PLF 2018 : la République des inégalités !
Alors que le gouvernement adopte ce mercredi en Conseil des ministres le projet de loi de finances 2018, les écologistes s’alarment du creusement des inégalités qu’il causera.
Quand bien même le Président Macron clamait, la main sur le coeur, à l’Assemblée générale des Nations-unies : ”Nous avons traîné à traiter des inégalités contemporaines qu’un capitalisme déréglé s’est mis à produire”, il présente aujourd’hui un projet de loi de finances qui va creuser encore les inégalités, dans un pays où 10% des Français-e-s détiennent déjà plus de 50% des richesses.
On l’aura compris, à l’instar des questions écologiques ou des ordonnances travail, le gouvernement sait manier la pommade rhétorique qui lui permet de faire passer des lois qui ne seraient certainement pas approuvées par une majorité de Français-e-s, si leurs effets étaient clairement énoncés. Car quid des 50% les plus pauvres qui détiennent moins de 5% des richesses nationales ? Ce projet de loi se fera à leur détriment : “En tenant compte des baisses annoncées de prestations sociales (…) les 10 % les plus riches verraient leurs revenus annuels augmenter de 1 193 € contre une baisse de 337 € pour les 10 % les plus pauvres”, souligne une étude réalisée par Oxfam et rendue publique le 25 septembre. Si on s’en tient au projet de loi, c’est à dire hors baisse des prestations sociales, les 10 % plus riches bénéficieront d’une hausse de revenus au moins 18 fois plus importante que les 10 % les plus pauvres.
Les mesures en faveur des plus riches sont légion dans ce budget:
- La transformation de l’ISF en impôt sur la fortune immobilière permettra au 1% les plus riches d’économiser 3,6 milliards d’euros.
- La “flat tax” sur les revenus du capital, auparavant imposés au barème de l’impôt sur le revenu, permettra aux plus aisés de ne payer que 30 % d’impôt sur leurs revenus financiers, au lieu des 60 % de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu, augmentée de la CSG et des prélèvements sociaux.
- Les grandes entreprises sont également les grandes gagnantes de cette réforme de par la baisse du taux d’imposition sur les sociétés de 33.3 % à 25 %, ce qui coûtera au moins 15 milliards d’euros par an à l’Etat.
Et ces cadeaux aux plus aisés et aux entreprises seront financés par les retraités et les plus fragiles.
- Dès le 1er janvier les retraités subiront une augmentation de la CSG (à partir de 1200 euros de pension mensuelle)
- Et la baisse de 5 euros par mois des aides personnalisées au logement mise en place dès le mois d’octobre touchera tous les allocataires, dans le parc social comme dans le parc privé. Mais au-delà de cette baisse uniforme, pour atteindre les 1,7 milliards d’économies que l’Etat attend sur le budget du logement, c’est une baisse concomitante de 50 euros par mois sur les loyers et les APL du logement social qui est prévue. Une mesure qui devrait certes être neutre pour les locataires, mais qui représente 1,4 milliard d’euros de recettes en moins pour les organismes HLM, une coupe budgétaire qui va anéantir l’effort de construction et de réhabilitation des logements sociaux. Le gouvernement a-t-il bien pris la mesure du besoin de logements nouveaux, de la dégradation de certaines résidences et de la nécessité d’accélérer l’isolation thermique des bâtiments pour faire face aux enjeux climatiques ?
- Et enfin la baisse des contrats aidés permettra de financer les mesures en faveur de l’ISF et des revenus du capital ! une décision dure et injuste qui conduit à refuser d’aider les plus éloignés de l’emploi à retrouver une vie professionnelle, et qui met en danger le service aux usagers dans nombre d’associations et de services de proximité. Le ministère de l’Emploi verra ainsi ses crédits amputés de près de 12%. Le nombre d’emplois aidés sera ramené de 320.000 à 200.000 !
Les écologistes trouvent incompréhensible ce projet de loi de finances qui, encore une fois, favorise une minorité aisée et contribue au cercle vicieux de la concurrence fiscale entre les États, dans un contexte où les grandes entreprises – notamment celles du CAC 40 – connaissent une hausse de leurs bénéfices. Incompréhension d’autant renforcée par les effets d’annonce du Président qui aime à se parer d’une rhétorique égalitaire.
Europe Écologie Les Verts s’oppose à ce projet de loi de finances et appelle le gouvernement à revoir sa copie, pour être en cohérence avec les discours et les intentions affichées.
Il n’est pas possible de dénoncer l’évasion fiscale des GAFA, d’appeler à l’effort collectif pour redresser les comptes publics, et de déplorer les dérives du capitalisme d’une part et de mener d’autre part des politiques d’austérité qui ne touchent toujours que les segments les plus précaires de la population.
La transition écologique, si elle est effectivement un enjeu du quinquennat, mérite plus que des mots. Elle ne pourra se faire sans une fiscalité redistributive qui permette aux plus précaires de financer le changement et sans taxer durement les pollueurs qui sont aussi les plus grands délocalisateurs d’emplois et exploiteurs de main d’oeuvre bon marché. Ce projet de loi laisse pourtant la planète sans aide et sans projet : face à l’urgence écologique et sociale, ce laisser-faire libéral est simplement inacceptable.
Julien Bayou et Sandra Regol, porte-parole nationaux