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Les Verts et la laïcité
Motion diverse 21 CNIR de 09/2006

Motion 21

Les Verts et la laïcité

1°/ Rappels fondamentaux.

La laïcité, comme principe philosophique, a été mise en oeuvre dès 1789, puis sacrifiée par Bonaparte au nom du réalisme politique (Concordat de 1801). Un siècle de luttes entre laïques et religieux a abouti à la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat de 1905, dont nous venons de fêter le centième anniversaire.

La laïcité, c’est l’affirmation simultanée de trois valeurs :

-  La liberté de conscience fondée sur l’autonomie de la personne et de sa sphère privée, avec comme corollaire la liberté d’expression de ses convictions.
-  La pleine égalité, en droits et devoirs, des citoyens, qu’ils soient athées, agnostiques ou croyants, donc la liberté pour chacun de choisir un culte, de pouvoir en changer ou de n’en suivre aucun.
-  L’universalité de la sphère publique, la loi ne devant promouvoir que l’intérêt commun à tous. En découle l’interdiction d’aliéner l’espace public en particulier l’Etat, à des convictions et à des intérêts particuliers.

Dans le langage courant, la laïcité est devenue synonyme de tolérance, de respect, de « vivre ensemble ». Ce raccourci est paradoxalement un des acquis de la loi de 1905. Pourtant, la laïcité est aussi synonyme de combat : ses principes s’opposent aux intégrismes religieux, au totalitarisme des théocraties et aussi au nihilisme dévastateur induit par le capitalisme dérégulé. Ils s’opposent également à la version anglo-saxonne du multiculturalisme qui, à l’extrême, a pour effet de nier le caractère universel de la Loi égale pour tous. Enfin, son exigence d’universalisme ne peut admettre la montée des communautarismes basés sur des critères ethniques ou cultuels. D’aucuns pensent, chez les Verts et ailleurs, que ces luttes n’ont plus de réalité dans le contexte actuel. C’est bien vite oublier que la vie est une dynamique constante de lutte et que rien n’est jamais acquis.

2°/ Pourquoi le débat sur la laïcité resurgit-il aujourd’hui ?

Les générations d’après guerre ne se posaient plus le problème de la laïcité. Le travail du C.N.R. (Conseil National de la Résistance) après la tourmente du conflit mondial, voulait remettre la Nation sur les rails de l’éthique. La laïcité ne posait aucune question. Mais, la société française de ce début de XXIe siècle a connu beaucoup de mutations. Elle ne ressemble plus à celle de 1950.

D’abord, nous vivons dans un univers de pluralité sociale et culturelle. Le cadre ancien des valeurs a volé en éclats. Au fur et à mesure que se sont imposées, depuis 1968, les notions de liberté individuelle, de respect de l’autre, de tolérance, ont progressé également l’individualisme et le consumérisme en lieu et place de la citoyenneté. Comment réaffirmer la notion universelle de laïcité, alors que l’intérêt individuel semble désormais primer sur toute chose ? Quelques manipulateurs, dialecticiens, profitent de ce bouleversement des valeurs pour prétendre déduire du nécessaire respect des croyants, c’est-à-dire de leur liberté de croire, le respect des croyances, soustraites dès lors à toute critique comme à toute satire. Songeons, à ce propos, à l’étonnant œcuménisme religieux pour essayer de légaliser l’interdiction du blasphème.

Ensuite, cette crise de laïcité est concomitante à la crise du pacte social, liée au ralentissement de la croissance économique et aux bouleversements de la mondialisation. Par exemple, dans les années d’après-guerre, les besoins de l’industrie ont créé une forte immigration issue des pays du Maghreb. Ces populations, le plus souvent d’origine paysanne, souvent illettrées, ont été très mal intégrées au tissu social. D’autant plus mal que la crise économique s’accentuait. Elles n’ont pas eu la possibilité de transmettre à leurs enfants, de manière positive, leur culture d’origine. La République ne les y a pas aidés, en particulier à l’école. L’« ascenseur social » est resté bloqué. Les Français issus de l’immigration sont aujourd’hui confrontés au racisme, au chômage, au mal être culturel et parfois au mal être identitaire. Autant d’échecs de la citoyenneté qui mettent à mal le « vivre ensemble » et la laïcité. La crise de notre pacte républicain est une réalité, nous courons le risque de cumuler l’échec de ce pacte et la montée des communautarismes.

Enfin, de nouveaux intégrismes apparaissent. Mondialisation oblige, on ne peut plus faire abstraction de l’influence, sur notre territoire, des fondamentalismes du Moyen-Orient qui en réaction à la politique colonialiste de l’Occident ont structuré, autour d’une lecture passéiste de leurs textes fondateurs, un mouvement de refus de la culture occidentale. Malheureusement, une partie de l’extrême-gauche, par antiaméricanisme primaire, ou à cause du malaise, de la honte, voire de la culpabilité liée au passé colonial de la France, fait alliance avec les islamistes au nom du faux principe : les ennemis de mes ennemis sont mes amis. Ceux-là ne rendent pas service à la laïcité.

3°/ Quelle est la spécificité des Verts dans ce débat ?

Depuis leur création, les Verts défendent la reconnaissance de la diversité. Nous croyons à la possibilité pour l’individu de « choisir sa vie » au sein de la République (slogan de notre candidat à la Présidentielle en 2002). La conquête de nouvelles libertés individuelles, depuis 1968 et avant, est une chance et non un danger.

C’est pourquoi, nous nous opposons au nationalisme républicain jacobin, qu’il soit de Droite ou de Gauche, qu’il soit défendu par Sarkozy ou Chevènement. Nous ne voulons pas d’une République uniformisante, centralisatrice, recroquevillée derrière ses frontières, gardienne d’un soi-disant ordre moral. Nous sommes régionalistes, européens, fédéralistes et mondialistes. La France, telle que nous la voyons, est plurielle, ouverte et métissée.

Parce que nous défendons depuis toujours cette pluralité, notre souhait est que la République ouvre les yeux sur la diversité des populations qui la composent et qu’elle prenne conscience de l’ampleur des discriminations dont certaines de ces populations sont victimes. Défendre les droits des minorités, quelles qu’elles soient, est un de nos combats fondamentaux. Dans ce combat, la lutte contre le racisme et l’antisémitisme tient une place à part. Nous ne pensons pas que toutes les discriminations s’expliquent par une analyse des rapports de domination économique. Le racisme est une réalité en France, qu’il faut regarder en face pour mieux le combattre. Il explique en partie les violences urbaines, telles que nous les avons connues fin 2005.

Les Verts ne sont prisonniers d’aucun dogme. Il n’y a pas d’écologie sans tolérance et écoute de l’autre. C’est pourquoi, nous serons toujours ouverts à la discussion, y compris avec ceux qui défendent le multiculturalisme, qui s’organisent en communautés ou qui s’opposent à la loi sur les signes religieux à l’école. Mais nous ne jouerons pas non plus les « idiots utiles ». Nous sommes conscients que la laïcité est autant mise à mal par de nouveaux intégrismes qu’elle est menacée par le délitement du lien social.

MOTION

La loi du 15 mars 2004 (dite « du voile ») a fait apparaître des divergences au sein de notre mouvement. L’heure est venue de clarifier notre position.

Nous redisons aujourd’hui que la laïcité est une des valeurs de l’écologie politique, qui doit être expliquée et défendue. Il faut la mettre à l’abri des tentatives manipulatrices de ceux qui sous couvert de « laïcité ouverte » veulent s’attaquer sans le dire à ses principes fondamentaux.

Si nous revenions au pouvoir, dans une coalition de Gauche, en 2007, nous ne demanderions pas d’abroger la loi de 2004 sur les signes religieux. Nous pensons que, par souci de cohérence, elle devra être étendue à l’enseignement privé sous contrat.

Les Verts rappellent avec fermeté leur attachement à la liberté d’expression. Elle est consubstantielle de la démocratie. Aucun contrôle, aucune censure ne peut être acceptée, en dehors des cas prévus par la Loi.

Sachant que les luttes pour la liberté et l’égalité des femmes ont toujours dû affronter les offensives des religions, les Verts soutiennent les associations féministes qui combattent pour la laïcité et tiennent pour indissociables les termes laïcité et mixité. Les lois de la République doivent protéger les droits de toutes les personnes de nationalité française ou résidant sur le territoire, notamment les enfants et les femmes, quelle que soit l’appartenance religieuse de leur famille, de leur père ou de leur mari. L’école républicaine doit sur ce point jouer son rôle émancipateur. La lutte pour l’autonomie personnelle, le combat contre le sexisme, sous toutes ses formes et contre l’intégrisme religieux, quelle que soit la religion, font partie du projet de l’écologie politique.

Les Verts se manifesteront toujours auprès des victimes d’actes racistes, antisémites, et des victimes du totalitarisme religieux. Ils dénonceront toujours tous ces actes, sans surenchères émotionnelles, mais sans céder aux pressions, sans alimenter le mauvais jeu de la concurrence entre victimes et sans amalgame par rapport au conflit du Moyen-Orient ou à la situation israélo-palestinienne.

La laïcité doit être adaptée à la réalité d’une France plurielle. La République doit reconnaître, par exemple, l’émergence de la religion musulmane comme le second culte pratiqué en France. La République doit aujourd’hui savoir discuter et trouver des accords avec les représentants de la religion musulmane, comme elle a su le faire au début du siècle avec les Catholiques. La revendication de lieux de culte décents par les musulmans n’est pas choquante. Les cultes catholiques, protestants, juifs, implantés bien avant la Loi de 1905 disposent d’un patrimoine cultuel, dont ne dispose pas l’Islam. Les mosquées, cimetière, écoles ou abattoirs ont droit de cité. Ni l’Etat ni les collectivités locales ne sont autorisés à subventionner la construction de lieux de culte et il ne faut pas modifier la Loi de 1905, car ce serait la porte ouverte à bien des désordres (sectes). Mais les dispositifs juridiques existent. Par exemple, la mise à disposition d’un terrain pour la construction d’un édifice religieux sous la forme d’un bail emphytéotique. De plus, la France regorge d’églises non consacrées, l’Islam ne peut-il étudier l’usage qu’il pourrait en faire ? (comme à Constantinople). Enfin, les fêtes chômées en France sont presque toutes d’origine catholique et, il faut bien le reconnaître, ne conviennent pas aux religions juives ou musulmanes, l’Education Nationale constate un fort absentéisme scolaire les jours de leurs grandes fêtes. Ne pourrait-on pas discuter et trouver un accord sur ce sujet ?

La Loi de 1905 prévoit la laïcité sur tout le territoire de la République or celle-ci ne s’applique pas aux trois départements Haut-Rhin, Bas-Rhin, Moselle pour des raisons historiques qui ne se justifient plus. Sans dogmatisme, en accord avec les Verts des régions Lorraine et Alsace, nous demandons la suppression de cette anomalie.

Surtout, notre conviction la plus profonde est que c’est en confortant la citoyenneté, c’est-à-dire en donnant des droits REELS à tous, une égalité dans les faits, que nous renforcerons la laïcité. Inutile d’attendre un hypothétique retour de la croissance économique pour renforcer ces droits, comme le propose la Gauche traditionnelle. C’est dans un contexte de décroissance équitable et sélective que nous devrons réinventer des solidarités. La République n’est pas en danger, seule notre cohésion sociale est mise à mal. Ceux qu’on accuse, parfois trop facilement, de communautarisme sont aussi les victimes de la ghettoïsation de la société - le reconnaître n’est pas contradictoire avec le fait de défendre les principes fondamentaux de la laïcité. Pour ceux-là, il n’y a pas de justice sociale, il n’y a pas de liberté d’aller et venir, il n’y a pas d’égalité des chances à l’école. Souvent, on ne respecte pas leur dignité et ils n’ont pas droit au choix de leur vie. C’est sur ce terrain, celui du pacte social et républicain, que sont attendus les politiques, en général, et les Verts, en particulier. Donnons des droits à ceux qui n’en ont pas et nous sauverons la laïcité.

Ce texte est issu d’un groupe de travail sur la laïcité, soutenu par le CAD des Verts du Maine-et-Loire (49)


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