Travailler moins, Travailler tous, Travailler mieux !

ELECTIONS LEGISLATIVES 10 ET 17 JUIN 2012
Projet Europe Ecologie Les Verts
Travailler moins, Travailler tous, Travailler mieux !
Trois ans après l’ouverture de la crise du modèle libéral-productiviste, l’extrême-droite caracole en tête dans toute
l’Europe et en particulier en France. Rien de plus normal : « L’ancien se meurt, le nouveau ne parvient pas à voir le jour,
dans cet interrègne surgissent les monstres ». Le nouveau, il revient aux écologistes de l’aider à voir le jour : c’est
ce que nous appelons la conversion verte, la transformation écologiste de l’économie.
L’enjeu de la lutte entre « les monstres » et l’écologie politique, ce sont les couches populaires précarisées, paupérisées par la crise, et avant tout les chômeurs, les ouvriers et les employés, y compris ceux du secteur public démantelés par la
politique de la droite. Mais les travailleurs et les précaires ne demandent pas seulement un emploi. Ils demandent de la
considération, ils demandent de donner du sens à leur travail. Sarkozy avait marqué des points en exaltant la souffrance du travail (« la France qui se lève tôt »). Il est temps de remettre en avant le sens, la valeur du travail. Car ce qui caractérise l’approche écologiste de l’économie, par rapport à la maxime sociale du XIXe siècle (« D’abord produire, ensuite répartir »), c’est qu’elle remet au centre la question du sens même de « produire ».
Produire quoi ? à quel coût pour les travailleurs, l’environnement et les générations futures ? dans quels rapports
sociaux et subjectifs entre le producteur, son acte et les bénéficiaires de son acte ?
C’est à partir de ces questions de base que l’écologie revient sur la question de la répartition, en l’élargissant, du partage
salaire /profit à la promotion des biens communs, aux revenus sociaux assurant le droit à l’existence des sans emplois et des retraités…
1. La dignité du travail et la conversion verte.
L’effondrement des idéaux socialistes, jusque dans les classes laborieuses qu’ils étaient censés défendre, ne vient pas tant de leur impuissance que de l’abandon de la bataille pour la dignité, pour la fierté dans le travail. Cette dignité repose à la fois sur la conscience que l’activité est utile à autrui et qu’elle est menée de manière humaine, avec une maîtrise, par le producteur individuel et collectif, des buts et de la manière de réaliser cette activité utile.
Soumise à l’autorité hiérarchique et au marché, soumise à des mégastructures qui la dépassent, l’activité productrice devient un temps perdu sur la vie, où la dignité même se perd, avec les conséquences aujourd’hui désastreuses pour l’écologie du travail : la flambée des maladies professionnelles et des suicides liés aux cadences, au stress et au harcèlement.
La réforme de l’organisation productive sur le lieu de travail est le premier maillon conversion d’une conversion
écologique de l’économie. Elle doit mettre l’accent sur le développement et la reconnaissance des savoirs et des savoir-faire. Pas seulement une reconnaissance symbolique et pécuniaire. C’est dans l’organisation même du travail, avec une implication négociée des travailleurs, que seront les sources nouvelle la productivité, et non plus dans le travail en grande série à cadence de plus en plus élevée. À la révolution industrielle du XIXé siècle, au taylorisme
du XXè siècle, doit succéder une révolution industrieuse où le travail qualifié remplacera l’usage intensif des matières premières et de l’énergie.
Les emplois de demain, ceux de la conversion verte seront massivement des emplois qualifiés de service aux
personnes, depuis les transports en commun jusqu’à l’aide à domicile. Même les millions de chantier d’isolation des
logements exigeront une haute qualification, où le rapport au destinataire final du travail (les habitants) sera toujours
présent. Il en sera de même pour les paysans et les travailleurs de la restauration lors du passage au bio.
Cela implique une réforme massive du système de formation tout au long de la vie, et la reconnaissance de droits
professionnels attachés à la personne et non à l’entreprise. Tout changement de statut et d’employeur doit ouvrir des
droits à un temps-formation, tout temps de formation ouvre des droits à une classification supérieure. Sécurisation des
carrières professionnelles par l’interdiction de l’usage injustifié des statuts précaires et le droit à des formations requalifiantes, y compris de longue durée, en particulier vers les métiers de la conversion verte.
entreprises, qu’il s’agisse des services publics ou des entreprises classiques, où le collectif des travailleurs doit avoir son mot à dire sur l’organisation du travail comme sur la stratégie. Cela vaut surtout pour les entreprises de l’économie sociale et solidaire, qui par définition combinent une gestion démocratisée de l’entreprise et une activité au service de la communauté et contrôlée par elle. C’est pourquoi l’ESS (qui n’occupera certes jamais tout le champ de la production humaine, mais assumera de plus en plus les services publics locaux et se substituera au travail domestique patriarcal) est une forme de production privilégiée par les écologistes.
Nos propositions : Renforcement des comités d’hygiène et de sécurité (étendu aux sous- traitants) et de l’inspection du
travail, avec droit de poursuite contre les conditions de travail malsaines (du point de vue de l’environnement de travail tant physique que psychologique) et le harcèlement. Participation des travailleurs à la discussion sur l’organisation du travail (au moins deux heures par mois sur le temps de travail). Participation des représentants du comité d’entreprise au
conseil d’administration avec voix délibérative.
2 La transformation du mode de consommation : promotion des services publics et des biens communs.
On mesure depuis un siècle la «productivité » comme : la quantité de marchandises produites par unité de temps de travail. On oublie que les ponctions gratuites sur la nature et sur les biens communs participent à cette efficacité, que l’on avait tendance à attribuer au seul travail direct. De même on ignore la dégradation de la qualité des produits avec
leur standardisation industrielle. Aujourd’hui, la crise naît largement de ce gaspillage des ressources gratuites et de la dégradation du produit.
Cela implique aussi une réforme profonde des modes de  gouvernance des conversion verte sont orientés vers la
création de richesse non marchande, mise gratuitement ou à bas pris à la disposition des usagers. Nous avons besoin d’une remise à niveau massive de nos services
publics, en particulier dans l’éducation, la
culture, la santé et dorénavant l’aide à
domicile aux personnes en situation de
dépendance… Ces biens, distribués en
partie gratuitement, sont évalués à leur
coût de production et non à un prix
incluant du profit. Pourtant ils augmentent
le bien-être de tous en particulier des plus
démunis, et créent énormément d’emplois non délocalisables.
Revenir à une nourriture saine et de proximité, mieux isoler les logements au lieu de gaspiller de l’énergie à les chauffer
ou à les rafraîchir, transporter écologiquement les usagers en transports
collectifs suppose beaucoup plus d’emploi du travail humain que l’actuelle
organisation de l’offre. La « décroissance
sélective » du gaspillage implique une
croissance de l’activité industrieuse, avec
la formation correspondante. Cela signifie
qu’à la question « comment répartir les
fruits de la révolution industrieuse ? »
l’écologie répond : « d’abord en
augmentant la qualité de la vie, la qualité
des biens communs, des services collectifs comme celle des consommations
individuelles ». Cela peut se traduire dans
un premier temps par une réduction
apparente de la productivité (il faut plus
de travail pour nourrir la population quand
on passe au bio) mais c’est parce qu’en
réalité une partie du travail est dorénavant
affectée à la protection de la santé
humaine et de la nature.
Autre source de déclin apparent de la
productivité, autre coup au mythe de la
croissance : beaucoup de chantiers de la
Encore plus profondément, nous mettrons
l’accent sur la prévention en matière de
santé : mieux vaut ne pas tomber malade
qu’être soigné, même bien ! Les mesures
telles qu’interdiction de certaines pollutions, des médicaments et aliments
dangereux, tout comme la répression du
harcèlement hiérarchique et la réduction
du rythme du travail, en augmentant le
niveau de santé et en réduisant la fréquence des maladies chroniques
(cancers, asthmes, diabètes, dépressions
etc), finiront par réduire le coût de la
santé, et peut être même le nombre
d’emplois consacrés à soigner. Mais ils se
traduiront par une hausse considérable du bien-être.

3 La répartition sociale de la
productivité.
Après
30
ans
d’un
modèle
de
développement outrageusement favorable
aux profits et aux revenus de la propriété,
un rééquilibrage en faveur du travail et
des revenus sociaux (retraite, minima
sociaux, etc) est indispensable. Cette
évidence avait été contournée avec
succès par le mythe du « travailler plus
pour gagner plus » : on a vu ce qu’il en a
été… À ce mensonge, l’écologie oppose : «
Travailler moins pour travailler tous et
vivre mieux »

Cette redistribution en faveur des revenus
sociaux est une question d’équité, c’est
nécessaire aussi pour que la modification du système de prix provoqué par les
écotaxes ne provoque pas l’hostilité des
plus démunis, c’est enfin la forme
embryonnaire d’un revenu d’existence.
Quant à la redistribution en faveur du
travail, elle peut prendre la forme soit
d’une hausse du temps libre, soit d’une
hausse
du
pouvoir
d’achat.
La
redistribution de la productivité sous
forme de temps libre favorise une
civilisation de l’être et du lien social au
détriment d’une société de l’avoir et de la
prédation sur l’environnement, elle assure
un partage du travail au bénéfice de
l’emploi de tous et du bonheur de vivre de
chacun. Elle doit toutefois assurer le
rééquilibrage du pouvoir d’achat jusqu’au
revenu moyen.
Il faut fixer clairement l’ordre des urgences
:
En premier, la revalorisation des
revenus sociaux (RSA…) et des plus
bas salaires.
En seconde urgence, la reprise de la
réduction de la durée du travail, en
commençant par la défense du droit à
la retraite. Mais il ne faudrait pas
bloquer toute la réduction de la durée
du travail en fin de vie. Pour arriver à la
retraite en bonne santé et bien inséré
socialement, il faut réduire le temps
de travail tout au long de la vie. Il faut
d’abord consolider (voire rétablir !) les
35 heures par la suppression des
heures supplémentaires détaxées, la
limitation
de
l’annualisation
et
l’instauration d’un droit de la ou du
travailleur sur les dates de sa RTT, afin
de concilier vie au travail et vie
personnelle. Enfin la reprise de la
marche aux 32 heures, et la création
de jour de fête fériés nouveaux en
cours d’année, notamment des fêtes
non- chrétiennes (Kippour et Aid El-
Kébir) et des causes communes (Jour
de la Terre, etc).
La question de la retraite restera centrale
dans les années qui viennent car (outre le
fait qu’elle est la cible actuelle de la
droite) elle combine un aspect « gain de
temps libre » et un aspect « revenu social
». La conquête du temps libre par
allongement de la durée de vie, à durée du
travail constante, est la forme la plus
naturelle
de
redistribution
de
la
productivité. Elle doit être financée par
une répartition nouvelle de la richesse
annuelle produite. D’ici 2050, elle implique
un déplacement de 0,3 % par an de la part
du PIB vers les retraités, ce qui est tout à
fait réalisable mais doit être combiné avec
une répartition nouvelle de la valeur
ajoutée entre revenus du travail et revenus
du capital et de la propriété. La
participation accrue de ces derniers
implique l’abandon du mythe de la retraite
comme « salaire différé » et une
fiscalisation partielle de son financement.
La
possibilité
de
retraite
sur-
complémentaire individuelle facultative ne
doit pas être une nouvelle occasion de
profits du capital, elle doit être (comme la
complémentaire santé) assurée par le
mutualisme.
Nos propositions : retour aux 60 ans et
160 trimestres de cotisation, sans décote
ni surcote, avec possibilité du passage
progressif à la retraite avant 60 ans, prise
en compte des métiers difficiles et des
carrières féminines incomplètes par des
trimestres gratuits, ouverture d’un droit
aux
cotisations
retraites
(sur
prêt
personnel éventuellement) aux étudiants à
partir de la troisième année.
Reste que le financement de la retraite
n’épuise pas, et de loin, la question de
l’écologie du 3e et du 4e âge. La société
future se jugera à la manière dont elle
traitera ses personnes âgées.