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Pour une autre politique de l’immigration
février 2007

Les migrations font partie de l’histoire universelle

De tous temps, des personnes ont quitté leur pays, fuyant la guerre ou la misère et se déplaçant le plus souvent vers une région proche. C’est ainsi que ces dernières années, l’Iran, le Pakistan et la Tanzanie ont été les principaux pays d’accueil de réfugiés dans le monde. En Europe, c’est l’Allemagne qui a accueilli le plus de réfugiés, près d’un million, au moment de l’éclatement de l’ex Yougoslavie. En France, des migrations importantes, économiques ou politiques, sont venues successivement tout au long du XXe siècle de Belgique, d’Italie, de Pologne,, d’Espagne, du Portugal. Sans parler de l’esclavage, la colonisation a été aussi à l’origine de nombreuses migrations entre le Nord et le Sud, déplacements rarement volontaires au gré des besoins économiques ou militaires des métropoles. Les liens familiaux et culturels qui existent depuis à travers les continents continuent d’amener vers l’Europe des personnes venant de pays dont l’indépendance est récente.

Pour d’autres peuples, les déplacements, les voyages plus ou moins éloignés et pour une durée plus ou moins limitée font partie intégrante de leur culture : les Rroms, les riverains du fleuve Sénégal en Afrique, les habitants de la région de Wenzhou en Chine, les Tamouls dans le sous continent indien... Ceux qui partent ne sont pas les plus pauvres, il faut des moyens financiers, un savoir, des relations dans le pays d’accueil. C’est l’absence de perspective d’avenir chez eux et l’espoir d’une vie meilleure mais aussi l’esprit d’aventure et d’entreprise qui les incitent à partir.

La facilité des transports, la mondialisation de l’information, des échanges économiques et culturels, la généralisation des passeports et donc du « droit de sortir » ont accentué les migrations ces dernières décennies.

Au début du XXe siècle, 5% de la population mondiale ne vivait pas dans son pays de naissance, depuis cette proportion aurait plutôt légèrement baissé. Mais il y a aussi les millions de touristes qui, chaque année, vont, entre autres, des pays du Nord vers les pays du Sud, y accentuant souvent les déséquilibres économiques et sociaux.

Les migrations sont une richesse

Les migrants sont une richesse pour les pays d’origine Davantage que toutes les aides internationales,, les migrants contribuent au développement de leur pays par l’argent qu’ils y envoient. Ces transferts de fonds sont considérables, plus de 200 milliards de dollars pour l’ensemble du monde en 2005. Ils ont l’avantage d’arriver directement aux destinataires pour des projets familiaux et locaux et de ne pas alimenter la corruption et le gaspillage trop souvent liés aux aides d’Etat à Etat. Les diasporas chinoise et indienne ont ainsi, par exemple, largement contribué à l’essor récent du continent asiatique.

Les émigrés se forment, se perfectionnent, acquièrent de nouvelles compétences. Les migrants espagnols, irlandais, portugais... ont participé à la modernisation de leur pays.

Par la participation à la vie citoyenne et syndicale, par la confrontation des idées, les émigrés sont mieux à même de développer un esprit critique et de contester ici et là bas les injustices et le népotisme.

Les migrants sont une richesse pour les pays d’accueil Population jeune arrivant à l’âge adulte, les immigrés sont une chance pour l’équilibre démographique des pays vieillissants, qui exploitent au moindre coût une main d’œuvre qu’ils n’ont pas eu à former.

Ils occupent des emplois dans des secteurs qui réclament de la mobilité et des contraintes et qui sont insuffisamment pourvus par la main d’œuvre locale : bâtiment, travaux publics, restauration, nettoyage, services... mais, avec leurs compétences, certains trouvent facilement aussi un emploi dans la formation, l’informatique ou d’autres métiers qualifiés. Ils contribuent ainsi au développement de leur ville, de leur région de résidence. En Espagne par exemple, il est reconnu par les économistes que l’arrivée de trois millions d’étrangers depuis 2000 est à l’origine de la moitié de la croissance du pays durant les cinq dernières années.

L’apport positif des immigrés dans les activités artistiques et sportives, dans l’ouverture sur le monde ne peut être contesté. Comme le dit Claude Lévi-Strauss dans Race et histoire, « l’exclusive fatalité, l’unique tare qui puissent affliger un groupe humain et l’empêcher de réaliser pleinement sa nature, c’est d’être seul ».

La fermeture des frontières est meurtrière et inefficace Les politiques répressives et policières menées par les Etats européens entraînent des milliers de morts dans les déserts, les mers, les conteneurs, les trains d’atterrissage... Le bilan, 4000 morts dans le détroit de Gibraltar entre 1997 et 2001 par exemple, est plus lourd que celui de la peine de mort, du 11 septembre 2001 à New York, ou du rideau de fer et du mur de Berlin. Empêcher la liberté de circulation est le meilleur soutien des régimes autoritaires dont une des premières mesures est toujours de fermer les frontières. Contraindre des personnes à rester soumises à des législations attentatoires aux libertés peut certes les pousser à la révolte mais, en pratique, encourage la poursuite des pratiques dictatoriales. Or, en 2005, plus de 85% des personnes qui sont parvenues à déposer une demande d’asile en France ont vu leur demande refusée. Ces politiques sont surtout bénéfiques pour les passeurs, les trafiquants, les employeurs de travailleurs clandestins. Elles n’empêchent pas la venue de 500 000 « irréguliers » chaque année dans l’Union européenne.

Les expulsions de sans-papiers se veulent spectaculaires (les charters) pour envoyer un message aux électeurs d’extrême droite et aux migrants potentiels mais leur efficacité est ridiculement faible. Moins de 2% des arrêtés de reconduite à la frontière sont réellement appliqués, malgré la mobilisation intense et coûteuse de l’appareil judiciaire et policier.

Par contre les conséquences de cette politique sont dramatiques, inquiétantes pour les libertés :
multiplication des contrôles d’identité, criminalisation de l’immigration clandestine, exploitation et fragilisation de personnes sans ressources légales.... Des milliers de sans-papiers restent sans possibilité de travailler légalement, sans droits, dans une grande précarité et insécurité permanentes. L’ensemble de la société est concernée : stigmatisation d’une partie de la population et augmentation du racisme, contrôles au faciès et suspicion généralisée... La fermeture des frontières est contre productive car elle empêche les allers-retours que souhaitent la majorité des migrants et qui était la règle auparavant. Les clandestins ont eu de telles souffrances pour arriver dans l’« eldorado » européen qu’ils ne veulent pas risquer, en repartant chez eux, de ne plus pouvoir revenir.

Pour une démocratie, il n’y a pas d’alternative à la liberté de circulation et d’établissement

Refusée aux esclaves, aux serfs, aux citoyens des dictatures, la liberté d’aller et venir est un des droits fondamentaux de l’Homme. La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (article 13-1) reconnaît le droit d’émigrer. Si le droit d’immigrer n’est pas inscrit dans cette déclaration, la « Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille », que la France n’a toujours pas ratifié, va dans ce sens. Comme le dit Emmanuel Terray, « ... jusqu’en 1974 les frontières étaient ouvertes, et le monde n’était pas -bien loin s’en faut- plus riche qu’à présent ; or pendant cette période, aucun déferlement ne s’est produit ». Il y a eu, au plus fort moment des « trente glorieuses » 200 000 régularisations annuelles.

L’ouverture des frontières européennes, en 1992, aux travailleurs salariés espagnols, grecs et portugais, au niveau de vie très inférieur, n’a pas entraîné de déplacements massifs vers les autres pays de l’Union européenne. La chute du rideau de fer et du mur de Berlin ne s’est pas traduite par un mouvement important de population de l’Est vers l’Ouest. Lorsqu’il y a des arrivées massives et exceptionnelles de population, réfugiés d’Algérie en 1962, juifs russophones en Israël à la disparition de l’URSS, plus de deux millions d’Aussiedler venant de l’ex URSS et de Pologne en Allemagne à la même époque, les Etats gèrent la situation et il n’y a aucune catastrophe.

Pour la chercheuse Catherine Wihtol de Wenden, « plus les frontières sont ouvertes, plus les gens circulent et moins ils s’installent... tout se passe d’autant mieux que les gens peuvent circuler ». Les personnes s’installent là où elles ont un avenir, des revenus stables, elles doivent garder la possibilité d’aller ailleurs si leur environnement se modifie ou si elles en ont simplement envie.

Mettre en place une autre politique européenne de l’immigration

Il faut tendre au niveau européen vers la liberté de circulation, de travail et d’établissement avec des accords contractuels entre l’Union européenne et les pays du Sud permettant un flux régulier et une meilleure maîtrise des migrations Dans l’immédiat, en France, un certain nombre de mesures peuvent être prises, dans la transparence, la dédramatisation et une réelle volonté d’explication auprès de la population :

- Régulariser tous les sans-papiers A trois reprises en vingt ans, des régularisations nombreuses ont eu lieu en France. L’Espagne, la Grèce, l’Italie, le Portugal ont procédé ces dernières années à des régularisations plus massives. L’Allemagne envisage de le faire prochainement... Contrairement à ce que répète Nicolas Sarkozy, ces régularisations n’ont pas été des « appels d’air », il n’y a eu aucune invasion des pays concernés au lendemain des mesures prises mais, bien entendu, le flux habituel d’ arrivées d’immigrés s’est poursuivi et a obligé, en l’absence d’une autre politique des migrations, à revoir périodiquement la situation. Les régularisations au cas par cas ont toujours une part d’arbitraire, laissent dans la précarité le plus grand nombre soumis au travail clandestin et autres trafics mafieux.

- Sortir les questions migratoires du Ministère de l’Intérieur
Pour ne pas lier ces questions à celles de la sécurité et aborder avec sérénité les rapports Nord-Sud dont font partie les mouvements migratoires, les Verts proposent la création d’un ministère de la coopération solidaire, des migrations et du commerce mondial. Le développement des pays du Sud n’arrêtera pas dans un premier temps les migrations, la liberté de circulation est un instrument de ce développement.

- Faire entrer les sans-papiers dans le droit commun
Dépénaliser le séjour irrégulier et amnistier toutes les condamnations liées au séjour irrégulier ; supprimer définitivement la double peine ; fermer les centres de rétention et autres zones d’attente...

- Revenir pour le droit d’asile à l’esprit de la Convention de Genève et l’appliquer en particulier aux victimes de catastrophes naturelles, de persécutions liées à la sexualité...

- Ratifier et appliquer la Convention internationale des Nations Unies sur les droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et, en conséquence, aligner le droit à vivre en famille des étrangers sur celui des Français.

- Lutter contre le travail clandestin, les filières d’immigration et les autres formes d’exploitation de la situation précaire des immigrés.

- Ne délivrer que des visas de long séjour à entrées multiples (droit d’entrée), motiver les refus de visas, mettre en place des accords bilatéraux ou multilatéraux pour décider des politiques migratoires

- Mettre en place une politique d’accueil de suivi et d’accompagnement des primo-arrivants dans l’apprentissage de la langue, l’éducation, la santé, le logement... dans le respect de leur culture d’origine. Réaliser la citoyenneté de résidence par l’octroi du droit de vote et d’éligibilité à tous les étrangers, faciliter l’accès à la nationalité française et lutter plus efficacement contre les discriminations.


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