’homme essaie d’être « propre »… Voilà qui nous laisse réfléchir et reconsidérer le végétal issu du hasard comme une dynamique, et comme une réponse possible à notre besoin de Nature.

Marseille, et plus encore toute la vallée de l’Huveaune, ses promontoires rocheux, ses voies ferrées abandonnées, ses friches industrielles et agricoles, est riche en terme de biodiversité. La biodiversité, ce n’est pas seulement la somme des espèces, animales ou végétales, c’est avant tout la diversité des milieux. Ce n’est pas une plante sortie de son contexte qu’il s’agit de protéger, mais bien des milieux, des « biotopes », à savoir regarder, observer, comprendre, pour leur donner une valeur.

Parler de nature en ville, c’est aussi regarder la biodiversité de proximité. Cette herbe qu’on piétine chaque jour peut commencer à avoir un intérêt, dès lors qu’on lui donne un nom, un nom scientifique, un usage, une esthétique, un rôle dans la chaine écologique.

Ainsi, si l’on laisse advenir en se méfiant moins de la nature sauvage, les friches de Marseille, mêlant ville et nature, pourraient devenir un atout. Ces espaces délaissés peuvent devenir des jardins sauvages pour l’usage de tous les habitants. Marseille, dans ses marges, est primordiale à connaître et reconnaître. Prendre en compte et apprendre à observer ce vivant, c’est redonner du sens à l’aménagement du territoire, redonner à lire la vallée de l’Huveaune pour son cortège floristique, redonner à lire la voie ferrée par la flore spécifique inhérente au ballast. C’est savoir s’en rendre complice au lieu de le combattre ou de le marchandiser.

La gouvernance d’un territoire aussi riche que Marseille doit passer par la reconnaissance de cette nature sauvage. La ville est pleine de nature !

Stanislas Alaguillaume