Intervention relative au Schéma Régional d’accompagnement des mutations économiques par la formation 2012-2014

Par Alice Leiciaguéçahar – Intervention en séance plénière du 26 mars 2012.

L’établissement du schéma régional d’accompagnement des mutations économiques ne résulte pas d’une obligation légale mais d’une démarche volontaire de la Région car en effet la formation des salariés dans les entreprises relève de plein droit des accords conclus entre partenaires sociaux.

Néanmoins, la Région veut marquer ainsi sa volonté politique de renforcer les dispositifs de la formation des salariés dans une logique de complémentarité et d’additionnalité avec les dispositifs existants.

Ce schéma se veut être l’une des déclinaisons du plan régional de développement des formations professionnelles 2009-2014. Ce schéma a 5 axes prioritaires :

1)      Relever le défi de l’emploi
2)      Mettre la formation au service de la compétitivité des entreprises d’Aquitaine
3)      Sécuriser les parcours professionnels des Aquitains et notamment les actifs les plus vulnérables ayant une faible qualification
4)      Agir en cohérence avec les partenaires sociaux
5)      Mettre en œuvre les contrats de continuité professionnelle

Ces intentions nous semblent louables et plus particulièrement pour les salariés aux faibles niveaux de qualification ou dont l’entreprise est en difficulté. Néanmoins, le deuxième axe de ce schéma, qui consiste à mettre la formation au service de la compétitivité des entreprises d’Aquitaine, nous semble contradictoire avec un des axes stratégiques du plan régional de formation qui est celui de donner aux aquitains les moyens d’une orientation choisie.

Cette contradiction nous semble d’ailleurs confortée par l’affirmation, page 60 du dossier annexé à la délibération et qui indique clairement que le schéma contribue, je cite « à mettre des dispositifs réactifs et adaptables aux besoins de l’économie ».

La formation des salariés serait donc dépendante étroitement des besoins de l’économie. Elle devrait s’adapter ainsi aux lois du marché et de la compétitivité. Nous ne pouvons être qu’en désaccord profond avec cette orientation qui enferme la formation au service exclusif d’une finalité économique purement compétitive et qui oublie totalement la finalité de l’économie qui doit être au service des femmes et des hommes et non le contraire.

Prétendre dans cette logique purement économiste, qu’on permettrait ainsi aux aquitains d’avoir les moyens d’une orientation choisie relève d’un certain angélisme, voire de naïveté, mais plus grave encore d’un renoncement à changer le modèle économique actuel productiviste et libéral, auquel est adossé un système financier devenu totalement incontrôlable et qui sont responsables tous les deux, de la crise globale actuelle, qu’elle soit écologique, économique ou sociale.

Les véritables mutations économiques à engager ne sont pas celles que ce système à bout de souffle veut nous imposer. La compétitivité pour la compétitivité est un non sens si elle n’a pour objectif que la recherche de profits et l’aggravation de la crise globale actuelle.

Penser la finalité de la production de biens et de services dans un monde où les ressources sont finies doit nous amener à penser à vivre désormais en ayant conscience des limites pour satisfaire les besoins matériels et immatériels des femmes et des hommes.

Une transformation écologique de la société passera donc par des mutations profondes de l’emploi et des secteurs économiques qui impliqueraient une reconversion à une toute autre échelle de nos modes de production et de consommation et pour une toute autre finalité, c’est à dire véritablement au service des citoyens.

Nous parlons bien de « transformation écologique » et non de « croissance verte » à laquelle nous préférons les termes « d’économie verte » car l’économie verte résultera de cette transformation écologique tandis que la croissance verte n’est qu’une tentative désespérée de sauvegarder le système actuel avec une couche de peinture verte.

Des pans entiers de l’économie sont déjà ou seront tôt ou tard confrontés aux véritables mutations écologiques et sociales à engager. Faire la politique de l’autruche en répétant à l’envi qu’il faut retrouver de la croissance pour que tout aille mieux comme par miracle, est une grave erreur que nous paierons tous très cher, à commencer par les plus modestes et les plus fragiles d’entre nous.

Et puis, il y a aussi des secteurs économiques qui sont prospères comme l’industrie de l’armement mais qui sont vecteurs de mort et de régression sociale. Ainsi, les dépenses d’armement faramineuses de la Grèce ont contribué fortement à la dette grecque et le comble du scandale, c’est que la France et l’Allemagne sont ses principaux vendeurs d’armes.

Et n’oublions pas non plus que par le monde beaucoup de révoltes populaires sont réprimées dans le sang par des dictateurs qui, avant de devenir soudain des despotes aux yeux de nos dirigeants, ont été reçus avec faste dans nos palais présidentiels et ont été fournis généreusement en armements français. Nous devons au plus vite reconvertir cette industrie et assurer une formation à ses salariés vers l’accès aux nouveaux métiers de l’économie verte.

En conclusion, nous ne mésestimons pas les mesures concrètes en faveur des salariés qui nous sont proposées dans ce schéma, comme par exemple le soutien de la région à une meilleure possibilité des salariés à effectuer un congé individuel de formation, mais ce schéma manque de souffle et ne semble pas à la hauteur des défis qui nous attendent. Il reste dans le conjecturel alors qu’il faudrait toucher le structurel

Néanmoins, il serait injuste d’attribuer à ce schéma régional des mutations économiques les vices d’un système dont il essaie de corriger les impacts sur les salariés en leur assurant une meilleure formation. Mais nous souhaitons que la région aille beaucoup plus loin en se projetant dans un véritable schéma des mutations écologiques et sociales qui décline le passage à une transformation écologique de l’économie en Aquitaine.

Aussi, dans cette perspective, nous voterons le projet de schéma actuel avec toutes les réserves que nous venons d’émettre.

Je vous remercie

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