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Projet de loi-cadre sur l’audiovisuel
13 février 2007
Pour l’instauration du pluralisme télévisuel, du contrôle citoyen, de la régionalisation et pour favoriser un tiers secteur audiovisuel.
SYNTHESE DES PROPOSITIONS ISSUES DE LA « CONVENTION NATIONALE DES VERTS AUTOUR DE LA TELEVISION EN FRANCE » ORGANISE LE LUNDI 12 DECEMBRE 2005 A L’ASSEMBLEE NATIONALE SOUS LE HAUT PATRONAGE DE MARIE-CHRISTINE BLANDIN, SENATRICE DU NORD ET NOËL MAMERE, DEPUTE DE GIRONDE
Le paysage audiovisuel français est de plus en plus complexe et l’offre télévisuelle croît de façon importante, cependant la qualité des programmes se dégrade entraînant une uniformisation des grilles. Ainsi, en l’espace de huit ans, alors que le nombre de chaînes était multiplié par 2,5 en France, la production globale de fictions originales diminuait de 16%.
Du côté du service public, la dépendance des recettes publicitaires limite ses capacités d’autonomie et ses objectifs de qualité qui seuls peuvent lui permettre de s’ériger en contre-modèle fort face à la puissance de groupes d’audiovisuels privés mus par la logique unique du profit. Afin de libérer le service public de la pression des annonceurs, nous proposons la suppression de la publicité sur les chaînes publiques. Cette suppression s’accompagne d’une taxe afin de compenser le supplément de marché publicitaire dont les télévisions commerciales vont ainsi bénéficier. Cette taxe servira à la création d’un fond de soutien aux télévisions du tiers secteur et au renforcement des chaînes publiques (nationales ou locales) dont le financement actuel ne leur permet pas d’investir suffisamment dans de grandes créations populaires.
Pour la télévision commerciale, la tendance est une évolution rapide vers une augmentation quantitative des moyens de diffusion, une concentration économique accentuée et une dérégulation programmée. Cette dérégulation doit être combattue, en particulier en ce qui concerne le marché publicitaire où des secteurs interdits comme la presse et l’édition (au nom d’un pluralisme éditorial), mais aussi la distribution sont aujourd’hui autorisés. La concentration économique met tout particulièrement en danger le pluralisme de l’information, l’éthique de la programmation et la capacité de création indépendante. Pour permettre le pluralisme audiovisuel, nous proposons de nouvelles mesures anti-concentration en ce qui concerne le cumul des autorisations d’exploitation de fréquences nationales ou locales, et de simplifier l’application des dispositions anti-concentration actuelles.
Enfin, il faut une régulation du secteur audiovisuel qui ne soit pas seulement à la faveur des grands groupes et qui permette un équilibre entre les trois secteurs : public, privé et tiers secteur. Il y a urgence d’une réforme d’un Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (C.S.A.) qui ne joue plus son rôle. Pour ce faire, nous proposons de modifier le mode de nomination de ses membres et d’en faire un organe de régulation démocratique, transparent et ouvert aux professionnels et aux usagers de la télévision.
Grands équilibres et régulation
Les grands équilibres entre les secteurs public, privé, et tiers secteur et entre chaînes nationales et télévisions locales sont actuellement extrêmement compromis au profit des grands opérateurs nationaux et du secteur commercial. Pour rétablir ces grands équilibres, le présent projet propose une série de mesures.
Attribution des fréquences analogiques : En attente de l’extinction de l’analogique, les canaux non encore attribués sont réservés aux chaînes locales et une part des ressources en fréquences doit être réservée à des télévisions privilégiant l’expression et les échanges entre les groupes sociaux et culturels, la protection de l’environnement et la lutte contre l’exclusion.
Attribution des fréquences de la Télévision Numérique Terrestre (T.N.T.) :
L’arrivée de la T.N.T semblait pouvoir répondre aux attentes de petits opérateurs, ancrés sur des territoires de vie et soucieux de rapprocher les citoyens de « leurs » médias. Or, les critères de l’instance de régulation en matière d’attribution des fréquences (C.S.A.) en mettant en avant la solidité financière des futurs opérateurs ont conforté les grands groupes et ont favorisé la presse quotidienne régionale favorable au contrôle d’un nouveau média sur son territoire. Nous proposons donc une refonte en profondeur des critères d’attribution des canaux sur la TNT qui doit avoir vocation à s’ouvrir largement en direction des chaînes locales qu’elles soient de nature associative, privées ou publiques.
Reforme du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (C.S.A.) :
Au nom de l’intérêt général nous proposons une réforme du C.S.A. assurant un pluralisme d’opinions dans sa composition ; une redéfinition de ses objectifs de sa mission ; une transparence de ses décisions et une évaluation par le parlement de l’accomplissement de sa mission. Enfin un débat sur l’avenir du service public de l’audiovisuel sera organisé annuellement à l’occasion du vote du budget et au moment du dépôt du bilan annuel du C.S.A Le C.S.A. est renouvelé par tiers tous les deux ans sur la base d’un membre désigné respectivement par le Président de la République (qui choisit aussi le Président du C.S.A.), le président de l’Assemblée nationale et du président Sénat. Ce mode de désignation ne garantit pas l’indépendance de l’organe de régulation. Or la neutralité du C.S.A. vis-à-vis du gouvernement est essentielle puisqu’il doit assumer au travers de choix techniques de fait des enjeux politiques forts. Ainsi, par exemple, privilégier les candidatures issues de la Presse Quotidienne Régionale (P.Q.R.) pour les chaînes locales ou privilégier le critère économique pour l’attribution de chaînes de la T.N.T. relève à l’évidence de choix idéologiques marqués. Nous proposons une désignation des membres du CSA par l’Assemblée Nationale et le Sénat à la proportionnelle et la création d’un conseil économique et social de l’audiovisuel avec une capacité d’initiative auprès du CSA. Des représentants des travailleurs de l’audiovisuel (syndicats groupements professionnels, journalistes, créateurs), des représentants d’associations de consommateurs et de téléspectateurs, des enseignements et des chercheurs y sont associés Nous proposons en sus des mesures pour renforcer la transparence dans les attributions et les renouvellements des fréquences ainsi que pour le contrôle des cahiers des charges notamment sur le pluralisme de l’information et sur l’apport des chaînes à la création.
Une réflexion et une régulation décentralisée :
Un certain nombre des missions actuelles du C.S.A. seront décentralisées en particulier en ce qui concerne l’attribution des fréquences-radio et le contrôle des chaînes locales. Parallèlement les régions auront pour mission d’organiser des États régionaux de l’audiovisuel qui permettront un dialogue renouvelé avec les associations, les professionnels du secteur, les syndicats et les citoyens. Enfin un certain nombre de fréquences seront réservées à des télévisions privilégiant l’expression et les échanges entre les groupes sociaux
Réaffirmation de l’intérêt général sur les chaînes nationales
Le service public perd du terrain, alors qu’il bénéficiait naguère de la moitié des fréquences hertziennes, il n’en a plus qu’une sur six actuellement. Qui plus est, il s’est trouvé obligé de s’allier avec les grands groupes privés pour des thèmes aussi importants que l’information internationale et la jeunesse. Enfin il dépend tellement de la publicité qu’il est souvent obligé de formater ses programmes sur le modèle des télévisions privées.
La concentration des médias a atteint un niveau inquiétant puisque aujourd’hui quatre groupes se partagent la quasi-totalité des fréquences. En aval, ces mêmes groupes maîtrisent la distribution audiovisuelle en formant des alliances et en amont, verrouillent les droits audiovisuels et concentrent les investissements publicitaires. Ils enferment ainsi les créateurs, les chaînes et producteurs indépendants dans une économie précaire. Nous proposons de rompre avec cette situation dommageable pour la démocratie.
Un service public national fort
Le service public joue un double rôle : exercer des missions d’intérêt général spécifiques, et équilibrer le poids du secteur commercial. Ces deux rôles sont complémentaires. Que serait l’information télévisée ou la qualité des programmes aujourd’hui si l’audience était presque entièrement entre les mains de quelques grands groupes audiovisuels ? Afin de permettre aux chaînes publiques d’assurer leurs missions spécifiques tout en conservant un poids significatif aux chaînes qui assurent une audience forte, le service public doit avoir un financement significatif face au secteur privé. Cependant la dépendance par trop importante des chaînes publiques vis-à-vis de recettes commerciales (un tiers du financement actuel) est dommageable à ces mêmes missions, il faut y substituer des ressources publiques. Nous proposons donc une substitution progressive des ressources publiques aux recettes commerciales avec pour objectif la disparition de la publicité sur les chaînes publiques. Cette substitution sera financée notamment au travers d’une taxe sur la publicité des chaînes commerciales et une redevance sur l’utilisation des fréquences hertziennes. Il faudra sans doute envisager également une augmentation progressive de la redevance audiovisuelle. Afin de renforcer le service public et de clarifier la césure entre télévision publique et télévision privée, la chaîne jeunesse et la chaîne d’information internationale sont réintégrées totalement dans le périmètre du service public. Par ailleurs, l’ouverture d’une chaîne dédiée à la création audiovisuelle qui soit un tremplin, un banc d’essai, un espace d’invention et d’impertinence est à envisager.
Un secteur privé indépendant des groupes qui vivent des commandes publiques
La télévision est devenue l’affaire de quelques grands groupes du bâtiment, de la presse, de l’édition et de l’armement, groupes dépendant des commandes et des marchés publics. Cette situation de conflit d’intérêt permanent est intolérable pour la démocratie. Le présent projet impose l’interdiction pour les groupes qui vivent de commandes publiques de contrôler des réseaux audiovisuels. De même, la concentration économique qu’elle soit horizontale ou verticale met en danger le pluralisme de l’information, l’éthique de la programmation et la capacité de création indépendante. Nous proposons donc une simplification des dispositions anti-concentrations actuelles propres à en améliorer l’application concrète ainsi qu’une accentuation des mesures anti-concentration en ce qui concerne le cumul des autorisations d’exploitation de fréquences nationales ou locales. Ces mesures doivent permettre de créer des conditions plus favorables au développement des télévisions indépendantes (locales ou nationales), associatives ou du tiers secteur qui doivent pouvoir exister. Enfin nous organisons le retour à l’interdiction de la publicité à la télévision des secteurs de la presse, du livre, et de la distribution et l’interdiction de la publicité dans les programmes ciblant des enfants de moins de 7 ans.
Développement des chaînes locales sur des territoires de vie
À côté des télévisions privées et publiques, doit pouvoir se développer un tiers secteur audiovisuel. Il est donc nécessaire d’en organiser les conditions d’existence.
Financements des chaînes locales d’intérêt général :
Nous proposons la création d’un fonds de soutien aux chaînes à faibles ressources publicitaires d’intérêt général (tiers secteur et service public local) par une extension de la taxe sur la publicité sur les médias gratuits, en prolongement de la taxe sur les régies de radio et télévision. La partie de cette taxe actuellement en vigueur est déplafonnée afin de supprimer l’avantage donné jusqu’à présent aux plus grosses régies publicitaires.
Réforme de France 3 :
Afin de donner à France 3 une mission régionale élargie, nous proposons d’autonomiser les programmations régionales, qui pourront faire appel autant que de besoin à des programmes nationaux ou à des échanges et syndications avec les autres régions. Ultérieurement, un débat sera organisé avec les collectivités et le personnel sur l’opportunité d’autonomiser et de régionaliser les structures.
Création, Production indépendante et en région :
Afin de dynamiser le secteur audiovisuel régional la création et la production indépendante en région doivent être soutenues activement. Pour ce faire, nous proposons une augmentation significative des aides régionales du Centre National du Cinéma et une définition plus stricte de la notion d’œuvre audiovisuelle.
Développement de la participation active des téléspectateurs et mise en œuvre d’une éducation aux médias
La télévision a pris une place extrêmement importante dans l’organisation de la vie sociale et démocratique de la nation dans une société où les Français regardent en moyenne la télévision plus de trois heures par jour, et les enfants sont considérés par les médias comme une cible publicitaire à partir de 4 ans. Face à ce constat, il est essentiel de développer l’esprit critique des citoyens/téléspectateurs comme un moyen de lutter contre l’inégalité sociale (les enfants défavorisés regardent davantage la télévision). Éducation aux médias :
Des partenariats doivent être noués dès l’école avec des associations compétentes pour aider les enfants à choisir, connaître les programmes et accéder aux informations. Ces associations d’éducation aux médias seront aidées par les régions en coordination avec l’éducation nationale et les associations d’éducation populaire.
Représentation des téléspectateurs :
Les citoyens/téléspectateurs sont concernés par l’avenir de l’audiovisuel et par le contenu des programmes, il est nécessaire qu’ils puissent s’exprimer sur ces sujets au travers d’associations représentatives qui doivent être incluses dans les organes de décisions à tous les niveaux.
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