Intervention relative aux orientations budgétaires 2014

Par Martine Alcorta – Intervention en séance plénière du 21 octobre 2013.

Chères collègues, chers collègues,

Nous avons commencé cette plénière par des échanges sur le développement durable. Cette scène aurait été inimaginable à l’époque où l’industrialisation galopante n’avait pas encore atteint une grande partie du monde. Le boomerang environnemental réveille nos consciences et c’est une bonne chose même si on peut regretter que nous n’ayons pas su l’anticiper.

Pour nous, écologistes, la priorité n’a pas changé, c’est comme il y a quatre ans la transition écologique de l’Aquitaine qui guide notre lecture budgétaire et nos choix politiques. L’écologie ne se gagnera pas contre l’économie et le social. Penser et agir en trois dimensions est devenu une nécessité. Il faut intégrer à chaque décision économique, ces données écologiques, non pas comme une contrainte mais comme une dynamique supplémentaire. L’idéologie est source d’économie aux deux sens du terme. La compétitivité qui ne tiendrait pas compte de l’externalisation des coûts environnementaux et sociaux serait une compétitivité qui amènera l’humanité dans le mur.

Dans un contexte de budget contraint, il y a deux manières de préparer l’avenir. Nous n’acceptons pas la politique d’austérité et nous proposons à la place celle de l’efficacité. La première dit « nous dépensons trop » et la deuxième « nous dépensons mal » ; la première dit « il faut plus taxer », la deuxième dit « il faut mieux taxer » ; la première dit « il faut créer plus de richesse », la deuxième dit « il faut mieux la répartir », la première dépolitise le débat budgétaire alors que la deuxième a le mérite de remettre au centre la question des priorités politiques. La première sème le désespoir, la défiance et le sentiment d’abandon qui alimentent le vote abject, ce vote qui monte alors qu’il n’est en rien une solution aux problèmes et qu’il pourrait remettre au pouvoir un passé qu’on voudrait révolu à jamais.

Et c’est parce que nous croyons plus à l’utilité et à l’efficacité de l’action qu’à la séduction de la posture, que nous préférons, en cette période de crise, être « dedans » que « dehors ». Et même si la frustration nous guette à chaque coin de réunion, même si nous mesurons le décalage entre l’urgence et les réponses, nous pensons, avec espoir, que la prise de conscience écologique est véritablement installée aujourd’hui. Certes nous entendons encore des esprits sceptiques, y compris, parfois dans cette plénière, mais nous entendons aussi, avec beaucoup de soulagement, de plus en plus de questionnements.

L’année qui vient de s’écouler a vu passer beaucoup de débats sur la transition écologique et c’est une très bonne chose. Il était nécessaire de faire partager au plus grand nombre les impératifs climatiques, énergétiques et environnementaux. Mais une dérive guette souvent le décideur, car à force d’expliquer ce qu’il faut faire, on peut oublier l’essentiel : « faire ».

Et le « faire » devra se lire dans le budget  qui nous sera proposé lors de la prochaine plénière. Doit-on  voir dans la décision modificative du budget une orientation à venir pour 2014 ? Elle fait apparaitre 53 millions d’investissements nouveaux, avec des objectifs que nous partageons pour la formation professionnelle, la culture, l’acquisition foncière du littoral. Mais nous constatons que 68% de cette dépense sont consacrés à des projets que nous qualifions de surdimensionnés dans le contexte actuel et au vu des orientations que nous avons dessinées préalablement, je veux parler des 31 millions pour la LGV et 5 millions pour le grand stade. Car après les rêves viennent parfois les cauchemars, l’effet « grande vitesse » n’est pas systématiquement synonyme de développement économique, de cohésion territoriale, le raccourci est bien hypothétique comme le démontre aujourd’hui une certaine réalité entre Langon et Pau.

 

L’innovation est au cœur des missions de la Région, mais de quelles innovations parle-t-on ? Le plus souvent cette question est abordée  sous l’angle technologique, issu des sciences « dures », alors que l’innovation dans le champ social ou culturel est rarement reconnue comme telle. Il y a pourtant des trésors d’innovation dans certaines entreprises de l’économie sociale et solidaire, dans les fonds d’investissement citoyens… Mais quand elles bénéficient d’un soutien des pouvoirs publics, c’est dans des proportions sans commune mesure avec les sommes considérables accordées aux entreprises porteuses d’innovations technologiques. Sont-elles pour autant moins créatrices d’emplois ? Leur utilité sociale et environnementale, dont elles sont souvent porteuses, même si elles ne sont pas les seules, devrait pourtant attirer notre considération budgétaire si nous voulons un budget adapté aux changements climatiques et aux besoins de solidarité qui deviennent criants sur nos territoires.

Nous aimerions voir davantage privilégiées les aides aux entreprises, d’autres pistes innovantes et pourvoyeuses d’emplois : celles qui sont portées par l’économie du quaternaire qui consiste à produire des « services intégrant des biens ». Le consommateur du quaternaire ne se contentera plus d’acheter, par exemple, un équipement, il préférera s’abonner à un service qui lui permettra de disposer du matériel qu’on lui aura conseillé, qu’on lui installera, qu’on lui apprendra à utiliser et qui sera dépanné ou changé si besoin. L’avantage de cette économie est qu’elle est plus difficile à concurrencer que la production classique de biens et services car elle remplace la valeur des biens par leur usage et limite ainsi l’obsolescence programmée. Voilà une compétitivité qui n’est pas synonyme de dumping social et environnemental.

Nous ne pouvons qu’encourager le développement de l’économie circulaire et nous nous réjouissons des engagements de la Région de porter à 32% la part des énergies renouvelables d’ici 2020 et de créer l’Agence de la Biodiversité sur notre territoire aquitain.

 

Je sais aussi que vous partagez nos orientations en termes d’aménagement du territoire. L’Aquitaine n’est pas une terre homogène et uniforme et les politiques régionales doivent lui apporter des réponses différenciées. Nous nous félicitons d’expérimenter sur les territoires ruraux des formes innovantes de densification qui permettront aux habitants de se rapprocher de services de proximité et de retrouver une vie plus apaisée. Cette vision polycentrique de l’aménagement du territoire doit prévaloir sur la recherche d’un effet métropolitain à cercles concentriques et à forces centripètes.

 

L’Aquitaine a besoin de décisions politiques qui l’orientent dans le sens où nous demande d’aller un rapport comme celui d’Hervé Le Treut. Elle a besoin de développer des emplois qui soient compatibles avec les conclusions de ce rapport. Le chemin à suivre a un nom, la transition écologique de l’Aquitaine, c’est celui qui nous guide, nous, élu/es écologistes depuis le début de la mandature, et nous avons bien l’intention de maintenir le cap.

Je vous remercie.

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