Vivre ensemble.

Le vivre ensemble pose la question de l’altérité, de la cohésion sociale, de la force des liens sociaux qui unissent les citoyens, c’est-à-dire sur ce qui fonde les valeurs de notre République, à savoir la Fraternité. Mais traiter du « vivre ensemble » c’est aussi s’interroger sur l’égalité, autre valeur cardinale de notre République.

Qu’en est-il de ces valeurs dans notre société ?

Le constat, à beaucoup d’égards, est bien amer.

Notre modèle social est mis à mal, certains acquis obtenus de haute et de longue lutte au cours du siècle passé sont remis en cause : les instances d’intégration (la famille, le travail, la politique,…) semblent en crise. Je dis semblent en crise car on peut être dubitatif au regard d’un certain constat.

L’école (l’école, instance d’intégration fondamentale) l’école ne serait même pas capable de détecter les futurs délinquants chez les enfants de 3 ans.

On peut aussi citer le climat pestilentiel de la campagne présidentielle ou on recherche un bouc émissaire aux maux de la société. Il s’agit de montrer que l’enfer c’est les autres. L’autre c’est l’étranger. Ce profiteur qui viendrait enlever le pain de la bouche des Français, qui viendrait ruiner notre système de protection sociale (autre facteur de cohésion sociale). L’autre c’est aussi ces Français fraudeurs qui videraient nos Caisses d’Allocations Familiales ou de Sécurité Sociales. C’est aussi ces chômeurs qui se contentent de parasiter la société.

Pour tous les autres maux il faudrait se tourner vers les technocrates de Bruxelles.

On cherche à monter les Français les uns contre les autres, mais aussi les Français contre les étrangers, les chômeurs contre les travailleurs, les Européens les uns contre les autres, les pauvres contre les riches. Mais il parait que diviser c’est mieux régner.

On le sait, ces arguments fallacieux ne résistent pas à l’analyse. Je vais vous le dire, même ceux qui utilisent ces arguments, le savent. Mais cela leur permet d’échapper à l’évaluation de leur politique. En gros ce n’est pas de notre faute, c’est la faute de l’Autre.

Alors on profite de la crise pour créer cette division, on invoque la mondialisation est la contrainte extérieure, la loi du marché. Il paraît que l’on n’aurait pas le choix qu’il faut accepter les coupes sombres dans le domaine social et accepter le détricotage de ce qui fonde notre cohésion sociale .

Logique de rentabilité dans l’école : moins d’écoles, moins de professeurs, plus d’élèves par classe : pour 2012, près de 14 000 supprimés dans l’Éducation nationale. Dans le jura, pour le premier degré, c’est 61 suppressions de postes dont 43 postes devant classe, 12 hors classe (les derniers postes de RASED non pourvus) 6 postes d’assistants langues. La suppression de 13 postes (équivalent temps plein) est prévue dans les collèges, et une vingtaine de postes sera supprimée dans les lycées généraux et professionnels à la rentrée prochaine.

Le détricotage des instances de cohésion sociale, c’est aussi le transfert des missions de solidarité vers l’assurance privée, la constitution d’un marché ségrégatif des services à la personne, le dévoiement des fonds de la protection sociale sur les marchés financiers, lent travail de sape contre le système mutualiste : toutes ces dérives sapent la cohésion sociale, isolent des pans entiers de la population, encouragent la solitude et le chacun pour soi.

Attachés aux principes d’égalité et de solidarité inhérents aux systèmes de protection et de sécurité sociales issues du Conseil National de la Résistance, nous, écologistes, appelons en même temps à leur renforcement et à leur adaptation aux grands défis de la période.

Nous refusons l’idée selon laquelle les déficits n’auraient pas d’autres issues que la réduction des prestations sociales et le transfert d’une partie des activités de la sécurité sociale vers le secteur lucratif.

Vivre ensemble c’est permettre à chacun de s’épanouir, permettre à chacun de trouver sa place, permettre à chacun de vivre sa citoyenneté, instaurer le respect de l’égalité et de rehausser les valeurs de fraternité et de solidarité.

1. Permettre à chacun de s’épanouir

L’école joue dans ce domaine un rôle central.

Le modèle de développement que défendent les écologistes s’appuie sur l’intelligence et la créativité humaine. L’éducation doit donc être au centre de la vie sociale et concerne autant l’école que la famille et les relations entre les générations, le tissu social et associatif, les médias qui entourent jeunes et adultes et conditionnent représentations et comportements. Nous souhaitons donc une véritable mobilisation de l’ensemble de la société pour promouvoir, tout au long de la vie, la coopération à la place de la compétition, la confiance et la sécurité plutôt que la sélection et l’exclusion.

Les écologistes défendent le retour de l’éducation au rang des priorités nationales, mais pas pour revenir au statu quo. Notre projet s’appuie sur trois principes, qu’il faut faire vivre dans l’éducation de demain : l’autonomie, la solidarité et la responsabilité.

Mettre en cohérence le primaire et le secondaire pour scolariser les enfants, de 6 à 16 ans, sans sélection ni orientation. Les structures de cette école fondamentale et le service de ses enseignants seront définis au terme d’une consultation qui consistera à donner aux organisations représentatives, mouvements et associations, les moyens de mettre en débat leurs propositions dans l’ensemble de la société.

Cette école fondamentale rompra avec la culture de la performance, du résultat et du contrôle généralisé, symbolisée par l’interconnexion des fichiers informatiques et les évaluations nationales visant à mettre les établissements en concurrence.

Pas de jeune de 16 à 25 ans sans solution.

Nous devons rendre l’école à celles et à ceux qui la vivent .

Nous garantirons aux enseignants la maîtrise de leur métier.

 

2. Vivre ensemble c’est permettre à chacun de trouver sa place

Pour que chacun trouve sa place, il faut d’abord laisser personne sur le bord du chemin. Les jeunes sont les premiers à être frappés par le chômage, paradoxe d’une société riche : le niveau de vie s’accroît au fil des décennies pour une part importante de la population mais dans le même temps une frange de la population se paupérise (on compte plus de 8 millions de pauvres en France – ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté – 954 euros pour une personne seule, soit 14 % de la population). Les PCS les plus élevées se reproduisent : le fils d’ouvrier sera ouvrier et le fils de cadre supérieur sera cadre supérieur. L’ascenseur social semble en panne. Je veux ici saluer l’initiative intelligente prise par Richard Descoing, décédé il y a peu. Il a ouvert Sciences po Paris à quelques élèves méritants des ZEP. C’est un changement puisqu’on substitue à la compétition la qualité des individus.

La pauvreté se durcit en France. On oublie trop souvent qu’elle rajeunit : 1 jeune sur 5 sous le seuil de pauvreté, un sur 4 au chômage avec des pics allant jusqu’à 40 % pour les jeunes sans formation ou victimes de discrimination.

Cette pauvreté, ces précarités génèrent des inégalités qui ont des effets catastrophiques sur le long terme en matière de santé (hausse du nombre d’étudiants sans mutuelle) comme en matière d’éducation (décrochage scolaire). Malgré cela, le gouvernement s’obstine à refuser aux 18-25 ans le filet social minimal du Revenu Social d’Activité (socle). Au mépris de l’égalité des droits ou des chances, on enfonce la tête sous l’eau de ceux qui perdent pied.

L’autonomie de la jeunesse n’est pas un risque, c’est une chance pour notre pays. Pour la favoriser, Eva Joly propose de supprimer toutes les discriminations liées à l’âge en matière d’accès aux minimas sociaux et de faire de la lutte contre la précarité (stages contrats atypiques…) une priorité.

Aujourd’hui, près d’un quart de la population française a plus de 60 ans et l’espérance de vie augmente régulièrement.

La situation des personnes âgées est marquée par de fortes disparités sociales, qui placent les uns dans l’opulence extrême, les autres dans une grande pauvreté aggravée par la stagnation et la réforme des pensions.

Les aînés ne sont pas, comme l’instillent certains discours, une charge pour la société ; ils sont un maillon important de la transmission de l’expérience collective et de la cohésion.

 

3. Permettre à chacun de vivre sa citoyenneté

La citoyenneté est le fait pour une personne d’être reconnu comme membre d’une cité nourrissant un projet commun auquel ils souhaitent prendre une part active. Sur la base de cette définition plusieurs pays ont accordé le droit de vote aux étrangers : l’Irlande autorise, depuis 1963, tous les résidents étrangers à voter aux élections municipales, sans durée minimale de résidence. La Suède (en 1975), le Danemark (en 1981), les Pays-Bas (en 1983), le Luxembourg (en 2003) et la Belgique (en 2004) ont octroyé le droit de vote à tous les étrangers qui résident sur leur territoire depuis plusieurs années – entre deux et cinq ans. Idem pour L’Estonie, la Slovénie, la Lituanie, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie et la Grèce.

En refusant d’accorder le droit de vote aux étrangers résidents aux élections locales, c’est comme si on leur disait « paye tes impôts mais surtout ne vient pas nous dire comment on peut les utiliser ». Il est temps qu’au pays des droits de l’homme, la démocratie repose sur le principe d’égalité.

Vivre ensemble c’est rehausser les valeurs de la République.

 

4. Respect de l’égalité.

Pl s’agit de traiter de l’égalité identitaire. C’est-à-dire l’égalité homme-femme, le respect des minorités sexuelles, des handicapés et des identités ethniques.

Il y a loin pour les femmes entre l’égalité formelle, proclamée et l’égalité réelle. Les inégalités demeurent fortes, les violences et le sexisme perdurent, la division des rôles reste la norme.

Dans les faits, la France est au 46e rang mondial du classement des inégalités femmes/hommes.

Dans le contexte actuel de crise, celles-ci s’accroissent. 80 % des salariés qui vivent avec 750 euros par mois ou moins sont des femmes (Seuil de pauvreté 954 €).

L’inégalité de salaire entre homme et femme atteint jusqu’à 27 % de différence.

Les femmes occupent 18,5 % des sièges à l’Assemblée nationale.

Tous les deux jours, une femme décède sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint.

Pour les écologistes, un monde solidaire ne peut se construire que si les rapports sociaux entre les femmes et les hommes changent considérablement.

Cela exige une réponse politique pour garantir une véritable égalité, ainsi que sa prise en compte au sein de toutes les politiques.

De l’école au travail, c’est toute la société qui doit être transformée pour permettre le respect par une approche féministe.

En France aujourd’hui, trois millions de personnes sont discriminées et ne bénéficient pas des mêmes droits que leurs concitoyens en raison de leur orientation sexuelle. Plusieurs milliers de personnes voient leurs droits au respect de la vie privée et à la maîtrise de leur parcours sanitaire bafoués, du seul fait de leur transidentité.

Des plus hauts sommets de l’État à l’école, l’homophobie, la lesbophobie et la transphobie persistent sous des formes diverses et plus ou moins violentes. Réussir l’égalité des droits n’est donc pas seulement un impératif juridique, mais une nécessité pour vivre ensemble dans une société respectueuse de chacun-e.

Selon les critères, entre 7 et 42 % de la population française est concernée par le handicap, avec de grandes différences territoriales de prise en charge et d’importantes inégalités.

Une politique écologiste du handicap est fondée sur la solidarité, et notamment sur la solidarité nationale, sur l’autonomie des personnes.

Elle vise l’inclusion des personnes en situation de handicap par une application pleine et entière de la loi de 2005 dite, loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté, et par l’application de la Convention internationale des droits des personnes handicapées, ratifiée récemment par la France, qui prévoit notamment : le droit à la santé, à des revenus suffisants, à la compensation intégrale du handicap, à l’accessibilité, à la non-discrimination…

Notre société doit ainsi garantir aux personnes en situation de handicap les conditions de l’exercice plein et entier de la citoyenneté.

 

5. Rehausser les valeurs de fraternité et de solidarité

Depuis trente ans, le discours faisant de l’immigré le bouc émissaire de la crise de l’emploi, de la crise sociale, de la “crise des banlieues”, des déficits des budgets sociaux ou des comptes de l’État, est passé subrepticement de l’extrême droite jusqu’au sommet de l’État.

Depuis 2002, nous assistons à une avalanche de textes répressifs et de pratiques attentatoires aux droits humains : objectifs chiffrés d’expulsions, accroissement du contrôle social et politique, développements et croisements des fichiers, y compris biométriques…

Le discours politique reflète l’hypocrisie du système qui profite largement d’une main d’œuvre “illégale” et reconnaît en avoir besoin dans des secteurs entiers.

Le projet écologiste réaffirme une vision mondiale de la question – liée aux déséquilibres économiques mondiaux et déjà aux changements climatiques – et prône une politique d’immigration ouverte et humaniste permettant une autre approche des rapports Nord-Sud que la guerre aux migrants que mène actuellement l’Union européenne.

Le “droit à la mobilité”, qui figure dans la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (article 13), est un élément fondamental de la liberté de chaque être humain. Elle sera précédée d’une mesure d’apurement des situations créées ces dix dernières années.

 

Vivre ensemble c’est donc réaffirmer les valeurs qui fondent notre république de Liberté, Égalité, Fraternité et Solidarité. Les écologistes complètent traditionnellement le principe de solidarité par ceux d’autonomie et de responsabilité. Une société écologiste est une société de l’attention partagée, protectrice et respectueuse, émancipatrice et responsable.

Être attentifs et « prendre soin les uns des autres » sont nos mots d’ordre.

Le maintien et le développement de la qualité de la relation entre les personnes et les groupes sociaux, la capacité des populations à prendre en charge elles-mêmes directement cette relation en complément des services publics, sont des axes forts de nos actions.

Ainsi, l’appel à la mobilisation directe des groupements et acteurs de la société civile, et à la participation de tous aux missions éducatives, à la production et au partage de la culture, ainsi qu’aux liens entre les générations, sont des marqueurs forts des propositions écologistes.

Je veux croire à notre idéal républicain, même si j’en appelle à 6° République. L’action publique ne doit pas abdiquer face aux chantres du libéralisme, face à ceux qui veulent voir l’État reculer dans tous les domaines.

Nous devons faire communauté pour faire sens.