Budget 2012 : pour un budget en faveur d’un développement soutenable de nos territoires

Intervention de Raymonde Poncet :

L’économie générale du projet de budget 2012 reste proche du budget précédent mais quelque chose a néanmoins changé.
Pour la première fois et chaque fois désormais, le vote du budget est précédé d’un rapport sur le développement durable et les principes directeurs de ce rapport doivent éclairer nos engagements budgétaires.
Pour les écologistes, l’exercice n’est pas nouveau mais nous espérons que nos questionnements seront par ce préambule mieux écoutés et pris en compte.
Les budgets par politiques renvoient régulièrement aux contraintes financières et nous obligent à quelques remarques générales sur ces contraintes.
Ainsi, le budget apparaît surdéterminé par la rigueur budgétaire dont il convient de remarquer qu’elle ne s’applique pas à tous les dossiers et surtout qu’elle ne résulte pas d’une loi naturelle que nous ne pourrions mettre en débat.
Nous ne nous trompons pas d’assemblée mais la contrainte sur notre budget est d’abord le report par l’Etat sur les collectivités de son propre problème budgétaire, qui provient, mais je ne développerai pas, des recettes fiscales auxquels l’Etat a renoncé plus que des dépenses de notre modèle social.
Cette externalisation par l’Etat des conséquences de sa politique nationale, vous la constatez en pointant les écarts grandissants entre le coût des dispositifs décentralisés des Prestations Universelles Obligatoires et les recettes de compensation : 148 millions cumulés pour le seul RMI puis RSA, soit plus que notre capacité d’autofinancement annuelle et l’équivalent de 22 % de notre encours de dette. C’est chaque mois, plus de 3,5 millions que l’Etat laisse à la charge de notre département.
185 millions manquants depuis 2002 quant à la compensation de l’AdPA où l’engagement de 50 % de participation des concours de la CNSA s’est traduit par un taux réel de compensation de 31 %.
Pour ces deux prestations, l’Etat manque à ses engagements pour 333 millions, c’est aussi cela qui est toxique dans notre dette.
Et que dire de la baisse rapide depuis 2010 du taux de couverture de la Prestation de Compensation du Handicap qui ne couvre désormais qu’un tiers de dépenses qui resteront dans l’avenir très dynamiques.
Aussi, Monsieur le Président, ces centaines de millions que l’Etat économise sur le dos des collectivités territoriales entravées dans leurs missions sociales, sont bien notre contribution principale à ce que vous appelez « les efforts d’assainissement des finances publiques qui doivent légitimement être poursuivis conjointement par l’Etat et les collectivités locales » mais vous avez compris que nous ne considérons pas cette contribution, qui pèse sur notre fonctionnement, comme légitime.
En conclusion, cette contrainte financière ne relève pas d’une loi naturelle mais d’une politique et ne partageant pas cette politique, nous n’en partageons pas les dogmes.
La structure des recettes qui ôtent tout levier fiscal et met sous tutelle et sous conditions les dotations de l’Etat conduit à une recentralisation financière contradictoire avec la politique de décentralisation des compétences et lamine les marges de manœuvre des collectivités territoriales invitées à décliner les mêmes choix qui nous ont conduit à la crise sociale et environnementale.
Portant une analyse critique sur cette politique descendante des contraintes créées par le national, nous nous opposerons à faire de même en externalisant les contraintes sur nos partenaires associatifs qui, au côté de nos services, s’engagent sur nos missions, ou en renonçant à la gestion directe de nos services publics à partir d’un calcul comparatif de prix qui ne tient pas compte de l’externalisation sur la société de coûts sociaux.
Ainsi, en imposant un taux directeur arbitraire, au mieux de 1,5 %, calqué sur l’atonie de nos recettes pour beaucoup d’enveloppes sociales, nous faisons fi de la croissance des besoins sociaux due à la crise ou aux données démographiques, et nous mettons en difficultés les associations partenaires qui assurent une partie des missions sociales départementales.
Est-il normal, pour ne prendre qu’un exemple, alors que la situation de mal logement a empiré ces 20 dernières années, que la crise économique renforce la précarité sociale, et tout en appréciant l’effort d’investissement à travers l’OPAC du Rhône et notre participation à la rénovation urbaine, que le Fonds de Solidarité pour le Logement bénéficie d’un budget quasi constant, en baisse même depuis trois ans pour l’Accompagnement Social Lié au Logement, que l’aide à la médiation locative voit sa dotation gelée depuis 2005 et demeurer à un niveau dérisoire par logement ?
Est-il acceptable que les aides financières et techniques à la Vie Associative baissent de 10 % après avoir déjà été amputées de 1 million d’euros en 2010 et 2011, démultipliant la baisse des financements de l’Etat de près de 15 % ces dernières années.
Le département devrait se souvenir qu’au-delà de leur rôle d’amortisseur social en période de crise, le monde associatif participe activement à l’insertion en contractant de nombreux emplois aidés. Les contrats aidés devraient d’ailleurs faire l’objet d’évaluation quant à leur utilité sociale et à leur contribution au parcours d’insertion.
Un euro public versée au monde associatif mobilise le double en bénévolat et il est des économies non pertinentes quand elles occultent cet effet de levier.

La prétendue bonne gestion du département consiste donc, face à la progression mécanique des dépenses de fonctionnement des 3 prestations individuelles de solidarité et face à des recettes de fonctionnement quasi constantes, à maintenir l’équilibre du budget de fonctionnement en contraignant voire diminuant en termes réels, beaucoup d’enveloppes sociales.
Des dotations nominales qui ne bougent pas, donc qui diminuent et ce, alors que les besoins explosent conduisent à une moindre réponse aux besoins et concentre notre intervention au curatif.
Je viens de parler de l’accompagnement social au logement, il y a aussi les dépenses d’insertion hors allocations RSA.
Aussi, au-delà de la critique externe de ces contraintes financières, nous souhaitons passer d’une réduction mécanique de beaucoup de budgets à une véritable conditionnalité sociale et écologique de nos aides et actions pour redéployer nos aides et libérer des marges de manœuvre.
En préalable, nous souhaitons réaffirmer que même si les missions de notre champ de compétences sont centrales, nous soutenons le maintien des budgets pour la Culture et le Sport et nous souhaitons que l’économie réalisée sur l’achat de prestations aux Clubs professionnels dont nous nous félicitons, permettent d’abonder l’aide aux clubs sportifs. Nous apprécions que ces deux budgets qui sont en général les premiers touchés par le resserrement programmé des marges budgétaires départementales, en tant que relevant d’une compétence générale, soient préservés,
Redéployer les aides, c’est par contre questionner des soutiens qui participent d’effets d’aubaine ou d’effet d’habitude.
Monsieur le Président, dans votre avis sur le Schéma Régional Climat Air Energie vous émettez un avis favorable aux orientations tout en pointant que les « objectifs sont ambitieux et seront difficiles à atteindre, compte tenu des financements à mobiliser ».
Nous pensons que les objectifs du schéma sont à la hauteur de l’urgence et qu’il est de notre responsabilité de participer, dans le champ de nos compétences, aux investissements nécessaires.
Les moyens, il faut donc aller les chercher et nous continuerons à ne pas voter certaines dépenses qui redéployées, devraient, dès notre budget 2012, abonder un fonds départemental pour la rénovation thermique des logements sociaux et lutter contre la précarité énergétique, ou soutenir l’installation d’agriculteurs bio pour respecter dans ce département les objectifs fixés pour cette année 2012 de 6 % de Surfaces Agricoles en bio et de 20 % de repas bios et locaux dans les collèges.
Moyens qui nous permettront de nous associer, au côté de la région, aux multiples projets locaux structurant les nouvelles filières de la conversion écologique et de la transition énergétique.
Aussi, nous ne comprenons pas que le budget de fonctionnement de la politique Environnement émarge à 12,6 millions d’euros alors qu’il était de 17 millions en moyenne ces 4 dernières années. De la gestion des déchets et des espaces naturels sensibles aux politiques de l’énergie et de l’eau, en passant par les politiques en faveur de la forêt, les nombreux axes d’intervention devraient s’accompagner a minima du maintien des moyens financiers, pour une politique volontariste en faveur de l’environnement et de l’accompagnement au changement des comportements.
Bien souvent, le budget maintient des interventions sous le seul prétexte des retombées en termes d’emplois comme si les ressources financières employées aux investissements sociaux et environnementaux ne créaient pas aussi des emplois et alors que beaucoup de filières dont nous avons besoin pour atteindre le facteur 4, sont plus riches en emplois.
Les investissements nécessaires doivent être programmés, même au prix d’une augmentation maitrisée de la dette vu la difficulté d’augmenter l’épargne brute, d’autant que beaucoup de ces investissements généreront des réductions de dépenses de fonctionnement qui permettront en partie de rembourser le capital emprunté.
Le département a encore des marges d’endettement qu’il doit consacrer exclusivement aux dépenses sociales et environnementales qui engagent l’avenir. De plus, les recettes provenant des droits de mutation semblent minorées.
On parle de dette financière mais nous contractons tous les jours une dette écologique auprès des générations futures et dès aujourd’hui auprès des populations modestes.
Des investissements ciblés sur les populations vulnérables permettront de diminuer les charges contraintes et c’est là un des axes essentiels de progression du pouvoir d’achat.
Tous les investissements ne se valent pas et toutes les dettes non plus.
Nous partageons l’effort sensible en faveur des collèges, que ce soit les crédits d’investissement ou la poursuite de la tarification sociale dans les dépenses de fonctionnement. Nous souhaitons néanmoins le développement de l’approvisionnement en circuits courts et en produits biologiques pour les cantines avec un engagement ambitieux d’objectifs et de moyens dès 2012.
Le niveau des dépenses d’équipement reste soutenu et cela est nécessaire, mais ces dépenses doivent rester ciblées sur nos objectifs sociaux et environnementaux car si notre capacité d’autofinancement reste stable, elle signe encore une situation tendue rapportée à nos recettes de fonctionnement.
Comme je l’ai évoqué précédemment, cette épargne brute n’émarge à ce niveau en valeur absolue que par la pression sur des dépenses utiles, et j’ajouterai dans le budget 2012, la pression sur la politique départementale des ressources humaines qui ne peut servir de prochaine variable d’ajustement.
Aussi, si la capacité de désendettement du département ne présente pas de risques notables pour autant qu’aboutissent les efforts sur le réaménagement des encours de la dette toxique, nous serons attentifs à la pertinence des investissements et à la progression de ceux qui conditionnent notre avenir.

En conclusion, Monsieur le Président, mes chers collègues, si nous ne votons pas ce budget primitif pour toutes les réserves que je viens de développer, nous voterons toute décision modificative qui marquera une inflexion stratégique du département pour un développement soutenable, social et écologique, dans l’intérêt des habitants de notre territoire.

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