88 % des Français/es jugent notre système fiscal opaque. Seulement 17 % le trouvent juste. Quelle lucidité ! De cadeaux fiscaux en bidouillages, notre édifice fiscal est à bout de souffle. Aucun gouvernement récent n’a osé prendre ce problème à bras le corps et faire la réforme qui s’impose pour lui redonner tout son sens, et surtout son rôle de redistribution des richesses et donc de réduction des inégalités.
Comme Camille Landais, Thomas Piketty et Emmanuel Saez le suggéraient déjà en 2011 dans leur livre Pour une révolution fiscale – un impôt sur le revenu pour le XXIe siècle, il est urgent de revoir l’ensemble des prélèvements obligatoires. Un objectif majeur : rétablir une progressivité réelle, la seule à même de garantir l’équité et la solidarité entre les Français/es.
De l’ouvrier au PDG, la contribution sociale généralisée (CSG) s’applique de façon identique à tous les revenus (taux d’environ 8 %). Elle pèse deux fois plus lourdement sur les salaires et les autres revenus que l’impôt sur le revenu, pourtant le plus juste car progressif. L’impôt sur le revenu représente d’ailleurs à peine plus de 6 % des prélèvements obligatoires. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA, dont le taux de 20% est lui aussi fixe) vient s’ajouter à la CSG pour réduire encore la progressivité des prélèvements. Les plus pauvres, qui dépensent la quasi totalité de ce qu’ils gagnent, se voient donc taxés sur une plus grande proportion de leurs revenus que les plus riches qui ont souvent des taux d’épargne élevés. Et cela sans compter les nombreuses niches fiscales qui allègent l’impôt sur le revenu des catégories les plus aisées.
C’est pourquoi, il est indispensable d’effectuer une réforme radicale de la fiscalité en France. Sur la base du prélèvement à la source, acquis du quinquennat Hollande à mettre en œuvre, il s’agit d’abord d’individualiser l’impôt (suppression du quotient conjugal notamment) : à chacun d’être imposé selon son revenu. Il s’agit ensuite de fusionner la CSG et l’actuel impôt sur le revenu. Comme pour la CSG, l’assiette portera sur les revenus du travail et du capital. Et comme pour l’impôt sur le revenu le barème sera progressif. Cette grande réforme devrait aboutir à un système fiscal plus juste dans lequel les revenus du travail et ceux du capital seraient imposés de la même façon, ce qui est loin d’être le cas actuellement. Aujourd’hui, un chômeur est imposé plus lourdement qu’un actionnaire !
Cette « révolution fiscale » doit être complétée par un impôt unique sur le patrimoine, issu de la réunion de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de la taxe foncière. En l’absence de révision générale de la valeur locative cadastrale depuis 1960 pour le non-bâti et 1970 pour le bâti, il faut revoir complètement les bases des impôts locaux. Enfin, la suppression des niches fiscales injustes socialement et la lutte accrue contre l’évasion fiscale (manque à gagner de 60 à 80 milliards d’euros !) sont indispensables.
« Une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. » Grâce à une telle réforme, nous retrouverions l’objectif fondamental et fondateur de l’article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.