Les Pays, un outil pour la transition écologique.
Les Pays, un outil pour la transition écologique.
Alain Cordier
Conseiller régional de Bourgogne
Président du Pays de la Bresse bourguignonne
Depuis bien longtemps les écologistes proposent d'organiser les institutions locales de façon plus démocratique, plus simple, plus lisible. L'empilement des structures actuelles complique la tâche des élus et rend les démarches intercommunales totalement opaques pour les citoyens. Devant la commission Balladur en 2009, nous proposions de passer de 8 niveaux territoriaux possibles à « un système très simple articulé autour de 3 niveaux de collectivités locales qui correspondent à l'avenir : les communes, les communautés et les régions, avec un mode de scrutin identique... Ces communautés prendraient le nom d'agglomérations, en zone urbaine, ou de pays, en zone rurale ou péri-urbaine ». Ces propositions sont confortées par l'évaluation des actions qu'ont pu mener les pays, malgré un contexte administratif lourd. Ils ont constitué la seule innovation des dernières décennies pour nos territoires ruraux, la seule remise en cause d' un système archaïque et clientéliste
qui ne répond plus aux exigences actuelles en matière de cohérence de l'action publique, de développement soutenable, de démarche de projet, de démocratie participative.
Cohérence : des territoires plus forts pour agir, en préservant leur identité.
Dans un monde sans cesse plus urbanisé, le plein exercice de la démocratie passe, pour le monde des campagnes, des bourgs et des petites villes, par une nécessaire unité qui permette de peser et d'agir. Il faut respecter l'attachement des citoyens à la commune et à son action de proximité irremplaçable. Pour obtenir des services de qualité, il est cependant indispensable dans le monde rural de s'unir, sur un projet, à l'échelle de territoires géographiquement cohérents. Un terroir à forte identité – peu importe sa taille, 40 000, 200 000 habitants ... - peut seul assurer l'égalité républicaine aux ruraux, en mettant sur pied comme ont commencé à le faire les Pays, des politiques en matière de santé, de culture, de protection de l'environnement, d'enfance et de jeunesse, de tourisme, d'économie locale etc …
Développement soutenable : protéger, économiser, partager.
La préservation des milieux naturels et agricoles s'étudie et se gère au niveau de territoires qui possèdent une unité écologique. C'est à cette échelle qu'on peut planifier les utilisations de l'espace et des ressources, et notamment réduire l'artificialisation en cours des sols, délirante et évidemment condamnée à court terme. La mise sur pied de schémas de cohérence territoriale (SCOT), de plans climat, trouve dans le Pays un périmètre adapté. Le gouvernement précédent a accumulé les incohérences en supprimant la loi Voynet, ancien support juridique des Pays, tout en faisant appel à cette structure pour de multiples actions, SCOT, pôle d'excellence rurale, ou contrats locaux de santé par exemple.
Une démarche de projet au service de la population.
C'est le projet territorial qui fédère les communes d'un Pays, c'est lui qui organise le partage équitable des équipements, c'est lui qui remplace avantageusement la joyeuse course aux subventions diverses qui prévalait il y a encore quinze ans. Un territoire rural n'est pas la simple juxtaposition de cent clochers, de cent principautés, il a besoin d'un contrat de développement global, cohérent, respectueux des milieux et des ressources locales. Des Pays confortés avec un statut de collectivité à part entière, avec une assemblée élue, peuvent faire progresser une gestion écologique, soucieuse du patrimoine local.
Les Pays, outils pour une démocratie vivante.
Un des succès des Pays a été d'intéresser de nombreux citoyens et acteurs locaux à la vie de leur territoire, à la définition d'une charte et de projets fédérateurs. La démocratie participative a pu dans certains pays s'appliquer au quotidien, loin des caricatures et des consultations factices qui en tiennent lieu parfois. Avec les conseils de développement, la loi avait institutionnalisé la participation des citoyens, des associations, des syndicats, aux décisions. Il est indispensable de préserver cette institution, de lui redonner un cadre légal, souple, mais obligatoire. Certains élus n'ont en effet pas encore admis cette intervention citoyenne dans la gestion. Il faut préserver et renforcer un cadre permettant aux forces économiques, aux associations, d'intervenir en apportant ainsi expertise, compétence, enthousiasme.
Dans le débat en cours sur la réforme territoriale, les écologistes doivent porter fortement ces propositions sans lesquelles une transition écologique reste un mot creux. Le carcan administratif actuel ne permettra pas une adaptation de nos territoires aux mutations indispensables, une nouvelle gouvernance démocratique au niveau de nos agglomérations et de nos pays ruraux peut y contribuer.
Alain Cordier
Octobre 2012