Sondage IPSOS sur les violences faites aux femmes.
Les violences faites aux femmes : un sujet tabou, mais un phénomène très répandu
En dépit des actions de prévention réalisées depuis trente ans, les violences contre les femmes restent tabou aujourd’hui en France, notamment parce qu’une grande partie a lieu dans l’intimité du couple, mais pas seulement. Ces violences touchent les femmes dans leur vie de tous les jours. Dans les transports, dans la rue ou au travail, leur quotidien est émaillé de remarques déplacées ou sexistes, de violences psychologiques voire physiques. L’enquête Ipsos/Logica Business Consulting réalisée pour Femme Actuelle* apporte de nombreux éléments qui en disent long sur l’ampleur du phénomène.
Un phénomène répandu dont on ne parle pas suffisamment
41% des Français connaissent dans leur entourage des personnes qui ont déjà subi ou subissent des violences parce qu’elles sont des femmes.
Malgré les campagnes de prévention réalisée sur ce sujet depuis plusieurs dizaines d’années, une très large majorité de Français (75%) a le sentiment qu’on ne parle pas suffisamment de ce fléau (contre 22% qu’on en parle comme il faut et 3% qu’on en parle trop).
Un phénomène en voie de banalisation, alimenté par un discours de dédramatisation
Pour 71% des Français, les comportements agressifs et violents vis-à-vis des femmes tendent à se banaliser dans la société française d’aujourd’hui.
Pour près d’une personne interrogée sur deux (49%), les violences contre les femmes sont principalement dues aux réactions ou aux propos qui font suite à certains faits divers qui minimisent ou mettent en doute les souffrances des femmes. Les films pornographiques arrivent loin derrière (cités par 19% des Français), tout comme les sites Internet (16% de citations) ou les émissions de télévisions qui présentent une mauvaise image de la femme (14% de citations). Chez les plus jeunes, les films X et les sites Internet sont davantage dénoncés (respectivement 27% et 20% de citations chez les 15-24 ans), même si les réactions à certains faits divers restent en tête de la hiérarchie des explications.
Police et justice au cœur de la lutte contre les violences
Comment réagir lorsqu’une femme est victime de violence ? Pour la majorité des Français, la réaction la plus efficace dans ce genre de situation consiste à encourager la victime à porter plainte (64%). Pour les femmes, il s’agit pratiquement de la seule voie possible, avec 72% de citations. Elle paraît bien plus efficace que des réactions individuelles et isolées tel qu’exiger que la personne violente cesse immédiatement (25% de citations dans l’ensemble de l’échantillon), d’essayer d’arranger les choses (6% de citations) ou de consoler la victime (3% de citations).
Pour lutter contre ce phénomène au niveau sociétal, les Français attendent que l’Etat se dote de moyens répressifs, sans pour autant négliger le nécessaire travail de prévention. 53% des Français estiment qu’un alourdissement des peines pour les personnes qui commettent des violences contre les femmes serait une mesure efficace à mettre en œuvre. 43% pensent que des actions de sensibilisation dès le collège peuvent être efficaces (au deuxième rang des mesures citées).
En revanche, les Français ne semblent pas convaincus de l’efficacité des campagnes d’information menées auprès du grand public. Elles sont citées par seulement 19% des personnes interrogées comme moyen efficace, au dernière rang des 5 mesures proposées.
Agressivité, harcèlement, insultes : les contours de la violence
Si certains gestes sont, à l’unanimité, des gestes violents, d’autres sont perçus comme agressifs mais pas nécessairement violents.
Ainsi, pour presque tous les Français (96%), gifler ou bousculer une femme est un comportement violent. La violence ne suppose pas nécessairement une atteinte physique. Pour la majorité, le harcèlement moral (83%) ou les insultes à connotation sexuelle s’apparentent à de la violence (65%).
Il n’en reste pas moins vrai que près d’un Français sur six (16%) et surtout plus d’un homme sur cinq (21%) continue de considérer que le harcèlement moral ne relève pas du domaine de la violence.
Par ailleurs, les Français montrent davantage de complaisance face à certains propos ou certaines attitudes. Les comportements de drague très déplaisants au travail, les remarques sexistes sur le physique ou les vêtements ou les insultes contre les femmes au volant s’apparentent davantage à de l’agressivité qu’à de la violence. C’est en tout cas ce que pensent entre 48% et 56% des personnes interrogées, en fonction de l’item concerné.
Plus d’1 femme sur 5 affirme avoir été victime d’une agression ou d’une tentative d’agression sexuelle
Autre constat, plus alarmant, la violence contre les femmes est souvent physique. En dépit de la gravité de tels comportements, les agressions contre les femmes sont particulièrement fréquentes : en France, 22% des femmes françaises ont déjà été victimes d’une agression ou d’une tentative d’agression sexuelle, dont 5% à plusieurs reprises. 21% des femmes ont déjà été victimes d’une agression physique qui s’est produit parce qu’elles étaient une femme.
Plus d’1 femme sur 4 affirme avoir été victime à un moment de sa vie de violences conjugales répétées
Bien souvent, les femmes connaissent bien leur agresseur dans la mesure où beaucoup des violences s’exercent au sein même du foyer. Dans cette sphère, les résultats de l’enquête sont édifiants. 26% des femmes interrogées ont déjà été victimes répétées de violences conjugales. C’est la violence psychologique qui est la plus fréquente : 20% des femmes ont subi à plusieurs reprises le dénigrement de leur conjoint ou de leur partenaire. 16% ont été violemment insultées. La violence physique n’est pas en reste : 12% des femmes ont à plusieurs reprises été obligées à faire l’amour après avoir dit à leur partenaire ne pas le vouloir et 8% des femmes ont été plus d’une fois giflées ou frappées par leur partenaire. D’une gravité extrême, ces violences concernent tous les âges et tous les milieux sociaux. Elles sont plus encore fréquentes dans les foyers défavorisés : 38% des femmes aux revenus les plus faibles ont déjà rencontré des situations de violence dans leur couple, contre 16% des femmes aux revenus les plus élevés.
Enquête réalisée du 23 ou 28 octobre 2012 auprès d’un échantillon de 1014 personnes, dont 525 femmes, représentatif de la population française. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas appliquée aux variables de sexe, d’âge, de catégorie socioprofessionnelle de la personne de référence au sein du ménage, de région et de catégorie d’agglomération.
Vincent Dusseaux
Chef de groupe Ipsos Public Affairs
vincent.dusseaux@ipsos.com
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