Retour sur les journées d’été régionales EELV Hauts-de-France
Boulogne-sur-mer, les 2 et 3 juillet 2016
Deux jours au début de l’été pour construire ensemble l’écologie politique, se questionner, se renforcer mutuellement de nos compétences, se former… Les échanges ont été riches et variés ; ce document vise à garder en mémoire les plénières.
Plénière d’ouverture des journées d’été:
« Nouveaux mouvements citoyens et gouvernance démocratique locale »
Fabien Desage, politologue, a dressé le constat de la déconnexion entre les élu-es et les univers sociaux, du fait de plusieurs mécanismes. En forçant le trait – quoique : les élus sont des hommes blancs âgés et aisés, qui apprécient le confort de l’entre-soi dans des institutions fonctionnant sous le mode du consensus et en maintenant la population à distance. Par exemple, « les communautés urbaines sont des machines à faire du consensus ».
Comment en sortir ? Notre action politique doit viser à avoir des élu-es qui rendent des comptes, qui reconnaissent la place des mouvements sociaux comme force de proposition et d’action, qui s’appuient sur les collectifs et qui gardent un ancrage fort dans les espaces sociaux et professionnels.
Il faut que tout vote dans une assemblée soit public : les élu-es doivent rendre compte de leurs positions !
Les classes populaires se sentent oubliées par les partis traditionnels, en particulier le PS, car les politiques ont abandonné des actes qui faisaient sens (ex : récépissé pour éviter les contrôles au fasciés, vote des étrangers aux élections locales…). Paradoxalement, alors que les raisons de faire de la politique sont nombreuses pour ceux qui subissent le chômage, l’absence de perspectives, … on observe une démobilisation parmi les populations les plus concernées/touchées. Mais il ne faut pas désespérer : il existe une vraie conscientisation de la jeunesse.
Martine Minne, d’ATTAC Dunkerquois, a souligné le fait que les citoyen-nes ne se reconnaissent plus dans l’appareil politique et que les militant-es craignent la récupération politique. « Il faut toujours aller aux urnes mais on a de plus en plus de mal à croire que cela change quelque chose. »
Fabrice Obaton, de Sud Solidaires Boulogne-sur-mer, a relevé que son syndicat et EELV sont confrontés aux mêmes maux et mêmes questionnements : surcharge organisationnelle et de débats internes, peu d’adhérents, militants multi-engagés et très sollicités, besoin de renouvellement et d’élargissement des adhérents et des militants… Pour lui, les mouvements sociaux sont un chemin pour des formes de militance plus structurées. Par exemple « Nuit debout » à Boulogne-sur-mer a bénéficié du soutien moral et matériel de Sud Solidaires et des jeunes vont créer une antenne Sud jeunes à la fac.
Syndicats et partis doivent s’épauler : le syndicat en préparant la transition économique écologique et le parti en veillant à préserver les acquis sociaux tout en prenant en compte les nouvelles formes de travail.
Julien Bayou, porte-parole EELV, constate que nos vieux partis, nos institutions ne répondent plus aux attentes, qu’on recherche un nouveau modèle.
Nuit debout s’inscrit dans une défiance vis à vis des corps constitués et en même temps une demande de plus de démocratie. Mais cela ne constitue pas un nouveau modèle. Les exemples grecs, espagnols et USA montrent que les mouvements citoyens (Indignés, Occupied Wall Street) ne s’inscrivent pas directement dans le champ politique traditionnel, mais sont le support pour la montée en puissance de forces politiques alternatives (Syriza, Podemos, candidature de Bernie Sanders).
En France, pour EELV l’enjeu est de constituer une force alternative progressiste, humaniste pro européenne. Après la période faste des européennes et régionales de 2009 et 2010, notre tentative au sein du gouvernement PS s’est soldée par un échec. Pourtant nous sommes à un moment de basculement dans les idées, avec une vraie conscience des risques du changement climatique, des impacts des pollutions, de l’impasse du tout nucléaire, arnaque du projet de traité TAFTA… Il nous faut gagner des combats locaux, à la fois en « contre » (projet d’aéroport Notre Dame des Landes) et en « pour » (politiques écologistes à Grenoble). Dans ces combats, syndicats, associations et partis ont tout intérêt à travailler ensemble. Nous sommes attendus sur les solutions ! Nous avons le logiciel : de nombreuses personnes se reconnaissent dans le projet de l’écologie politique. L’application est bugguée, c’est à nous de faire quelque chose avec le mouvement pour redonner des nouvelles capacités d’action au service des citoyen-nes.
Cultivons nos singularités, dans nos pratiques, nos luttes, nos solutions.
EELV doit savoir s’inscrire dans un écosystème. Par exemple aux côtés des forces sociales pour montrer que justice sociale et justice écologique sont étroitement liées.
Les processus politiques prennent du temps alors qu’on a un sentiment d’urgence. Le monde de demain dont on parle est déjà à l’œuvre mais il est empêché de se développer par de multiples groupes d’intérêt, lobbies et freins conservateurs.
EELV est un outil pour déverrouiller le monde à venir.
Plénière de clôture des journées d’été:
« Le rôle de l’élu-e écologiste dans le nouveau paysage politique régional »
Marine Tondelier, élue à Hénin-Beaumont (opposition) et déléguée à la CAHC (Communauté d’Agglomération Hénin-Carvin), fait part de son combat quotidien harassant mais passionnant. Le FN utilise le conseil municipal et le journal local comme des outils de propagandes. Les quelques lignes réservées à l’expression de l’opposition sont systématiquement suivies de pleines pages de démentis de la majorité. La mise en place et la distribution régulière d’un journal de l’opposition écologiste s’est imposée.
Les insultes et intimidations ne sont plus réservées aux élu-es de l’opposition ou la VDN mais à tous ceux qui expriment leurs désaccord. Régulièrement, des personnes viennent nous faire part de dysfonctionnements ou témoigner de leur soutien mais en restant anonymes.
Myriam Cau, ancienne vice-présidente du conseil régional NPDC, dresse un bilan critique des 6 mois du nouvel exécutif régional : registre émotionnel, buzz, logique de guichet, politique d’économies sans discernement et au détriment des acteurs associatifs… La conférence de presse sur ce sujet mi-juin n’a pas été relayée médiatiquement. Il nous faut utiliser d’autres médias pour faire connaître nos positions et continuer à exister politiquement. Il s’agit de conserver notre expertise sur les politiques publiques et de rester visible auprès de la galaxie écolo. Aujourd’hui EELV a un enjeu à transmettre et doit être en capacité de faire émerger de nouvelles forces militantes.
Damien Carême, maire de Grande Synthe, explique que les enjeux santé-environnement sont primordiaux pour toutes les politiques publiques menées dans sa commune. D’une difficulté on peut faire une opportunité. Par exemple la construction du camp pour les migrants a fait émerger chez des jeunes de la commune l’envie de travailler dans l’humanitaire et créé 55 emplois. Certains habitants ont dit que Grande Synthe pouvait être qualifiée de « capitale française de l’humanité » (après avoir été capitale française de la biodiversité en 2010). C’est une victoire dans les mentalités. Il faut s’appuyer sur les forces sociales pour légitimer des combats quand des élus ou l’Etat manquent de courage politique.
David Cormand, secrétaire national EELV, relève que les citoyen-nes ont besoin de se sentir partie prenante d’une nouvelle aventure. Le populisme et le repli identitaire du Front national sont les symptômes d’un sentiment de déclassement.
Militant-es comme élu-es, il nous faut porter un radicalisme pragmatique.
Quand on est minoritaire dans la majorité, il s’agit de capitaliser les gains (ex : bilan des élu-es écolos à Paris récupéré par Delanoé), de savoir se distancier du partenaire de façon lisible et positive et savoir incarner la politique que l’on mène. Et quand la majorité s’obstine dans la mauvaise direction, en sortir pour mieux s’opposer car cela ne sert à rien de rester pour uniquement freiner les mauvaises orientations.!
EELV perd beaucoup de temps et d’énergie à s’organiser en interne. Nous avons à mieux valoriser les engagements militants externes.
Aujourd’hui nous ne sommes plus minoritaires sur les constats, il faut devenir majoritaires sur les solutions. Au milieu d’un paysage politique sclérosé nous devons réinventer l’outil « parti » pour mieux faire entendre la musique de l’écologie, sans prétention mais sans complexes. nous devons faire savoir ce que l’on fait. Dans le paysage politique global il y a des opportunités pour les écolos. A nous de les saisir.