La 7e « semaine sans pesticides » (20-30 mars) s’est déroulé récemment dans une indifférence remarquable. L’actualité était chargée, et le sujet n’a pas semblé devoir être mis en avant. Pourtant, l’axe principal en était cette année la santé, thématique pour laquelle les inquiétudes les plus vives éclatent au grand jour de plus en plus souvent.
France 2 programme ce soir à 22h40 un documentaire au titre volontairement provocateur : « La mort est dans le pré ». Réalisé par Éric Guéret, dont vous pouvez voir un extrait d’interview dans la vidéo jointe à cet article.
(ou en suivant ce lien : http://www.youtube.com/watch?v=U3Ezfjz0xvA)
Dénonciation poignante de l’agriculture intensive, et de l’utilisation de produits chimiques dont on commence à peine à percevoir les dramatiques retombées médicales, ce film tente de rompre avec ce qui est présenté comme une véritable Omerta, imposée par les intérêts de la filière et par les agriculteurs eux-mêmes.
Ce documentaire a été diffusé en avant-première dans le cadre du Congrès Pesticides et Santé organisé en mars dernier à l’initiative de Générations Futures (ex-MDRGF).
L’agriculture est malade de ses méthodes héritées de l’après-guerre, et des pressions des lobbys de l’agro-industrie, qui y ont construit de toutes pièces un marché aussi fermé que possible. On sait aujourd’hui que ces méthodes ont un impact dramatique sur la santé des agriculteurs, sur la biodiversité (tout particulièrement la contamination des abeilles), sur la pollution des cours d’eau et des nappes phréatiques, et sur toute l’économie de la filière, de plus en plus soumise à de grands groupes financiers.
Un autre modèle est possible, basé sur des pratiques qui avaient encore cours il y a moins d’une cinquantaine d’années : l’agriculture biologique. Même pour ce qui est de la rentabilité à long terme, des études montrent que les rendements peuvent égaler ceux des méthodes conventionnelles, avec des produits de meilleure qualité et un impact sur l’environnement bien évidemment bien plus acceptable !
Chaque jour de nouvelles alertes sont lancées, soit pour se préoccuper des effets de tel ou tel produit chimique (beaucoup a été dit récemment, et pas pour nous rassurer, sur l’utilisation de bisphénol A ou sur les phtalates dans les emballages, avec à la clef des effets perturbateurs endocriniens désormais incontestables), soit pour s’inquiéter des effets des pesticides, que l’on continue à utiliser malgré la menace, en contournant autant que possible les directives de prudence.
Récemment, le Journal de l’Environnement s’inquiétait de très curieuses dérogations sur l’épandage aérien de produits toxiques…
Fort heureusement, la situation commence à évoluer. On a eu l’occasion de saluer le 13 février dernier la décision du tribunal de grande instance de Lyon qui a reconnu la responsabilité de la société Monsanto dans l’intoxication d’un agriculteur charentais en 2004 par un puissant herbicide. Il s’agissait d’une première en France.
Pour aller plus loin, et entériner définitivement la dangerosité de ces produits, l’action législative doit être beaucoup plus rigoureuse en ce qui concerne les interdictions de ces produits pour lesquels la nocivité n’est plus une simple hypothèse. Et en complément, l’État doit être beaucoup plus volontaire pour l’incitation à des pratiques respectueuses de l’homme et de l’environnement. Les objectifs de 20 % de terres agricoles cultivées en bio en 2020 et de 20 % de bio dans les cantines en 2012 n’étaient pas utopiques. Cela représentait des leviers indispensables pour parvenir à un réel changement des mentalités et des pratiques. L’État les a abandonnés en même temps que le Grenelle de l’environnement, sans en faire grand cas.
Il faudra remettre tout cela sur l’ouvrage, avec plus de conviction. C’est le seul moyen de reconstruire, sur le long terme, une agriculture vivante, dynamique et durable.