Carnet de campagne #0 – L’accord EELV/PS

Ce mercredi 2 novembre les équipes du Parti Socialiste et d’Europe écologie les Verts se retrouvent à Solférino afin de poursuivre le travail programmatique engagé depuis le mois de juin. L’euphorie post-primaire étant un peu retombée, nous allons désormais pouvoir attaquer la dernière ligne droite.

Le principe d’un accord programmatique est de savoir faire des concessions, de ne pas imposer à l’autre son programme. C’est encore plus vrai quand nos deux partis ont peu à peu construit une culture du contrat et de l’alliance en gérant ensemble depuis de nombreuses années un nombre croissant de collectivités locales. Les conditions ne sont plus les mêmes qu’en 1997, 2002 ou 2007. La précipitation ou l’ignorance ont cédé la place à la préparation et au respect du poids politique de chacun dans la construction d’un accord. La gauche de cette fin de quinquennat ne ressemble plus à celle de 2007 et les écologistes sont conscients de leur nouvelle responsabilité.

Écologistes et socialistes ont aussi une responsabilité commune, qui est d’offrir du contenu à cette soif d’alternance, cette envie profonde du pays à solder la parenthèse sarkozyste. L’accord programmatique entre nos deux formations ne peut se résumer à une addition d’accords techniques. Le contrat de législature doit prendre la mesure d’une situation inédite où les crises démocratique, écologique, sociale se conjuguent les unes aux autres avec en filigrane une panne de la gouvernance européenne qui ne pourra plus faire longtemps l’économie d’une intégration politique de type fédérale.

Impliqué pour ma part dans le groupe de travail chargé des institutions, ces trois derniers mois nous ont permis d’avancer sur des points significatifs: le droit de vote des résidents étrangers à l’ensemble des élections locales, l’abrogation de la réforme territoriale ou encore l’interdiction du cumul des mandats entre une fonction parlementaire et une fonction de responsable d’un exécutif local…En matière de rénovation de la vie démocratique, c’est un début intéressant qu’il faudra approfondir.

Deux points majeurs restent en discussion la question de la transition énergétique et celle du mode de scrutin pour l’élection des députés.

Mettre sur la table des enjeux qui ont été évacués du débat public depuis des décennies, c’est bien la fonction des écologistes. La question du nucléaire en fait bien entendu partie, dans un pays qui a dépolitisé la question de l’énergie depuis plus de 35 ans, le réveil est pour certains un peu brutal depuis Fukushima. Les lobbies de l’atome ont biberonné notre classe politique pour qui le nucléaire sous couvert d’indépendance nationale s’est transformé en dogme. En Europe l’UMP et le PCF restent les dernières organisations politiques gardiennes de ce dogme. Centralisée et opaque, l’énergie nucléaire est d’une certaine façon consubstantielle de la Veme République. C’est en effet sans débat parlementaire que Pierre Messmer l’avait imposé au pays.

Sortir du nucléaire n’est pas une question de tuyauterie, mais un choix de société, donc une question politique. Elle nécessite de partir de la demande d’énergie. Les ingénieurs qui ont construit le scénario NégaWatt 2011 ont démontré qu’une politique volontariste de sobriété et d’efficacité énergétique permettait en 2050 de réduire la demande en énergie de 65% par rapport à la situation de 2010. Le choix du nucléaire c’est aujourd’hui la généralisation des impayés d’énergie pour les ménages modestes pris au piège du chauffage électrique. Le choix du nucléaire maintenu est surtout bien peu compatible avec l’état de nos finances publiques, quand on sait que la prolongation de 20 ans de notre parc nucléaire nous coûterait près de 100 milliards d’euros.

Quelle que soit la sémantique retenue la vraie question de la négociation qui s’annonce c’est l’arrêt de cet accident industriel qu’est déjà l’EPR de Flamanville. Prévu pour 1,75 milliards d’euros avant sa construction, son coût est à ce jour fixé à plus de 6 milliards pour le plus grand profit des amis du président, Martin Bouygues en particulier. Maintenir le gouffre de Flamanville c’est enfermer la France dans le nucléaire pour les 60 ans à venir…Les écologistes ne pourraient se reconnaître dans ce choix.

L’autre point programmatique sensible porte sur la réforme du mode de scrutin des députés. Comme l’explique très bien Bastien François dans sa tribune publiée dans le Monde daté du 1er novembre, instiller une part de proportionnelle dans le scrutin législatif n’est absolument pas de nature à répondre à la crise de la représentation que nous vivons et singulièrement à l’absence de parité. Nous plaidons pour un scrutin mixte. Une moitié des députés serait élue dans des circonscriptions, une autre sur des listes proportionnelles. Chaque électeur votant deux fois au premier tour, à la fois dans sa circonscription et pour une liste nationale. C’est le score obtenu par la liste à la proportionnelle qui fixe le nombre de députés, c’est ce que nous appelons une proportionnelle de compensation. C’est ce scrutin qui permettrait enfin d’avoir des majorités parlementaires réellement majoritaires dans le pays réel et permettrait de passer aux actes sur l’enjeu de la parité.

Sur ces deux enjeux majeurs, nous y verront plus clairs dans quelques jours. Contrairement à ce qu’annoncent des commentateurs en mal de scoops, aucun accord programmatique n’existe à ce jour entre le PS et EELV. Lorsqu’une base d’accord pourra être rédigée, c’est notre conseil fédéral des 19 et 20 novembre prochain qui sera seul habilité à l’approuver. On le voit en Grèce, avec le prochain référendum, les marchés n’aiment pas la démocratie, c’est aussi un peu vrai avec certains médias qui ont toujours un peu de mal à comprendre le fonctionnement d’organisations démocratiques…

 

Le texte de l’accord EELV/PS