Pour une école de l’émancipation et de la promotion sociale

Quand on parle « école » on pense immédiatement apprentissages, transmission des savoirs… l’enseignant étant là pour « enseigner » et l’élève pour apprendre. Comme si c’était aussi simple !

En quoi l’école peut elle servir la « promotion sociale «  ? Le peut-elle… d’ailleurs… Le collège unique qui a été institué par souci d’équité est globalement un échec.

Le bilan global de l’école au sens large est colporté comme très négatif. Qui est responsable ? Les enseignants ? Les élèves ? Les parents ? L’Etat avec la politique impulsée ? La société dans son ensemble ?

Il s’avère que nous avons changé d’époque. Impossible de comparer les enfants d’il y a seulement 20 ans, (10 ans même ?) avec ceux d’aujourd’hui. Et on continue de vouloir les faire entrer dans les mêmes moules, les mêmes démarches… Aberrant.

Le changement d’époque nous oblige à réviser le modèle.

Actuellemment nous sommes sur les bases suivantes :

  • Une consommation instituée en « raison de vivre » et une marchandisation de tous nos biens, y compris du savoir avec le profit comme moteur.
  • La compétition vue sous l’angle du « normal », de l’indispensable pour «  arriver »…
  • L’individualisme comme preuve de « liberté ». D’ailleurs, partout on nous parle de «placer l’individu, l’enfant « au cœur ». Ce ne serait pas mal dans l’absolu mais ça se traduit comment dans la réalité ?
  • un progrès scientifique et technique considéré comme une certitude de progrès social
  • Le saccage de la Planète qui crée des inégalités insupportables. Ces inégalités sociétales qui entraînent les inégalités scolaires et les inégalités de santé….

Vous le voyez, modifier cet état de fait va exiger une transformation radicale de nos politiques. C’est un projet de société.

C’est Edgar Morin qui écrit :

«  Les problèmes sont multidimensionnels. Plus progresse la crise, plus progresse l’incapacité à penser la crise; plus les problèmes deviennent planétaires, plus ils deviennent impensés »

Nous vivons dans un monde que l’on dit « systémique » et d’une grande complexité. Ce qui se passe ici, entraîne des conséquences là-bas….

Nous ne pourrons pas être neutres et accepter les rapiéçages, les vues partielles au travers d’un tube.

Notre éducation nous a appris à compartimenter et nous ne savons pas relier : relier les connaissances mais aussi les individus.

Une enquête réalisée dans les quartiers populaires fait apparaître des difficultés par «  l’absence de liens… » et celle-ci enclenche beaucoup de mal-être.

En matière d’éducation, nous subissons les leçons données par les lobbies, par ceux « qui nous veulent du bien » mais qui veulent surtout nous contraindre à l’uniformisation, à la pensée unique… pour, au passage, s’en remplir les poches, ou nous contraindre à subir et nous taire…

La télé fait l’éducation du spectateur et elle le formate.
La pub fait notre formation, celle des enfants et elle leur dit de manière subliminale mais très effective : exige, demande, refuse, c’est ton droit.

A nous, elle dit : ça c’est ringard, achète ça, bois, mange, c’est bon pour ton corps ta santé, tes enfants, etc….

C’est pourquoi je répète ce que je dis depuis des années : écrivons au fronton des écoles «  Ici, on apprend à penser, par soi-même et grâce aux autres ».

Ce serait le rôle des profs de s’assurer que tous les élèves puissent approfondir les sujets, se forger des arguments, leur permettre de les exprimer, les écouter et en tenir compte. C’est peut-être ça le début de la démocratie et de la formation citoyenne.

Parallèlement, il faudra s’occuper des parents, des adultes, sur leur lieux de vie, de travail et leur proposer une formation culturelle, aux médias, à la parentalité, à l’environnement, à la santé, à la citoyenneté…

Parce qu’apprendre tout au long de sa vie c’est vivre, c’est exister, c’est créer, c’est avoir un projet, c’est avoir du plaisir, c’est pouvoir communiquer avec les autres, partager, posséder« un bien commun »

Cette politique il nous faut la construire ensemble.

Il nous faut donner du sens à notre place de citoyen du Monde, lutter contre l’idéologie individualiste, libérale, redonner le goût de la « chose » publique, libérer du « temps »… vous avez tous pu remarquer combien nous sommes tous dans « la dictature de l’urgence ».

Il va falloir admettre que c’est à plusieurs que l’on apprend tout seul parce que c’est l’hétérogénéité qui permet à chacun de se construire.

Pour moi, l’éducation est première partout et en tous lieux, c’est le soubassement de la vie en société, et même si elle est exigeante, elle est libératrice et émancipatrice…

Elle dépasse de loin le simple fait « enseignement » et aucun enseignant ne peut se suffire d’enseigner sans éduquer…