La fausse lutte contre les discriminations du gouvernement

La fausse lutte contre les discriminations du gouvernement

Lundi, 02 Novembre 2009 12:00
  
Arrêt sur Images
 a passé au crible les neufs pages d’un dossier spécial du Point intitulé« Diversité, le nouvel impératif ». Affligeant !

Outre offrir des espaces publicitaires à des entreprises qui prétendent lutter contre la discrimination, Le Point se contente d’effleurer le bilan de la HALDE et les actions du gouvernement… Un mauvais travail de journaliste qui ne vise qu’à servir la soupe à nos dirigeants. Démonstration.

[…] Discriminations : des dossiers traités à la Halde et à la va-vite ?

Contrairement à ce que laisse entendre le dossier du Point, le bilan de la Halde est beaucoup plus contrasté et son action très critiquée. Ainsi, dans les dossiers du Canard Enchaîné publiés le 7 octobre 2009, on apprend par exemple que « les 7.788 réclamations enregistrées en 2008, selon son dernier rapport, n’ont abouti qu’à 64 réclamations pénales, 42 médiations et 299 recommandations adressées au gouvernement ». Un bilan assez maigre, proportionnel aux moyens qui lui sont alloués : « La Haute Autorité a beau être de plus en plus sollicitée, ses effectifs et son budget, eux, n’ont jamais vraiment décollé. Celui-ci a péniblement atteint en 2009 les 11,83 millions d’euros. Conséquence, concède la Halde : « Un certain nombre d’études ont été reportées. Et le rythme de mise en place des correspondants (ils étaient 112 au 31 Août) a été ralenti ». Des relais pourtant… « bénévoles », et censés tenir « 123 permanences dans 22 régions, à hauteur d’une demi-journée par semaine ».

La Halde est l’instance de ce type « la plus faible d’Europe ». Il n’y a que 82 salariés et 10 stagiaires. Des effectifs pas vraiment à la hauteur de cette autorité Haute : « Trois fois moins peuplée, la Belgique disposait par exemple en 2005 d’une structure équivalente forte d’une centaine de salariés et de 18 permanences décentralisées ».

Par ailleurs, le peu de moyens alloués à la Halde est manifestement mal utilisé. « Un rapport de la sénatrice socialiste Nicole Bricq, rendu public au début du mois de juillet » a critiqué le coût exorbitant du bâtiment qui abrite les bureaux de la Halde : « Avec une surface utile brute de 2.926m², la Halde s’acquitte chaque année d’un exorbitant loyer de 1,855 million d’euros, charges comprises, soit l’équivalent d’un peu moins de 20% de son budget. « C’est un bail de neuf ans ferme conclu en 2005. Il se termine le 12 janvier 2014 », précise la sénatrice. Du côté de la Halde, un peu gêné, on précise qu’une « renégociation est en cours » avec le propriétaire Unibail, l’un des plus gros bailleurs du marché parisien ».

Pourquoi le budget de la Halde est-il aussi faible ? Le Point a pourtant expliqué que l’Etat faisait son maximum pour lutter contre les discriminations. Là aussi, l’hebdomadaire aurait-il un peu forcé le trait ?

Embauche d’handicapés : le gouvernement fait tout pour faire… des économies

Le Point en est convaincu : le gouvernement est déterminé sur la question des discriminations à l’embauche. Pour preuve, une hausse des amendes pour les entreprises qui ne rempliraient pas leur quota d’employés handicapés. Sauf que l’Etat lui-même ne donne pas l’exemple. Toutes les administrations publiques ont l’obligation d’accueillir au moins 6% de travailleurs handicapés. Seulement, aucune administration ne remplit cet objectif. La loi prévoit donc une amende qui vient alimenter un fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP).

L’amende s’élève à environ 5.000 euros par salarié manquant. Mais les administrations traînent les pieds pour payer, notamment le ministère de la Justice, censé donner l’exemple. C’est ce que révélait le Canard Enchaîné dans son édition du 1er avril 2009. En décembre 2008, le fonds d’insertion envoie un « commandement à payer » à Rachida Dati. L’amende est de 7,6 millions d’euros et doit être payée avant le 1er janvier 2009. Deux mois plus tard, ce n’était toujours pas fait comme le raconte le Canard : le 12 mars 2009, lors de la réunion du comité national du Fonds d’insertion, certains membres se sont aperçus que le ministère de la Justice n’avait pas payé l’amende. L’un des membres s’est confié à l’hebdomadaire : « Lorsqu’il s’agit d’appliquer la loi, la justice doit être exemplaire. Si elle donne le mauvais exemple et ne paie pas l’amende, d’autres ministères seront tentés de la suivre ». Pour tenter de se justifier et couper court à la polémique, le ministère de la justice finit par évoquer un hypothétique « problème administratif ».

En réalité, ce n’est pas la première fois que l’Etat est pris en défaut sur la question de l’insertion des handicapés en milieu professionnel. A trois reprises, en 2008 et 2009, le gouvernement a fait des économies budgétaires sur le dos des handicapés :

• Avril 2008 : le gouvernement a annulé 17 millions d’euros de crédit pour l’insertion professionnelle des handicapés. Pour justifier cette annulation de crédits, le ministère du budget a déclaré que le Fonds d’insertion était mal géré, sans plus de précisions.

• Septembre 2008 : le gouvernement a supprimé 50 millions d’euros d’aide à l’Agefiph, fonds d’aide pour l’insertion professionnelle des handicapés. A l’époque, la CGT avait qualifié ce tour de passe-passe comptable de véritable « hold up », car cela revenait à retirer à la structure 10% de son budget prévisionnel 2008-2010. Selon le président de l’Association, cette ponction de l’Etat prive 28.000 personnes à mobilité réduite d’une formation qualifiante.

• Avril 2009 : le gouvernement plafonne les crédits pour les personnes inadaptées au travail. Aujourd’hui, plus de 100.000 personnes qui ont des handicaps physiques ou psychologiques les empêchant de s’insérer sur le marché du travail classique, travaillent dans des Etablissements et Services d’aide par le travail (Esat). Ces organismes reçoivent des subventions, d’habitude négociées au cas par cas. Désormais, l’enveloppe sera globale pour plafonner les crédits.

Une Halde inefficace, un gouvernement économe dans ses dépenses pour lutter contre certaines discriminations. Pourquoi Le Point a-t-il caché ces informations ? Sans doute parce qu’il faut vous convaincre que la lutte avance…

(Source : Arrêt sur Images)

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