Sa grève de la faim puise dans 40 ans de luttes

Michel Tarin, l’un des grévistes de la faim pour demander la suspension des expropriations et des expulsions sur le site de Notre Dame des Landes, fait partie des personnes formidables que je côtoie dans cet engagement pour sortir du projet d’aéroport. Un homme engagé, à la vision large, humaniste. Le journal Ouest-France a tracé son portrait (voir ci dessous).

Comme je l’écrivais sur mon site personnel, cet engagement collectif autour des terres à préserver nous a fait prendre conscience qu’unis, nous pouvons énormément. Nous venons d’horizons très variés : agriculteurs, habitants anciens et nouveaux, associatifs, pilotes de ligne, juristes, ingénieurs, écologistes, élus, membres de formations politiques, syndicalistes, musiciens, géographes, économistes, artistes… Chaque étape de nos actions a été un défi, a permis de découvrir des intelligences, talents et compétences extraordinaires chez les uns et les autres, la plupart du temps inconnus des intéressés eux-mêmes jusqu’alors. Chaque étape nous a permis de construire une intelligence collective, si puissante. Une belle leçon pour les autres défis auxquels nous avons à faire face.

Michel donne énormément de ses talents dans cette action juste et légitime. Son engagement, comme celui de beaucoup d’autres, fait vraiment partie de ce qui me porte.

Portrait signé Marc Leduc dans Ouest France du 25 avril 2012 :

La grève de la faim pour le gel des expropriations à Notre-Dame-des-Landes, il dit qu’il y pensait depuis des mois. Que l’idée a longuement mûri. « Elle est un cri de colère non violent contre la véritable violence, celle des expropriations des paysans. » On comprend qu’elle se nourrit d’autres combats, « toujours collectifs », insiste le paysan retraité, installé avec deux autres grévistes et leurs soutiens dans un square nantais.

Il ne s’est pas alimenté depuis quatorze jours. Pourtant Michel Tarin, 64 ans, ne trébuche sur aucun détail quand il raconte ses quarante années de luttes paysannes dans le Pays nantais. C’est le leader paysan et député Bernard Lambert qui remarque le jeune aide familial de Treillières. Ce dernier a quitté l’école à 14 ans, il milite à la Jeunesse agricole catholique.

Avec le Larzac

Bernard Lambert l’embarque dans Paysans en lutte, groupe d’études où il croise les futurs ministres Michel Rocard et Henri Nallet. Arrive mai 1968, la rencontre des paysans nantais avec les ouvriers et les étudiants. L’explosion sociale précède les luttes foncières à Plessé, Cheix-en-Retz, Mésanger, où des centaines d’agriculteurs s’opposent à l’expulsion de la famille Pellerin.

Au début des années 1970, l’ombre de l’aéroport de Notre-Dame plane déjà au-dessus du bocage nantais. « Après cinq années très dures, le dossier s’est enlisé. Mais ce combat nous a amenés à rejoindre celui du Larzac. »

Presque quarante ans après, Michel Tarin sourit encore quand il évoque la montée à Paris des opposants à l’extension du camp militaire, les ruses devant les gendarmes barrant la route aux tracteurs. Et finalement, un engin agricole installé comme un pied de nez devant le ministère de la Défense. Toute ressemblance avec la manifestation anti-aéroport de novembre à Paris relève bien sûr de la coïncidence…

Il y a l’action sur le terrain, et aussi le combat syndical, les initiatives solidaires. D’abord la création des Paysans travailleurs (future Confédération paysanne), puis SOS paysans en difficulté, dont il est membre fondateur. « Nous avons défendu des milliers de dossiers devant les banques, les assurances et autres créanciers. » Michel Tarin enchaîne avec « Une famille un toit », qui rachète les maisons des agriculteurs en faillite, dépossédés de leur habitation. On n’oubliera pas l’action pour que les cotisations sociales ne soient pas prélevées sur les allocations familiales.

130 soirées anti-aéroport

Le combat contre l’aéroport est donc reparti de plus belle. « Plus optimiste que jamais dans l’issue », Michel Tarin a animé 130 soirées ces deux dernières années. « Un combat pour la terre nourricière », insiste le retraité, cinquième génération à la Noë-Verte, sur les Landes-de-Rohan et celles de Muzon. La terre, qu’il ne veut pas voir disparaître, d’ici à 2017, sous les pistes et les parkings. Sur laquelle, vacher, il a vu naître et vivre plusieurs milliers de vaches laitières. Et qu’il a, comme pilote (une autre de ses passions), tant de fois survolée en avion ou en ULM. Sans jamais se lasser du passage des saisons vues du ciel.