Foncier agricole de SABATEY à Mérignac : achetons les 50 hectares à la SAFER pour installer des agriculteurs BIO 🗺
Gérard Chausset, adjoint au Maire de Mérignac et Président du Groupe des élus écologistes à Bordeaux Métropole a adressé au Maire de Mérignac concernant le rachat de 50 hectares à la SAFER pour installer des agriculteurs BIO
Monsieur le Maire, cher Alain,
Le développement d’une agriculture périurbaine avec pour projet l’installation d’activités agricoles écologiques à vocation maraîchère ou d’élevage dans le cadre de circuits courts fait partie de notre projet municipal.
Loin d’être un effet de mode, cela correspond à un véritable besoin écologique et une nécessité pour les citoyens. C’est également un moyen de préserver de l’urbanisation et de l’étalement urbain des terres à vocation agricole.
Les terrains de Sabatey, 87 hectares, appartenant à la SAFER, situées à la lisière de la ville, correspondent en plusieurs points à ces objectifs.
L’attribution par cet organisme, sous tutelle de l’Etat, de 50 hectares pour la création ex-nihilo d’un centre équestre ne correspond pas à ces objectifs, loin s’en faut.
Si faisant suite à la mobilisation de la ville, l’attribution définitive est aujourd’hui suspendue par lePréfet, le dossier est toujours pendant, en attente d’une décision finale.
C’est pourquoi je m’adresse aujourd’hui à toi, en tant que Maire de Mérignac pour faire une proposition mais également en ta qualité de Parlementaire, car le déroulement du dossier soulève à mon sens plusieurs questions, notamment sur le rôle de la SAFER.
En effet, en quoi l’attribution de 50 hectares de terres agricoles pour la création d’un centre équestre répond-elle à une réalité économique alors que notre ville accueille déjà le plus grand centre équestre de la région?
N’est-il pas étonnant qu’une personne de 25 ans, avec nécessairement des moyens financiers et des appuis considérables pour mener à bien un projet de cette envergure, devienne propriétaire de ces terres par l’intermédiaire de la SAFER et du statut de « jeune agriculteur » ? Cette personne aura la possibilité de construire et d’investir un tel équipement en bénéficiant d’aides publiques, de subventions et de fonds européens à terme alors que l’activité de centre équestre ne correspond pas véritablement à une activité agricole (même si administrativement elle en relève).
Aussi, en cas de vente de terrain agricole, la priorité donnée au statut de « jeune agriculteur »selon les textes, si elle me parait louable tant on connaît la difficulté pour les jeunes de s’installer, n’est pas sans poser question dans le cas précis, tant la décision de la SAFER apparaît ici comme un détournement « légal » de la règle au détriment de l’intérêt général.
Quelle est la réalité économique d’un tel projet, alors que les besoins en agriculture périurbaine sont avérés et que le développement des circuits courts fait partie des priorités affichées dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014?
Mais le cas que nous rencontrons à Mérignac n’est pas un cas isolé. Dans son rapport de février 2014 intitulé « les SAFER : les dérives d’un outil d’aménagement agricole et rural », la Cour des Comptes indiquait d’ailleurs que « les SAFER mènent aujourd’hui, de manière très indépendante, des activités diversifiées et peu contrôlées par les pouvoirs publics, ce qui rend nécessaire un recadrage de leurs missions et une meilleure maîtrise de leur réseau.»
Déjà en 1995, la Cour des Comptes avait fait des recommandations en direction des conseils d’administration des SAFER, ce qui a conduit depuis 2009 à y intégrer des représentants de conseils régionaux, généraux et municipaux de leur ressort.
Néanmoins dans son rapport de février 2014, les recommandations de la Cour des Comptes sont sans ambiguïté : « Les instances de gouvernance des SAFER doivent s’ouvrir à d’autres acteurs du territoire. La transparence dans leurs modes de décision doit être renforcée et l’adoption de règles déontologiques ne pourrait qu’y contribuer. »
C’est pourquoi je te demande, en ta qualité de parlementaire, d’examiner une possible évolution réglementaire afin que l’opportunité effective des projets ainsi que la consolidation des exploitations existantes soient prises en compte, et que les collectivités soient plus étroitement associées aux décisions qui les concernent, notamment dans le cadre du développement de l’agriculture périurbaine.
La proposition de loi visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation, portée par la députée de Dordogne, Mme Brigitte Allain, sera d’ailleurs examinée la semaine prochaine auSénat après son adoption à l‘Assemblée Nationale le 14 janvier.
Aussi, pour en revenir à notre situation locale révélatrice de la situation dénoncée par la Cour des Comptes, je propose que la ville de Mérignac acquiert les 50 hectares (le coût est estimé aux environ de 500 000 €), comme l’a fait par exemple la Communauté du Grand Périgueux sur 20 hectares à Marsac-sur-l’Isle. Cette acquisition permettrait de développer des projets d’installation, en location ou en cession sur la base d’un cahier des charges compatible avec des objectifs définis de façon collégiale.
En lien avec les services de l’Etat nous pourrions sortir de l’impasse dans laquelle nous a mis la SAFER et trouver une issue positive correspondant à nos objectifs à savoir le développement d’une agriculture périurbaine socialement et écologiquement soutenable.
Des organismes associatifs mais également des institutions comme la Caisse des Dépôts sont tout à fait en mesure de nous accompagner sur un tel projet.
Ce serait l’occasion de donner un signal fort et permettrait l’installation d’agriculteurs et de maraîchers s’inscrivant dans une démarche responsable.
Je te prie de croire en l’expression de mes sentiments respectueux.
Gérard Chausset
Adjoint au Maire de Mérignac, Conseiller Communautaire de Bordeaux-Métropole, Président du Groupe EELV