François Hollande a pris, lors de sa campagne, l’engagement de mettre en place un encadrement des loyers (22ème proposition des 60 engagements de campagne). Celui-ci vise à mettre un terme à l’emballement du coût du loyer, notamment dans les zones où la tension sur les prix est la plus forte, et à faire baisser, à terme, les loyers jusqu’à 20% dans les secteurs où ils sont manifestement excessifs, pour redonner du pouvoir d’achat aux Français-e-s et agir contre la crise du logement. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, avec Cécile Duflot, ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement, a décidé d’agir vite pour mettre en œuvre cette réforme à travers trois étapes.
Pourquoi ?
Les rapports locatifs sont régis à ce jour par la loi du 6 juillet 1989. Celle-ci prévoyait des dispositions concernant l’encadrement des loyers, qui ont cessé de s’appliquer depuis 1997, faute de nouveau dispositif législatif. Depuis, il a été laissé libre cours au marché pour la fixation du prix des loyers. Dans les zones de tensions fortes entre l’offre et la demande, ils se sont démultipliés. Ailleurs en Europe, les loyers sont encadrés, par exemple en Allemagne ou en Suède. Ainsi, à Munich, ville la plus chère d’Allemagne, les loyers s’établissent en moyenne autour de 9€/m2 alors qu’ils sont autour de 24€/m2 à Paris. Le résultat est qu’aujourd’hui, en France, un locataire du parc privé sur cinq dépense plus de 40 % de ses revenus pour se loger. Il y a donc urgence : le logement est un des premiers budgets qui grèvent le budget des ménages et les prix prohibitifs renforcent la ségrégation spatiale et mettent des millions de familles dans des situations intenables.
Quelles étapes ?
Cécile Duflot a proposé à Jean-Marc Ayrault une méthode qu’il a approuvée. Il s’agit de mener en simultanément les trois étapes de la réforme : action, information et concertation.
1 – Action : un projet de décret pour faire appliquer tout de suite la loi de 1989
La loi de 1989 prévoit à son article 18 qu’en cas de « situation anormale du marché locatif », c’est-à-dire de crise du logement, le gouvernement puisse prendre des mesures immédiates et temporaires pour limiter la hausse des loyers. Sur ce fondement, des mesures sont déjà prises tous les ans pour limiter la hausse des loyers à l’IRL lors des renouvellements de bail à Paris et dans certaines communes de proche banlieue. Le projet de décret proposé par Cécile Duflot vise à empêcher une augmentation au-dessus de l’IRL lorsqu’un appartement change de locataire tout comme pour les renouvellements de bail, dans l’ensemble des zones dites B1 : les grandes agglomérations et les zones de tension. Ce décret permettra ainsi un encadrement temporaire et immédiat des hausses de loyer là où le marché est en déséquilibre.
2 – Information : lancer une collecte de données précises sur le montant des loyers en France
Afin de pouvoir établir sur l’ensemble du territoire un encadrement durable des loyers de mise en location et de relocation, par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, avec une orientation à la baisse jusqu’à 20% dans les secteurs où les loyers sont manifestement trop cher, il est nécessaire de disposer d’une information fiable concernant le niveau des loyers. A l’image du modèle allemand du « miroir des loyers », il est donc indispensable d’organiser rapidement un recensement du coût des loyers, par la mise en place, notamment, d’observatoires locaux. Il sera lancé en même temps que le décret appliquant la loi de 1989 et permettra ensuite d’évaluer et de fixer les loyers de référence.
3 – Concertation : réunir les acteurs pour changer la loi
Cette méthode devra nous permettre d’éviter toute loi adoptée dans la précipitation et sans consultation. C’est pourquoi dès l’adoption de cette décision, une concertation nationale sera entamée avec les propriétaires, les locataires et l’ensemble des observateurs pour construire une loi rigoureuse et partagée qui régisse à l’avenir les rapports locatifs, et plus largement l’accès au logement. A l’issue de cette concertation, la Ministre présentera un projet de loi à Jean-Marc Ayrault.
Quel calendrier ?
4 Juin : annonce de la méthode
Début juin : concertation avec les principales associations de locataires, de propriétaires et de gestionnaires de bien
Mi-juillet : publication du décret après passage devant le Conseil d’Etat
D’autres mesures d’urgence pour le logement ?
Le logement a été une priorité de la campagne pour la gauche et les écologistes. Le Président de la République a pris des engagements précis, chiffrés et clairs. Afin de les mettre en œuvre, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault s’est fixé trois priorités immédiates :
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tout d’abord l’encadrement des loyers ;
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la mise à disposition gratuite du foncier public aux collectivités locales pour soutenir l’effort de construction. Les modalités d’application de cette mesure sont en discussion avec France Domaine.
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la caution solidaire pour les jeunes, qui permettra d’apporter les garanties locatives nécessaires et de faciliter l’accès au logement.
Ces actions immédiates précéderont les réformes structurelles d’ampleur :
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L’effort de construction visant la production de 500.000 logements par an dont 150.000 nouveaux logements sociaux ;
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Un vaste plan sera lancé qui permettra à un million de logements – dont 600.000 logements anciens – par an de bénéficier d’une isolation thermique de qualité ;
- La mixité sociale avec une nouvelle étape de la loi SRU visant à renforcer son application en durcissant les sanctions à l’encontre des communes qui enfreignent délibérément la loi et à porter le taux de logement sociaux de 20% à 25%.
Eventuelles critiques faites au dispositif et éléments de réponses
a) Cela va t-il empêcher les propriétaires d’améliorer les logements ? Ce dispositif existe déjà depuis plus de quinze ans concernant les renouvellements de baux de l’agglomération parisienne : il n’a pas réduit pour autant le nombre de logements et n’a pas empêché de nombreux acteurs de continuer à investir dans l’immobilier.
b) Cela va t-il décourager la construction de nouveaux logements ? Dans l’urgence, il s’agit de répondre aux besoins de millions de locataires. Cela permettra d’éviter notamment aux étudiants de louer à la rentrée des appartements pour un loyer augmenté de 20% par rapport à l’année précédente. Mais ca ne suffira pas à éteindre la crise du logement : c’est pourquoi nous allons lancer la programmation de la construction de 150 000 nouveaux logements sociaux par an conformément aux engagements du Président de la République.
c) Le dispositif n’a pas été suffisamment concerté en amont ? Dans l’immédiat, il s’agit d’appliquer pleinement la loi de 1989, ce qui n’a pas été fait depuis plus de quinze ans et de prendre des mesures d’urgence face à la crise du logement. Dès l’adoption de ce dispositif, une concertation sera lancée avec l’ensemble des acteurs pour réformer la loi de 1989 afin d’avoir un encadrement des loyers clairs et une stabilité juridique pour les locataires comme pour les propriétaires. Notre objectif reste de faire baisser les loyers.