Pour des occupations temporaires des bâtiments vacants…

occupations temporaires

.. inclusives, solidaires et écologiques par les habitant.e.s plutôt que des cadeaux aux multinationales !

Le sacré coeur et bâtiments vacants

C’est un véritable scandale, un gâchis urbain une aberration économique : des personnes meurent dans la rue alors que des bâtiments restent désespérément vides. Des dizaines de projets de solidarité, de créations artistiques, de défense de l’environnement ne trouvent pas de lieu pour se développer pendant que des milliers de mètres carrés de bureaux et d’activités restent vacants. Les motivations d’un propriétaire de maintenir inoccupé un bâtiment ou un terrain à Paris peuvent être de nature très différentes : vacance spéculative pour attendre de vendre à un prix encore plus élevé, vacance de gestion entre deux locations ou vacance du fait de l’attente de réalisation d’un nouveau projet d’urbanisme. Cette dernière catégorie est nommée la vacance intercalaire.

La durée de vacance « intercalaire » moyenne, entre l’achat d’un bâtiment ou d’un terrain pour réaliser un projet, les études et le début des travaux est en moyenne de 3 à 5 ans. Ces terrains et bâtiments vides, en plus d’être nombreux et inutilisés, sont coûteux pour leurs propriétaires, en terme notamment de frais de gardiennage estimés à 80 000 euros par an par lieu inoccupé. 

Grâce au mouvement de réquisition des bâtiments vacants mené par les habitant.e.s (ouverture de squat), la puissance publique a commencé à reconnaître légitimes ces occupations illégales. De nombreux squats ont ainsi été achetés ou conventionnés à la fin des années 2000 par la Ville de Paris générant d’importantes économies de gardiennage : le 59 Rivoli, la Gare XP, Valencienne, les jardins d’Alice, la Générale, etc…. Cette longue histoire de luttes a rendu possible la mise à disposition de l’hôpital Saint Vincent de Paul (Paris 14e) en attente de travaux, permettant l’accueil du projet « Grands voisins » et du centre d’hébergement géré par l’association « Aurore », dans le cadre d’une nouvelle politique publique de l’occupation intercalaire de la Ville de Paris. 

Cependant depuis plusieurs années, ces occupations éphémères répondant aux besoins d’urgence sociale, de création de liens entre les parisien.ne.s et de développement de l’économie sociale et solidaire, font l’objet d’une concurrence sévère d’opérateurs privés. Des occupations temporaires à vocation commerciale, ont commencé à voir le jour sur de nombreuses friches : à Ménilmontant, le squat de la miroiterie a été expulsé pour y créer un lieu commercial festif : quelques bambous, de la soupe au potimarrons et une très lucrative pompe à bières. C’est également le cas avec Ground Control dans le 12e, à Grand Train dans le 18e ou plus largement les activités de l’entreprise « Camelot » proposant un service lucratif de gardiennage par des personnes en recherche de logement… Plus récemment, le “Marché Pop” de Pernod Ricard, accueilli sur une friche de la RATP dans le 12e arrondissement (après l’expulsion d’un collectif d’artistes et la destruction à la pelleteuse d’un jardin partagé), avec la bénédiction de la Maire de Paris, représente l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire : confier la friche vacante d’un opérateur public à une multinationale de la vente d’alcool … trouvant ainsi de nouveaux débouchés commerciaux pour ses produits et services. Bières, pastis, whisky coulent à flot pour le plus grand bonheur de l’exploitant, mais l’intérêt général et la vie de quartier sont en berne, comme étouffés par la fumée, l’odeur et la graisse qui émanent du barbecue géant …

Nous pensons que ces derniers mètres carrés disponibles dans une capitale dense et chère comme Paris doivent être réservés aux besoins des parisien.ne.s que la spéculation exclut progressivement de notre ville : logements relais aux loyers abordables, projets associatifs et coopératifs à but non lucratif. La période intercalaire doit permettre de créer un dialogue autour de l’utilisation collective du lieu, de concerter les acteurs de la solidarité et de préfigurer le futur projet en y intégrant, de façon pérenne, une partie des usages et pratiques apparus de façon spontanée. 

Notre projet pour Paris n’est pas de transformer notre ville en vaste centre commercial. Mais plutôt d’y réserver des espaces pour développer des espaces de démocratie, des lieux d’activités mixtes mettant en valeur une économie inclusive et respectueuse de l’être humain : réponse à l’urgence sociale, économie sociale et solidaire, développement social des quartiers, circuits courts, pratique du « prix libre », projet associatif et coopératif à but non lucratif. Ces espaces doivent permettre l’accueil de tous les projets des Parisien.ne.s qui fourmillent d’idées génératrices de lien social, ce lien tant mis à mal par notre système accentuant l’individualisme et la rentabilité à outrance. De tels espaces doivent permettre de préfigurer la ville inclusive, solidaire et écologiste de demain. Pour nous, la priorité d’une politique publique municipale n’est pas de satisfaire quelques gros intérêts économiques, mais de répondre aux besoins des parisien.ne.s : garantir les droits fondamentaux de ses habitant.e.s, préserver leur bien-être et améliorer leur qualité de vie. C’est le projet d’un Paris de l’écologie !

publié sur Médiapart

Par David BELLIARD, candidat écologiste à la Mairie de Paris ; René DUTREY, ancien responsable mission squat dans une ONG ; Marc GANILSY, avocat ; Emmanuelle PIERRE MARIE, candidate écologiste à la Mairie du 12ème arrondissement.