Discours de politique générale de Clara Osadtchy, plenière du 26 septembre 2013

Les énergies marines renouvelables font encore l’actualité cette semaine et feront l’actualité de la semaine prochaine avec la visite du Président de la République à Cherbourg, lundi prochain.

Cette visite se fait dans le contexte du lancement par l’Etat de l’appel à manifestation d’intérêt pour l’installation d’hydroliennes au large de nos côtes, annoncé lors de la conférence environnementale.

C’est une excellente nouvelle.

Il y a dix ans encore, les éoliennes et les sources d’énergies renouvelables étaient encore jugées peu crédibles. Je pense qu’on peut le dire : le nucléaire, symbole d’emploi et de modernité technologique, bloquait l’imaginaire, cassait la possibilité même d’imaginer un scénario alternatif tant il était omnipotent.

Aujourd’hui, le développement de l’énergie renouvelable crédibilise encore un peu plus la possibilité de sortir du nucléaire et peut devenir une des réponses pour une sortie de la crise.

Et prenons le plaisir de dire ces mots : le raz-Blanchard, 1er potentiel hydrolien en Europe, offre une capacité de production d’électricité supérieure à un EPR, égale à celle de près de deux centrales nucléaires.

Les énergies renouvelables représentent pour notre région un potentiel de développement économique et d’emplois plus fort que les promesses – non tenues – du nucléaire.

Alors que nous allons délibérer sur le SRCAE aujourd’hui, je m’arrête sur un point sémantique. Je tiens à rappeler que les EMR ne sont pas toutes les énergies renouvelables. Car les énergies renouvelables comptent bien d’autres énergies que celles de la mer en Basse-Normandie. Cette région ne l’oublie pas et continue d’aider les autres filières de production d’énergie comme le bois ou la biomasse. Ce sera notamment l’un des enjeux principaux de la programmation des fonds européens.

Autre petite parenthèse : les énergies renouvelables ne sont pas toute la transition énergétique. Les économies d’énergie, la sobriété et l’efficacité énergétique sont les autres piliers de cette transition qui vise, rappelons le à sortir de la double dépendance au nucléaire et au pétrole, tout en permettant un développement économique durable et des emplois non délocalisables.

Lundi prochain, le Président de la République viendra donc tenir sa promesse et nous en sommes satisfaits.

Satisfaits car nous préférons un président de la République qui vient à Cherbourg lancer un appel d’offre sur les hydroliennes plutôt qu’un président qui viendrait inaugurer le chantier de l’EPR et affirmer comme une sentence que le nucléaire est une énergie d’avenir irremplaçable.

Nous sommes heureux que le quai des Flamands accueille des pales d’éoliennes plutôt que du charbon.

Je suis heureuse de constater que la DCN se tourne dorénavant davantage vers la construction d’hydroliennes que vers celle de sous marins nucléaires.

J’insiste sur ce point, car nous sommes peut-être à l’aube d’une révolution énergétique qui pourrait entraîner une révolution industrielle et économique. L’énergie renouvelable peut être une chance de développer un modèle économique alternatif : plus décentralisé, plus participatif, plus ancré dans les territoires.

Un service public de l’énergie décentralisé, participatif, durable et ancré sur les territoires, c’est possible et cela existe déjà d’ailleurs : des coopératives solaires, à énergie partagée, des coopératives de fourniture d’énergie.

C’est d’ailleurs peut être aussi notre rôle de conseil régional que d’inventer le modèle économique qui va avec, en veillant à ce que l’on ne répète pas ici les erreurs du pétrole ou du nucléaire : des grands groupes qui monopolisent richesses et investissements et qui rendent dépendante une filière entière, qui fragilisent au final des régions et des territoires, des salariés et des sous traitants.

Je pense que nous devons y penser parce que nous sommes des élus de gauche et que la gauche a toujours su dans ses fondements re-interroger le modèle économique, voire en inventer de nouveaux.

Cette annonce a donc été faite vendredi dernier, où se tenait la seconde conférence environnementale au Conseil économique social et environnemental. Un an après le premier rendez-vous, il s’agissait de faire le point sur la feuille de route ambitieuse tracée l’an passé.

Cette année la transition énergétique était au coeur du discours du Président de la République et de ses annonces. En plus des hydroliennes dont je parlais, je retiens sur ce thème le fonds national de garantie, la baisse de la TVA à 5% sur la rénovation thermique des logements – qui a dit que l’écologie c’était de la fiscalité supplémentaire ?- et surtout l’objectif de réduction de la consommation d’énergie de 50% d’ici 2050.

Bien sûr, ces discours sont entendus depuis longtemps, mais rarement dans la bouche d’un Président de la république. Dans cette conférence environnementale, il y a des avancées, des manques et des chantiers, mais il n’y a pas de désespoir à afficher : la méthode même oblige au travail permanent.

A l’instant je parlais fiscalité, un enjeu fondamental et très complexe. L’un des défis actuels de la France est notamment de récupérer les millions d’euros qui s’échappent chaque année dans les paradis fiscaux. Ces pratiques, vous le savez, privent chaque année les caisses des pays de millions d’euros de recettes fiscales. Même la Commission européenne vient de pointer officiellement du doigt le lien entre paradis fiscaux, entreprises et pauvreté. Car en effet, les paradis fiscaux ont un coût en terme de politiques de solidarité et annihilent toute justice fiscale, or sans justice fiscale, difficile d’obtenir une justice sociale.

A la fin de l’été, comme tous les ans, la France a actualisé par arrêté sa liste des territoires non coopératifs au regard de la transparence et de l’échange d’informations en matière fiscale.

Sans gloire, L’État de Jersey, ile anglo-normande, a fait son apparition dans cette liste noire.

Ce n’est pas vraiment une surprise.

L’île de Jersey compte aujourd’hui 90 000 habitants, mais 30 000 sociétés, 240 milliards d’euros de dépôt et le pays est le premier exportateur de fruits exotiques du monde ! Jersey est le premier exportateur de banane ! Cela fait sourire, mais en effet la raison en est qu’à Jersey, les intérêts et plus-values ne sont pas taxés, que le secret bancaire ne peut être levé que par la justice pour des cas exceptionnels et que les réglementations bancaires sont plus que souples.
L’ile est ainsi devenue une destination prisée pour les évadés fiscaux, entreprises ou particuliers.

Le fait que Jersey intègre cette liste noire des paradis fiscaux ne peut pas, NE DOIT PAS passer inaperçu dans notre région.

Au-delà des liens historiques, géographiques et culturels, la Basse-Normandie développe des relations touristiques, économiques et politiques avec Jersey.

Celles-ci se renforcent même.

C’est pourquoi le groupe écologiste plaide au sein du Conseil régional de Basse Normandie pour l’analyse des relations de coopérations avec Jersey et pour la plus grande prudence dans leur développement.

Devant la situation de cette île voisine, il est nécessaire que la Région comme le gouvernement agissent auprès du gouvernement de Jersey, afin qu’il prenne toutes les mesures nécessaires pour sortir de cette liste noire au plus vite et que l’île amorce un travail durable de transparence et de coopération fiscale avec les autres pays.

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