climat – André Gattolin – sénateur http://andregattolin.eelv.fr sénateur écologiste des Hauts-de-Seine Fri, 21 Jul 2017 16:09:10 +0200 fr-FR hourly 1 Dessous des cartes consacré à l’Arctique http://andregattolin.eelv.fr/dessous-des-cartes-consacre-a-larctique/ http://andregattolin.eelv.fr/dessous-des-cartes-consacre-a-larctique/#respond Sun, 14 Dec 2014 09:43:39 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3740 Le dernier Dessous des cartes était consacré à l’Arctique. À noter que le premier rapport d'André Gattolin consacré à la région - Arctique : Préoccupations européennes pour un enjeu global - est cité en fin d’émission comme référence biographique. C’est le propre fils de Paul-Émile Victor qui produit et présente cette émission, ce qui \"embellit\" encore - de manière symbolique - cette allusion. ...]]>

Le dernier Dessous des cartes était consacré à l’Arctique.

À noter que le premier rapport d’André Gattolin consacré à la région – Arctique : Préoccupations européennes pour un enjeu global – est cité en fin d’émission comme référence biographique. C’est le propre fils de Paul-Émile Victor qui produit et présente cette émission, ce qui « embellit » encore – de manière symbolique – cette allusion.

 

Résumé sur le site de cet incontournable rendez-vous d’Arte : “L’Arctique était le bout du monde. Le réchauffement climatique va-t-il le placer au centre des préoccupations géopolitiques ? Pétrole, gaz, terres rares, les convoitises sont nombreuses. Quelles menaces cela fait-il peser sur le monde polaire ? Le Dessous des Cartes s’intéresse à cette région située aux marges du planisphère.”

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Le Groenland, un carrefour entre l’Europe et l’Arctique ? http://andregattolin.eelv.fr/le-groenland-un-carrefour-entre-leurope-et-larctique/ http://andregattolin.eelv.fr/le-groenland-un-carrefour-entre-leurope-et-larctique/#respond Sat, 13 Dec 2014 10:26:00 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3737 C’est sous le titre Le Groenland, un carrefour entre l’Europe et l’Arctique ? que le rapport d'André Gattolin vient d’être publié. Il sera disponible en version papier dès ce lundi, et est d’ores et déjà consultable ou téléchargeable en ligne sur le site du Sénat. ...]]>

C’est sous le titre Le Groenland, un carrefour entre l’Europe et l’Arctique ? que le rapport d’André Gattolin vient d’être publié. Il sera disponible en version papier dès ce lundi, et est d’ores et déjà consultable ou téléchargeable en ligne sur le site du Sénat.

Évolution du Groenland depuis 1979 et l’introduction du Home Rule (c’est-à-dire les débuts de son autonomie), analyse du pays et de sa place dans l’Arctique, relations passées, actuelles et futures avec l’Union européenne sont notamment au sommaire.

Pays fascinant et territoire hautement stratégique, le Groenland est au cœur des transformations qui touchent actuellement l’Arctique – et qui concernent, au-delà du cercle polaire, la planète dans son ensemble. Le nord constitue également un impensé majeur de l’Union européenne – qui ne réfléchit que depuis peu aux politiques qui peuvent être les siennes dans cette région, alors qu’elle travaille depuis bien plus longtemps sur ses franges est et sud. Une réflexion spécifique dans laquelle ce rapport s’inscrit pleinement.

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Rapport d’information d’André Gattolin sur son déplacement au Groenland – compte-rendu de l’examen en commission http://andregattolin.eelv.fr/rapport-dinformation-dandre-gattolin-sur-son-deplacement-au-groenland-compte-rendu-de-lexamen-en-commission/ http://andregattolin.eelv.fr/rapport-dinformation-dandre-gattolin-sur-son-deplacement-au-groenland-compte-rendu-de-lexamen-en-commission/#respond Fri, 12 Dec 2014 11:37:43 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3734 C’est mercredi 3 décembre qu'André Gattolin a présenté son rapport sur le Groenland en commission des Affaires européennes du Sénat. Vous trouverez ci-dessous le compte-rendu de ses échanges avec ses collègues sénateurs, membres de cette commission. ...]]>

C’est mercredi 3 décembre qu’André Gattolin a présenté son rapport sur le Groenland en commission des Affaires européennes du Sénat. Vous trouverez ci-dessous le compte-rendu de ses échanges avec ses collègues sénateurs, membres de cette commission.

Politique de coopération – Rapport d’information de M. André Gattolin sur son déplacement au Groenland

M. Jean Bizet, président. – André Gattolin nous a présenté, en juillet dernier, un rapport d’information sur les stratégies européennes pour l’Arctique, dans lequel il soulignait les effets du réchauffement climatique sur la fonte de la banquise mais aussi les spéculations sur les richesses supposées de son sous-sol, qui suscitent bien des convoitises.

Il nous y indiquait que l’Arctique se réchauffait au moins deux fois plus vite que le reste de la planète, ce qui entraîne un changement profond et peut-être irrémédiable de la vie dans la région – pour ses habitants et pour l’environnement, qui reste fragile. À la lumière de ces enjeux, il était légitime de s’interroger sur ce que peuvent faire l’Union européenne et la France en particulier. André Gattolin a souhaité recueillir de nouveaux éléments en se rendant au Groenland en septembre dernier, dont il vient ici nous rendre compte. Il poursuivra ensuite ses travaux sur la stratégie européenne, afin que notre commission puisse arrêter une position.

M. André Gattolin. – Le rapport que j’ai le plaisir de vous présenter aujourd’hui s’inscrit dans la continuité des travaux que je mène depuis plus d’un an sur l’Arctique et les enjeux européens qui s’y attachent. Ils s’inscrivent également dans une réflexion plus large menée par notre commission, qui s’interroge sur l’intensification de la politique nordique de l’Union européenne – sujet d’importance, mais dont on parle moins que de sa politique orientale ou méditerranéenne -, ainsi que sur la multiplication des volontés nationales de dévolution au sein de l’Union européenne, comme l’a illustré le travail de notre collègue Garriaud-Maylam sur l’Écosse. Le fait est que le Groenland entretient une relation particulière avec l’Union européenne en même temps que s’affirme sa volonté d’indépendance à l’égard du Danemark.

Ces travaux ont fait l’objet d’un premier rapport d’information, dont notre président vient de vous livrer la synthèse. Je rappelle que la France doit élaborer, pour le mois de mars prochain, sa feuille de route pour l’Arctique, qui sera aussi l’un des enjeux du COP-21 qui se tiendra à Paris en décembre de l’année prochaine.

Le Groenland occupe, dans l’Arctique, une place singulière, qui mérite que l’on s’y arrête. Il est à la fois la plus grande île de l’hémisphère nord – et la deuxième de la planète en superficie, après l’Australie – et le pays dont la population est la plus faible – il ne comptait que 56 282 habitants au 1er janvier dernier, pour une superficie qui représente quatre fois celle de la France. J’ajoute que la quasi-totalité des enjeux de la région s’y concentrent. Ancienne colonie danoise ayant gagné progressivement son autonomie, il se trouve désormais sur la difficile route vers l’indépendance. Il est donc à la recherche de nouvelles sources de revenus pour assurer son avenir et fait l’objet de très nombreuses attentions, sans être toujours en mesure de maîtriser ces évolutions et les transformations, parfois brutales pour la population, qui s’y attachent.

De surcroît, le Groenland entretient des relations riches, mais complexes, avec l’Union européenne. Il est d’abord entré au sein des Communautés européennes avec le Danemark en 1973, alors que les Groenlandais eux-mêmes s’y étaient déclarés hostiles, à 73 %, lors du référendum. Après avoir obtenu en 1979 une première inflexion vers plus d’autonomie de son statut au sein du Royaume du Danemark, le Home Rule, le Groenland a choisi de quitter les Communautés européennes. La décision a été prise par référendum le 23 février 1982 avec une majorité, plus courte qu’en 1973, de 53 % et est entrée concrètement en application le 1er février 1985. Depuis cette date, le Groenland, tout en restant institutionnellement lié au Danemark, ne fait plus partie de l’Union européenne. Jusqu’au changement de statut de l’île de Saint-Barthélemy, il a ainsi été le seul territoire à se détacher du processus de construction européenne après y avoir adhéré, il est vrai malgré lui.

Le Groenland demeure cependant largement associé à l’Union européenne. Bénéficiant du statut des pays et territoires d’outre-mer (PTOM), il lui est également lié par un accord de coopération, signé en 2007 et renouvelé il y a quelques semaines, ainsi que par un accord de partenariat dans le secteur de la pêche. Il dispose enfin, depuis 1992, d’une représentation permanente à Bruxelles, où je m’étais rendu pour la préparation de mon précédent rapport.

Autant d’éléments qui ont motivé l’organisation de cette mission, qui m’a amené, mi-septembre, sur place et à Copenhague, où j’ai rencontré la Première du Groenland.

Hasard du calendrier, des élections législatives anticipées ont été convoquées à l’issue d’une crise gouvernementale qui s’est déroulée quelques jours seulement après mon voyage. La Première, Mme Aleqa Hammond, a été contrainte à démissionner suite à des suspicions de mauvaise gestion des deniers publics. Il faut savoir que dans les pays nordiques, tout débordement, fût-il minime, est sévèrement sanctionné. L’événement est venu réveiller des critiques récurrentes de népotisme adressées à la classe politique par une partie de l’opinion groenlandaise.

Les élections anticipées du 28 novembre dernier ont été remportées d’extrême justesse par Siumut, parti de l’ancienne Première, longtemps donné battu, mais qui l’a emporté de quelque 326 voix. Ce parti, traditionnellement présenté dans la presse comme social-démocrate, mais en réalité extrêmement libéral, a occupé sans discontinuer la tête du pays depuis 1979, à l’exception des années 2009 à 2013. L’autre grand parti de gouvernement, Inuit Ataqatigiit, arrivé deuxième, se situe plus à gauche sur l’échiquier politique. La presse le range même à l’extrême gauche, mais il faut se méfier, encore une fois, de ces étiquettes médiatiques, car ce parti réunit plutôt des sociaux-libéraux. Les scores qu’atteignent ces deux partis, autour de 33 %, ne leur donnent pas de majorité pour gouverner, dans une assemblée territoriale qui ne compte pas plus de 31 députés. Siumut bénéficie d’une légère avance, mais il ne lui sera pas simple de configurer une coalition, d’autant que ces élections ont vu émerger deux nouvelles forces politiques sur lesquelles il faudra compter, et dont les orientations paraissent très différentes : le nouveau parti Naleraq, fondé en janvier dernier par un ancien chef du gouvernement et ancien membre du parti Siumut, Hans Enoksen, d’inclinaison nationaliste, arrivé quatrième, avec 11 % des voix, et le parti Demokratiit, fondé en 2003 et arrivé en troisième position, parti, à l’inverse, sceptique quant au projet indépendantiste – en tout cas quant à son rythme. Ce dernier parti se montre beaucoup plus pragmatique s’agissant de la relation au Danemark mais aussi à l’Europe et plusieurs de ses responsables ont même évoqué la possibilité de réintégrer, à terme, l’Union européenne après l’indépendance.

M. Richard Yung. – Il n’y a pas de parti vert ?

M. André Gattolin. – Tous les partis militent pour la préservation de l’environnement… et l’exploitation des richesses minières.

M. Michel Raison. – Les partis verts ne sont pas seuls à militer pour la préservation de l’environnement.

M. André Gattolin. – Certains commentateurs voient dans ces résultats l’expression d’une fracture générationnelle entre des Groenlandais plus que jamais attachés à l’idée souverainiste, et d’autres, souvent des jeunes, qui, sans être contre l’indépendance, sont plus prudents devant ses possibles conséquences, et lui préfèrent d’autres priorités.

De fait, la campagne a pu surprendre en ce qu’elle a accordé beaucoup moins d’importance qu’attendu à deux thématiques, qui avaient largement structuré le débat public ces dernières années : le projet indépendantiste lui-même, mais aussi la gestion des ressources naturelles et le développement des industries extractives, en particulier s’agissant de l’uranium et des terres rares.

Dans les années 1970 et jusqu’aux années 2000, le discours autonomiste groenlandais s’est en partie construit autour du rejet de l’exploitation de ces ressources – par les Danois ou d’autres pays de l’Union européenne. L’extraction de l’uranium a même été interdite à partir de 1988, sur décision des autorités groenlandaises. La situation a changé lorsque les progrès vers l’indépendance sont devenus plus concrets. Les revendications politiques et culturelles ont cheminé jusqu’à devenir des revendications étatistes. Or qui dit construction d’un État dit moyens financiers pour en abonder le budget et en assurer le fonctionnement. Or, le Groenland manque encore aujourd’hui cruellement de revenus qui lui soient propres. D’où la volonté de développer les industries extractives, le sous-sol de l’île étant particulièrement riche. Une première étape a été franchie avec l’adoption du Self Rule en 2009, qui a encore élargi l’autonomie du pays en transférant, notamment, la compétence sur les ressources minérales aux autorités locales. Le Groenland pouvait ainsi prendre le train de la mondialisation en marche, voire se retrouver subitement au coeur de complexes jeux géostratégiques.

La décision d’autoriser à nouveau l’extraction de l’uranium a été prise à l’automne 2013 par le gouvernement sortant, à une voix de majorité, au milieu de débats agités. Mais cette politique se trouve déjà contestée, du fait de la chute des cours des matières premières – un certain nombre de sociétés se sont d’ailleurs retirées depuis que le cours du baril est passé sous la barre des 80 dollars. Selon une étude publiée au début de cette année, l’industrie minière, même menée avec intensité, ne permettrait pas au Groenland d’équilibrer seul son budget. Les coûts d’exploration et d’exploitation sous ces hautes latitudes sont en effet considérables. Et le caractère erratique du cours des matières premières en fait un pari risqué.

Pourtant, l’économie groenlandaise, aujourd’hui très déséquilibrée, a besoin de se diversifier. Le Groenland souffre de problèmes sociaux et sociétaux considérables ; le taux de suicide, par exemple, y est plus de cinq fois supérieur au taux de suicide mesuré en France. Il n’est pas une famille, nous disent nos interlocuteurs, qui n’ait vécu la tentative de suicide d’un enfant.

Le pays souffre également de multiples déficits, notamment en termes éducatifs. L’accès à l’éducation et la qualité de la formation sont un problème récurrent au Groenland, aggravé par le fait que les étudiants partis à l’étranger pour poursuivre leur parcours académique choisissent pour beaucoup d’y rester.

Autant de facteurs qui aboutissent, en dépit d’un taux de natalité proche de deux enfants par femme, à un recul démographique. Le Groenland ne devrait plus compter, à l’horizon 2020-2030, que quelque 54 000 habitants. Avec une population aussi faible, il devient difficile d’assurer à un pays, aussi plein de richesses potentielles soit-il, son indépendance.

Autre problème de taille : le manque d’infrastructures. L’ancien aéroport militaire américain de Kangerlussuaq, seul aéroport international d’importance, ne peut être rejoint, faute de routes et d’infrastructures portuaires, que par hélicoptère ou par avion. Ce défaut d’infrastructures est un vrai problème pour le développement.

En outre, l’économie dépend très largement du Danemark, principal fournisseur du pays, et qui, absorbant 80 % de ses exportations, dont la pêche constitue 90%, assure également la quasi-totalité de ses débouchés extérieurs. Surtout, le Danemark – avec qui les relations sont pourtant loin d’être toujours apaisées – fournit directement au Groenland pas moins de 55 % de ses recettes publiques, sous forme de subventions à hauteur de plus de 450 millions d’euros par an – 480 millions en 2013. L’Union européenne, qui a très vite souhaité maintenir des relations étroites avec ce territoire, est également un partenaire financier d’importance. L’accord de pêche pour 2013-2015 assure au Groenland une contribution annuelle de 16,3 millions d’euros au minimum, tandis que l’accord de coopération 2014-2020 lui assure un soutien à l’éducation et à la formation de plus de 30 millions d’euros par an – imaginez une collectivité territoriale française de peuplement équivalent qui disposerait d’un tel soutien européen ! Notons toutefois que malgré cette aide constante, le rôle de l’Union européenne n’est pas toujours perçu positivement. Il faut dire que le bannissement, dans les années 1980, des produits issus du phoque a eu des conséquences terribles sur l’économie traditionnelle inuit dans l’ensemble du cercle polaire. Et lorsque l’on est Français, on s’entend plus d’une fois reprocher les positions de Brigitte Bardot. Des figures comme celle de Jean Malaurie et de Paul-Émile Victor viennent redorer notre blason.

La volonté d’ancrer le nouvel accord de coopération dans une politique plus globale et cohérente de l’Union européenne vis-à-vis de son nord mérite donc d’être saluée. D’autant que la volonté d’indépendance à l’égard du Danemark, à défaut d’être programmable dans le court terme, est bien réelle dans la population. Il s’agit de prendre en compte les spécificités de cette région, de ses habitants, de son économie, et des jeux d’influence qui s’y mettent en place ; de respecter les acteurs de l’Arctique et leurs aspirations – je rappelle que 89 % de la population est inuit et très attachée à l’expression d’une culture identitaire autochtone ; de proposer à nos partenaires, en bonne intelligence avec eux, le soutien de l’Union européenne là où celui-ci peut être le plus utile et le plus efficace.

L’une des pistes que l’Europe se doit d’explorer afin d’approfondir et de renouveler ses relations avec ce territoire stratégique touche aux problématiques de développement soutenable. Si les Groenlandais rêvent d’une grande industrie minière, ils ont conscience que l’échéance, faute d’infrastructures, est lointaine, et ils s’intéressent du même coup, alors qu’ils ont l’un des plus beaux glaciers du monde, à la manière dont la France a su développer un tourisme non invasif. De même qu’ils s’intéressent de près, alors que le pays est considérablement dépendant des importations agricoles, à l’agriculture sous serre, qu’ils souhaiteraient développer en coopération avec nos centres de recherche.

Le Groenland, comme le reste de l’Arctique, se transforme à grande vitesse – et ces bouleversements apportent à ses habitants tout à la fois de nouvelles opportunités et de nouveaux risques. Il appartient à l’Europe de se montrer à leur écoute pour les accompagner du mieux qu’elle le pourra, à la place qui est la sienne, dans l’intérêt des Groenlandais et en gardant à l’esprit les grands enjeux qui animent cette région et, au-delà, la planète toute entière.

Ce territoire, qui appartient au continent nord-américain, n’entretient pourtant, malgré la présence de populations inuit au Canada, que très peu de relations avec l’Amérique du Nord, même si les Américains y sont implantés, avec leur grande base de Thulé. Il est orienté vers l’Europe – le Danemark, bien sûr, mais aussi l’Islande, les îles Féroé, la Grande-Bretagne et la Norvège. Il serait bon, d’un point de vue géostratégique, que l’Union européenne prenne en compte le Groenland dans la nouvelle donne géopolitique qui, au-delà des enjeux climatiques et environnementaux, se met en place autour de l’Arctique – tensions avec la Russie, volonté des Chinois de développer leur présence dans la région.

M. Jean Bizet, président. – Il est vrai que ce pays revêt une dimension géostratégique, en même temps qu’il est un témoin de la problématique climatique en cours. Il faut être attentif à ses évolutions – d’autant que les terres rares que contient son sous-sol suscitent l’intérêt de bien des pays, au premier rang desquels la Chine, dont on sait qu’elle exploite 80 % à 90 % de ces terres, et recherche de nouveaux gisements d’exploitation, en Afrique et ailleurs.

M. André Reichardt. – Le Canada a mis en place un plan pour le développement du grand Nord. Il s’agit d’exploiter les richesses du sous-sol tout en accompagnant, dans leur développement, les populations autochtones – qui, soit dit en passant, ne voient pas les choses de cet oeil. Le Groenland manifeste-t-il une volonté similaire de développer l’exploitation minière qui justifierait un intérêt accru de l’Union européenne ?

M. Gérard César. – Les ressources pétrolières et gazières de l’Arctique représentent 10 % des ressources mondiales et 30 % des réserves de gaz. C’est énorme. Nous avons eu l’occasion, sous la présidence de Jean-Paul Emorine, de nous rendre à Mourmansk pour aborder ces questions. Le groupe Total était intéressé à créer un joint venture avec Gazprom. Où en est-on de ce projet, rendu complexe par le problème des températures, qui peuvent atteindre moins 40 ?

M. André Gattolin. – Lorsque je me suis rendu au Canada, j’ai rencontré le nouveau ministre du développement durable, de l’environnement et de la lutte contre les changements climatiques du Québec, qui me disait qu’à l’époque du gouvernement libéral de Jean Charest, on avait tenté de lancer un plan similaire à celui qui existait au plan fédéral. Mais il n’est pas simple de travailler en Arctique. Areva, qui a depuis vingt ans un contrat avec une grande société d’exploitation de l’uranium, en fait l’expérience. Il est très difficile, en effet, de tracer des routes et de les stabiliser. On voit dans le changement climatique une opportunité d’exploitation de ces zones, mais c’est oublier que la fonte du permafrost provoque dans les infrastructures, y compris les canalisations, des mouvements et des effondrements. L’industrie sibérienne arctique russe rencontre le même problème. À quoi s’ajoute le fait qu’en fondant, le permafrost dégage beaucoup de méthane, gaz qui contribue vingt-trois fois plus que le CO2 à l’effet de serre. Pour autant, le gouvernement de Pauline Marois, du parti québécois, avait défini un plan redimensionné, intitulé « Le Nord pour tous ». Le nouveau gouvernement libéral de M. Couillard, qui entendait relancer ce plan Nord, se heurte cependant à de gros problèmes budgétaires : il faudrait des milliers de kilomètres de routes pour désenclaver le pays.

Le même problème se pose au Groenland, où toute infrastructure fait défaut. Les économistes estiment qu’il faudrait, en dehors de la zone de Barents et de la Norvège, où les conditions climatiques sont meilleures grâce au Gulf Stream, un baril à 120 ou 130 dollars au moins pour que l’exploitation du pétrole en Arctique soit rentable. Il faut savoir que l’industrie minière se partage en deux types d’entreprises : les seniors, soit de grandes entreprises disposant d’importantes capacités d’exploitation, et les juniors, des sociétés plus jeunes et plus spéculatives, généralement valorisées à la bourse de Toronto, où des conditions assez favorables leur sont offertes, et qui font de l’exploration. Mais le problème réside dans le passage de l’exploration à l’exploitation. Tout cela explique les énormes mouvements sur les cours du gaz et du pétrole, d’une tout autre nature que ceux qui peuvent être liés à la problématique du gaz non conventionnel.

L’engouement sans doute un peu exagéré que l’on constate au Groenland sur le potentiel existant tient au fait qu’il fallait trouver les voies d’une indépendance rapide. Pour se former, cependant, dans les disciplines scientifiques, sachant que l’université de Nuuk n’offre que des cursus en sciences humaines, les élites doivent partir étudier à Copenhague, dont elles ne reviennent pas toujours…

Le parallèle avec le Canada est intéressant. Il faut savoir que plus de la moitié de la balance commerciale du Canada relève du secteur primaire – le bois et les matières premières non transformées -, un peu à l’image de la Russie, qui assure son équilibre économique par la vente massive de matières premières. Il est un seul domaine où le Canada investit au Groenland : les mines d’extraction du rubis. C’est que leur exploitation n’exige que cinquante à soixante employés, que l’on peut aisément former parmi les Groenlandais, quand un projet d’exploitation du zinc ou du nickel, comme l’avaient formé les Chinois, exige 5 000 employés, qu’il faut faire venir d’ailleurs. Le rubis bénéficie, de surcroît, d’un cours très stable et ne nécessite pas d’infrastructures : un hélicoptère suffit.

À côté de tels projets, dont le pays a besoin, le secteur traditionnel de la pêche pourrait être un atout. N’est-ce pas en misant sur ce secteur que l’Islande s’est redressée ? Mais pour l’instant, peu de bateaux groenlandais pêchent dans ces eaux ; ce sont, pour l’essentiel, des bateaux des pays de l’Union européenne, qui payent une redevance. À noter que le contrat de partenariat noué entre l’Union européenne et le Groenland ne pouvant passer par les fonds de développement régionaux, les lignes d’aide au Groenland sont paradoxalement inscrites au budget de l’Union européenne. Il serait bon de rechercher, à l’avenir, un système d’accords sur mesure qui ne privent pas les Groenlandais du sentiment de leur indépendance.

L’accord avec le groupe Total ? Christophe de Margerie avait déclaré à plusieurs reprises qu’il se refusait à forer dans les zones off shore glacées. Si bien que les premiers gisements ont été exploités par Gazprom, mais que Total a racheté, in fine, une partie de sa production dans ces zones. Un article paru dans « Le Figaro économie » de ce matin, qui fait apparaître la corrélation entre l’effondrement du prix du brut et celui de l’économie russe, montre combien les économies fondées sur ce type d’exploitation sont dépendantes.

M. Jean Bizet, président. – Il est vrai que les effets de l’effondrement des prix du brut sur l’économie russe sont bien supérieurs à ceux des mesures de rétorsion décidées par l’Union européenne. Quand on voit que lors de sa dernière réunion, l’Opep a décidé de ne pas fermer les robinets, on se dit que le message est peut-être venu d’ailleurs…

À l’issue de ce débat, la commission a autorisé, à l’unanimité, la publication du rapport de M. André Gattolin, paru sous le numéro 152 (2014-2015).

Compte-rendu officiel du Sénat, disponible également sur le site du Sénat lui-même en suivant ce lien.

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André Gattolin invité de 24h Sénat pour évoquer son rapport sur le Groenland http://andregattolin.eelv.fr/andre-gattolin-invite-de-24h-senat-pour-evoquer-son-rapport-sur-le-groenland/ http://andregattolin.eelv.fr/andre-gattolin-invite-de-24h-senat-pour-evoquer-son-rapport-sur-le-groenland/#respond Thu, 04 Dec 2014 11:50:20 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3692 André Gattolin était l'invité de 24h Sénat ce mercredi 3 décembre pour évoquer la situation du Groenland et le rapport qu'il y a consacré dans le cadre d'une mission décidée par la commission des Affaires européennes du Sénat. La séquence débute à 6'44. Au programme : la question de l'indépendance et donc de l'autonomie financière, les risques climatiques et environnementaux, les possibilités de diversification économique. ...]]>

André Gattolin était l’invité de 24h Sénat ce mercredi 3 décembre pour évoquer la situation du Groenland et le rapport qu’il y a consacré dans le cadre d’une mission décidée par la commission des Affaires européennes du Sénat. La séquence débute à 6’44. Au programme : la question de l’indépendance et donc de l’autonomie financière, les risques climatiques et environnementaux, les possibilités de diversification économique.

Le rapport lui-même sera prochainement disponible en version PDF, sur le site du Sénat, ainsi qu’en version papier.

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Climat/ énergie : quand le choix réside entre complexité et fatalité, c’est la première qu’il faut privilégier http://andregattolin.eelv.fr/climat-energie-quand-le-choix-reside-entre-complexite-et-fatalite-cest-la-premiere-quil-faut-privilegier/ http://andregattolin.eelv.fr/climat-energie-quand-le-choix-reside-entre-complexite-et-fatalite-cest-la-premiere-quil-faut-privilegier/#respond Wed, 15 Oct 2014 11:22:34 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3570 Intervention le 14 octobre dans le cadre du Débat préalable au Conseil européen des 23 et 24 octobre prochains, au nom du Groupe écologiste.  ...]]>

Intervention le 14 octobre dans le cadre du Débat préalable au Conseil européen des 23 et 24 octobre prochains, au nom du Groupe écologiste. 

Le Ministre vient à l’instant de nous détailler les différents éléments qui figurent à l’ordre du jour du prochain Conseil européen. Paquet climat-énergie, situation économique de l’Union européenne et vraisemblablement situation internationale seront les trois chapitres les plus conséquents qui occuperont les échanges.

Je note, par ailleurs, que nous tenons ce débat au moment où l’Assemblée nationale commence l’examen du Projet de loi de finances pour l’année 2015, et alors que les discussions se font vives, avec la Commission et nos partenaires européens, sur les questions budgétaires.

Je ne doute pas que mes collègues seront ici nombreux à revenir sur ce sujet. Pour ma part, c’est à la question climatique et énergétique que je consacrerai l’essentiel de mon intervention, en insistant sur ses fortes implications géo-stratégiques ; dimension que nous avons trop tardivement commencé à prendre en compte, alors même qu’elle surdétermine toute une partie de nos politiques.

Il est clair désormais que la question des choix énergétique ainsi que celle des effets engendrées par les dérèglements climatiques constituent non plus seulement un problème environnemental, mais représentent aujourd’hui des enjeux géostratégiques d’un type nouveau qui influent sur la stabilité politique de la planète, au même titre que les enjeux militaires classiques.

Depuis plusieurs mois, les États-Unis ont commencé à revoir leurs doctrines des risques internationaux en intégrant ces nouveaux éléments.

Hier encore, leur Département de la Défense a rendu public un rapport soulignant les dangers accrus du fait du réchauffement, depuis la montée des océans jusqu’aux probables pénuries en eau et nourriture en divers endroits de la planète.

La France s’est également engagée, depuis peu, dans cette réflexion, notamment grâce au travail de notre collègue Leïla Aïchi sur ces sujets.

Mais l’Union européenne – comme c’est trop souvent le cas dans les dossiers qui renvoient à la souveraineté de ses membres et aux questions stratégiques les plus sensibles – peine à établir une philosophie qui permette de prendre tout ceci à bras le corps.

C’est particulièrement perceptible s’agissant de nos rapports avec la Russie.

À l’échelle globale de l’Union européenne, ce pays constitue un fournisseur énergétique de première importance !

En 2013, 39 % des importations européennes de gaz en étaient originaires. La Russie est même le seul fournisseur extérieur de gaz naturel pour six de nos Etats membres ; le gaz représentant par ailleurs une part importante de leur consommation énergétique globale.

En temps de paix, une telle dépendance n’est déjà pas sans risques.

Mais lorsqu’une tension internationale se fait jour comme c’est le cas depuis plusieurs mois autour de l’Ukraine, cette dépendance devient même franchement problématique.

Comment gérer à court terme nos relations avec la Russie dans ces conditions ? Pour les uns, il faudrait se montrer plutôt conciliant avec Moscou… Pour les autres, au contraire, il convient de demeurer le plus ferme possible.

Au-delà, comment diminuer à plus long terme notre dépendance énergétique, alors même que l’Union importe aujourd’hui 53% de l’énergie qu’elle consomme ? Là encore les avis divergent ! Pour les uns, la nécessité de prendre en compte les tensions énergétiques nouvelles rend légitime l’exploitation de toutes les ressources hydrocarbures, y compris non conventionnelles, que l’on pourrait trouver sur le continent. Pour les autres, ces évolutions sont la preuve de ce que la transition énergétique est plus que jamais d’actualité.

Quelle que soit l’opinion que l’on peut avoir sur ces question, il est au moins une chose sur laquelle, je crois, nous pouvons nous mettre d’accord.

La souveraineté de l’Europe et donc sa capacité à peser sur la scène internationale passe aussi par la mise en place d’une véritable politique énergétique.

Nos politiques climatique, énergétique et stratégique doivent donc être pensées conjointement.

Tant que nous n’accepterons pas de le faire concrètement, tant que nous continuerons à imaginer ces politiques comme si elles n’entretenaient pas de rapports les unes avec les autres – ou pire comme si elles devaient s’opposer les unes aux autres – chacune d’entre elles échouera dans la poursuite de ses objectifs.

Mettre tous ces éléments en cohérence n’est évidemment pas chose facile : c’est au contraire, éminemment complexe. Mais je crois que, quand le choix réside entre la complexité et la fatalité, c’est bien la première qu’il vaut mieux privilégier.

Vous le savez sans doute : le mois de septembre qui vient de s’écouler a été le plus chaud depuis 1880 dans le monde ; date à laquelle ces relevés ont débuté. Il s’inscrit dans une tendance lourde et qui va en accélérant. Quel que soit l’indicateur considéré, tout laisse à penser que les politiques déjà mises en place ont échoué à ralentir cette dangereuse évolution.

J’étais il y a quelques semaines en mission au Groenland pour la commission des Affaires européennes du Sénat. Je me suis rendu à cette occasion au Jakobshaven, le plus grand glacier de l’hémisphère nord et l’un de ceux qui fondent le plus vite : il a autant reculé ces 10 dernières que durant la totalité du siècle précédent !

Nous faisons face à une transformation accélérée qui, par rapport au réchauffement climatique lui-même, tient lieu à la fois de conséquence et de facteur aggravant : car plus les grands ensembles glaciaires de la planète fondent, plus les équilibres qui régulent encore notre climat se dérèglent et plus le réchauffement s’accélère.

Il s’agit là d’une spirale infernale qu’il sera de plus en plus difficile de briser, si nous n’y prenons garde ; d’autant que les ambitions des uns et des autres pour tirer le meilleur parti de ces transformations, notamment via l’exploitation accrue des ressources naturelles, se font de plus en plus vives et risquent bien d’aggraver encore cette tendance…

Alors si nous voulons enfin remettre en cause ces évolutions terribles, l’Europe doit se montrer plus ambitieuse et cohérente que jamais sur ces questions.

Cela nous amène naturellement aux discussions portant sur le futur paquet climat/énergie lui-même… Or, les propositions qui se trouvent sur la table s’agissant de ce dernier sont hélas bien inégales.

Celles de la Commission européenne sont clairement insuffisantes. Celles du Parlement européen sont déjà bien plus ambitieuses.

La question est donc de savoir dans quelle mesure nos gouvernements, et singulièrement le gouvernement français, sauront se montrer à la hauteur de leurs ambitions.

En l’occurrence, le Parlement européen propose l’instauration d’un objectif de 30% d’énergies renouvelables dans la production totale européenne pour 2030, de 40% de réduction de la consommation énergétique, et de 40% de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les écologistes proposent quant à eux un objectif de 45% d’énergies renouvelables, de 40% de réduction de la consommation énergétique et de 60% de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Mais au-delà de ces chiffres, il est absolument primordial que ces objectifs soient contraignants, pays par pays, sans quoi nous pouvons d’ores et déjà affirmer qu’ils ne

seront pas tenus.

Le gouvernement français semble aujourd’hui assez hésitant…

Monsieur le Ministre pourrait-il nous apporter quelques précisions sur ce dernier point ?

Enfin et au-delà des seules politiques européennes, ce Conseil européen constitue une étape essentielle dans la préparation de la COP 21 que notre pays accueillera à la fin de l’année prochaine.

Et pour que ce rendez-vous soit réussi, nous devons faire preuve d’une double exemplarité.

L’Europe doit être exemplaire face au monde, sinon son influence restera limitée.

Et la France doit être exemplaire face à ses partenaires européens, pour ne pas risquer de perdre sa crédibilité dans ce dossier.

Je vous remercie.

 

POUR ALLER PLUS LOIN 

 

CF. aussi « Chasing Ice », documentaire qui a pu saisir en 2008 un effondrement aussi brutal que gigantesque du Jakobshavn vers son propre fjord (plus d’info en suivant ces liens vidéo et vers le site du film).

 

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Les plus grands glaciers du monde fondent à un rythme record http://andregattolin.eelv.fr/les-plus-grands-glaciers-du-monde-fondent-a-un-rythme-record/ http://andregattolin.eelv.fr/les-plus-grands-glaciers-du-monde-fondent-a-un-rythme-record/#respond Thu, 28 Aug 2014 09:04:12 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3550 Le Groenland et l'Antarctique accueillent les deux plus grands glaciers au monde ; un nouveau rapport publié il y a quelques jours indique que ces derniers contribuent à la hausse du niveau des mers deux fois plus aujourd'hui qu'il y a cinq ans seulement. Ils perdent à eux deux environ 500 kilomètres carrés de glace chaque année, soit un rythme jamais observé depuis que ce type de relevés par satellite a été mis en place. ...]]>

Le Groenland et l’Antarctique accueillent les deux plus grands glaciers au monde ; un nouveau rapport publié il y a quelques jours indique que ces derniers contribuent à la hausse du niveau des mers deux fois plus aujourd’hui qu’il y a cinq ans seulement. Ils perdent à eux deux environ 500 kilomètres carrés de glace chaque année, soit un rythme jamais observé depuis que ce type de relevés par satellite a été mis en place.

La nouvelle a été rendue publique par l’institut de recherche allemand qui a mené l’étude (CF. ce lien, en anglais) et a notamment été relayée  par le site Environnement du Huffington Post américain (CF. ce lien, en anglais toujours).

À noter que l’image utilisée pour illustrer cette « brève »* a elle été obtenue en 2012 par Terra, un satellite de recherche de la Nasa (l’étude allemande utilise quant à elle des images beaucoup plus récentes encore et obtenues par CryoSat 2, satellite de l’Agence spatiale européenne). À l’époque il s’agissait déjà d’une année record pour la rétractation de la glace et de la banquise en Arctique. La situation s’est encore aggravée depuis.

C’est dans ce contexte qu’André Gattolin se rendra au Groenland en septembre 2014, dans la continuité du travail qu’il a consacré récemment aux stratégies européennes pour l’Arctique, et en vue d’un nouveau rapport d’information.

 

*Est du Groenland, le 17 août 2012. Image fournie par la NASA et obtenue par le satellite Terra et son système d’observations scientifiques MODIS. Licence Creative Commons, certains droits réservés (via Flickr).

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Europe : résister au découplage du climat et de l’énergie ! 🗓 http://andregattolin.eelv.fr/europe-resister-au-decouplage-du-climat-et-de-lenergie/ http://andregattolin.eelv.fr/europe-resister-au-decouplage-du-climat-et-de-lenergie/#respond Wed, 21 May 2014 14:55:25 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3452 André Gattolin est intervenu ce jour dans le cadre du débat demandé par le Groupe écologiste du Sénat sur les problématiques du climat et de l'énergie en Europe. Voici son intervention (seul le prononcé faisant foi). ...]]>

André Gattolin est intervenu ce jour dans le cadre du débat demandé par le Groupe écologiste du Sénat sur les problématiques du climat et de l’énergie en Europe. Voici son intervention (seul le prononcé faisant foi).

Monsieur le Président,

Madame la Ministre,

Mes chers collègues,

Ronan Dantec et plusieurs de nos collègues l’ont déjà rappelé : les bouleversements climatiques et les enjeux énergétiques figurent parmi les défis majeurs et les plus urgents auxquels nous devons faire face.

Ces défis, la France ne peut évidemment pas les relever seule. Ils concernent la planète toute entière, et l’Europe a longtemps fait figure de pionnière pour tenter de les relever.

Il faut dire qu’elle avait toutes les raisons pour cela !

D’abord, parce que ces problématiques l’affectent au tout premier chef : entre sa forte dépendance énergétique et la nécessité de préserver un climat exceptionnellement tempéré.

Ensuite parce que l’Union européenne dispose d’une masse qu’on pourrait croire suffisante pour pouvoir influer utilement sur ses partenaires.

Enfin, parce que c’est précisément sur ce type de dossiers à la fois techniques et politiques que la construction européenne s’est concrètement développée à la fin des années 1950.

On pouvait donc penser que l’Europe saisirait à bras le corps la multiplicité des enjeux croisés qui s’offraient à elle dans le domaine de l’énergie et du climat.

L’échec du Sommet de Copenhague en 2009 a pourtant très vite remis en cause les efforts que l’Europe avait commencé à déployer.

C’est tout une dynamique qui s’est alors interrompue et avec laquelle nous n’avons toujours pas réussi à renouer.

Certes, des avancées non négligeables ont vu le jour, mais le seuil critique n’a pas été atteint et une partie des acteurs qui s’étaient mobilisés pour une réelle prise en charge de ces questions au niveau international et européen se sont découragés, tandis que les attentistes, les sceptiques en ressortaient renforcés.

La crise économique et financière a eu un double effet dramatique sur les orientations stratégiques de nos états :

– On a d’abord souhaité renouer au plus vite avec la croissance et avec l’emploi en usant des recettes les plus classiques, sans trop se soucier d’en inventer d’autres plus cohérentes avec les enjeux tant climatiques qu’énergétiques.

– Ensuite, la recherche de la compétitivité à tout prix pour relancer nos économies occidentales essoufflées a conduit à des choix énergétiques de court terme, en surexploitant nos ressources naturelles finies et en important notre énergie à tout va, sans réel souci de rationalisation ou de sobriété.

La facture énergétique de l’Europe a ainsi été multipliée par 6 en 12 ans. Elle a atteint pas moins de 488 milliards en 2011 !

Pour faire simple, au nom d’une croissance productive classique et court-termiste dont nous attendons en vain le retour, nous sommes en train de dilapider notre capital-planète.

Les bouleversements climatiques sont pourtant plus que jamais à l’oeuvre : fonte accélérée des glaciers de l’Antarctique et du Groenland, réduction accélérée de la banquise arctique, multiplication de phénomènes météorologiques dramatiques – dramatiques parce que coûteux en vies humaines et en conséquences économiques et sociales.

Et comme une réaction en chaîne mal maitrisée, ces effets immédiats sur le climat conduisent non pas à une réorientation salutaire de nos choix stratégiques : mais amènent au contraire à des décisions folles fondés sur des raisonnements fantasmatiques !

Rapporteur pour la Commission des affaires européennes sur les stratégies européennes sur les questions de l’Arctique, je note à travers les nombreuses auditions auxquelles je procède actuellement que la dégradation accélérée du climat arctique, loin de provoquer des réactions salutaires, génère un discours délirant et incroyablement irresponsable du type : « La banquise fond ? Formidable ! Nous allons pouvoir exploiter les ressources minérales, pétrolières et gazières contenues sous les eaux de cette océan vital ; nous allons pouvoir tracer de nouvelles routes maritimes entre l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord ! »

Comme la guerre est parfois une scandaleuse source d’opportunités pour certains industriels, la dégradation accélérée du climat en Arctique apparaît pour certains comme une superbe opportunité de business.

C’est au passage, très mal connaître les réalités de l’Arctique, la fragilité de son écosystème, les conditions extrêmement risquées, les coûts particulièrement élevés de l’exploitation de ses ressources et les dangers de la navigation dans cette zone.

Même dans l’hypothèse d’un accroissement du réchauffement climatique dans ce vaste espace qui, au passage, est déjà deux fois et demi plus élevé que sur le reste de la planète !

Mais un des principaux mécanismes de l’économie mondialisée est sans doute de fonctionner sur des logiques archi-spéculatives où, au final, on privatise les bénéfices et où on collectivise les pertes.

Comme les paradoxes succèdent aux paradoxes, l’inquiétante crise russo-ukrainienne a eu au moins l’avantage de remettre la question énergétique sur le devant de la scène.

Depuis quelques mois certains, dont le Président de la République lui-même, appelaient de leurs voeux la formulation de politiques énergétiques européennes, allant jusqu’à parler d’un Airbus de l’énergie. Des propositions aujourd’hui relancées par la situation de l’Ukraine et le chantage au gaz russe.

Mais un point reste hautement problématique. Ces discours sur la souveraineté énergétique de l’Europe apparaissent en effet de plus en plus déconnectés de la question du climat. On assiste à un véritable découplage entre ces deux thématiques qui sont pourtant intrinsèquement liées !

L’énergie la moins chère, c’est celle que l’on économise.

L’énergie la moins dangereuse pour le climat, c’est la moins carbonée. C’était tout le sens du fameux paquet énergie climat mis en place en 2008, qui en dépit de ses limites établissait clairement le lien entre ces différents aspects avec ses objectifs quantifiés : 20% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique, 20% de réduction des émissions de CO2, 20% de gains d’efficacité énergétique.

La situation globale s’est depuis encore dégradée. Pourtant, le nouveau paquet énergie climat proposé par la Commission européenne constitue un recul sans précédent, dans la droite ligne de ce qu’espéraient le Royaume-Uni et la Pologne.

Les objectifs d’efficacité énergétique ont disparu, les objectifs en matière d’énergies renouvelables ne sont plus contraignants et donc ne seront pas respectés, et la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre reste faible.

Pourtant, dans ses dernières propositions, le Parlement européen réclamait lui des objectifs contraignants simultanément dans ces trois domaines.

Madame la Ministre, il n’aura échappé à personne que votre ministère regroupe aujourd’hui avec bonheur l’écologie et l’énergie. Nous vous savons, comme nous, très attachée à l’intégration de ces deux problématiques.

Force est malheureusement de constater que nous assistons aujourd’hui à leur découplage presque total au niveau européen. Avec, au mieux, le risque d’échouer dans l’un ou l’autre de ces deux domaines ; et au pire, très certainement, d’échouer dans les deux.

Madame la Ministre, le Groupe écologiste aimerait donc savoir quelles initiatives le gouvernement entend prendre tant au niveau de l’Union et auprès de la Commission européenne qui s’installera cet été, que dans le cadre du sommet Paris 2015, pour relier à nouveau comme il se doit ces deux politiques fondamentales pour notre avenir.

Je vous remercie.

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L’Arctique change de couleurs http://andregattolin.eelv.fr/larctique-change-de-couleurs/ http://andregattolin.eelv.fr/larctique-change-de-couleurs/#respond Wed, 15 Jan 2014 09:29:12 +0000 http://andregattolin.eelv.fr/?p=3348 André Gattolin recevait au Sénat, lundi 13 janvier, le médecin et explorateur Jean-Louis Etienne. Cette rencontre avait lieu dans le cadre des travaux d’André Gattolin sur le devenir de l’Arctique et sur le rôle de l’Union européenne dans cette région.

À l’issue de cette rencontre, dont le compte-rendu complet reste à faire, Jean-Louis Etienne a accepté de se prêter à une courte séance de questions/ réponses. En voici la transcription, tandis que la vidéo réalisée à cette occasion et bien d’autres éléments se trouvent sur le site dédié arctiquesenateur.tumblr.com

Jean-Louis Etienne, pourquoi aujourd’hui – et on s’en rend compte à travers les études – l’Arctique est plus touché par le réchauffement climatique global de la planète ?

Alors l’Arctique… Là on parle du Nord, du pôle Nord, avec cet océan arctique qui est particulièrement touché, parce que l’Arctique change de couleurs. C’est une zone qui était blanche quasiment tout le temps, avec la glace qui recouvre l’océan, la neige qui recouvre les territoires tout autour, la Russie, le Canada, le Groenland… et le blanc, comme on le sait, réfléchit le rayonnement solaire. Aujourd’hui avec le réchauffement, il y a des zones d’eau libre qui apparaissent sur l’océan, des zones qui sont déneigées très vite, la neige apparaît plus tard, et donc tout ça ça fait ce qu’on appelle des corps noirs, qui absorbent le rayonnement solaire.

Et donc on assiste à un effet d’emballement. Le fait de devenir capteur fait qu’il y a une accélération du réchauffement climatique. C’est une des raisons pour lesquelles on trouve un réchauffement moyen de 5° en Arctique, alors qu’on considère qu’il est autour de 2° sur l’ensemble de la planète.

Et vous me disiez, c’est un peu le réfrigérateur avec l’Antarctique de la planète et des zones chaudes. Dès qu’on laisse la porte ouverte, ça ne fonctionne plus.

Oui, oui ! On a peur pour l’Arctique c’est vrai, l’écosystème va changer puisque la banquise disparaît, mais on va être touchés, on va être impactés. Parce que le climat, la machine climatique pour faire simple, c’est l’échange entre la chaleur tropicale, qui est constante – il fait chaud sous les tropiques été comme hiver – avec le froid des deux pôles. La terre doit échanger cette chaleur tropicale avec le froid des deux pôles. Et le nord aujourd’hui perd de sa capacité à refroidir. La terre elle a deux fluides pour échanger la chaleur avec le froid : la circulation atmosphérique, qui est rapide, et la circulation océanique. Le Gulf Stream est un exemple, qui amène de la chaleur de la Caraïbe vers le Nord. Et donc en ayant perdu petit à petit l’efficacité du froid, on a ouvert la porte du frigo, on a des frigories en moins, c’est-à-dire que ça va manquer à l’équilibre de la chaleur tropicale. D’où les constations, ce que l’on remarque : on ne peut pas dire aujourd’hui qu’il y ait davantage de manifestations extrêmes, mais on sait aujourd’hui que ce qu’on appelait les tempêtes tropicales – c’est classique, tout le monde connaît : sous les tropiques à un moment donné, vous avez un orage, y a du vent – aujourd’hui c’est passé au stade au-dessus, qui est celui du cyclone, parce qu’on a des accumulations de chaleur de plus en plus importante.

Jean-Louis Etienne, merci !

Avec plaisir

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