La circulaire de rentrée ou les limites du cynisme en matière de politique éducative

Luc Chatel a obtenu le ministère de l’éducation parce qu’il était un professionnel de la communication : la circulaire pour la rentrée de 2012, parue cette semaine, confirme ce rôle exclusif d’un ministre prêt à tout pour « vendre » la politique de son gouvernement à trois semaines d’une élection mal engagée.

C’est avec un cynisme accompli qu’il assume les contradictions les plus flagrantes : mettre en avant « l’école du socle commun » quand une des priorités de la droite au pouvoir a été de rétablir un pallier d’orientation avant la troisième ne manque pas de sel. L’insistance sur « la personnalisation au service de l’égalité des chances », de la part d’un ministre qui a poursuivi le démantèlement des Réseaux d’Aide aux Elèves en Difficulté (RASED) confine à la provocation. Affirmer que « l’assouplissement de la carte scolaire contribue à l’égalité des chances » est une insulte à toutes les familles qui subissent l’aggravation des inégalités scolaires entraînée par cette politique irresponsable, dénoncée par tous les spécialistes.

Compte tenu de la saignée que l’Education nationale, comme les autres services publics, a connue (76000 postes en six ans), le ministre ne peut guère mettre en avant que quelques dispositifs fortement controversés, comme les « internats d’excellence », qui visent à extraire les élèves les plus dynamiques de leur milieu social, ou le « livret personnel de compétences » et les multiples évaluations afférentes, qui dénaturent et discréditent, dès la maternelle, le principe sans cesse invoqué du socle commun.

L’école a suffisamment de problèmes pour ne pas devenir aussi l’otage des discours politiciens d’un ministre aveuglé par des positionnements idéologiques sans horizon. Ses difficultés requièrent au contraire que, dès l’été 2012, le ou la nouveau/nouvelle président-e donne à l’ensemble de la société la possibilité d’imaginer ensemble, loin des obsessions politiques ou des partis-pris idéologiques, ce que peut être l’éducation apaisée dont elle a besoin. Les Etats généraux de l’école fondamentale qu’Eva Joly appelle de ces vœux doivent être la première étape pour sortir de cette manipulation systématique.

Philippe Meirieu, Yann Forestier et Olivier Masson
Conseillers éducation pour Eva Joly

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