Le 14 avril 2004, il y a déjà 8 ans, j’avais assisté à une réunion de travail du SMEVED, syndicat nouvellement créé, ayant comme mission de définir les besoins en matière de gestion des déchets, sur un territoire regroupant à l’époque 260 000 habitants. Territoire hétérogène, sans passé commun, à cheval sur le Maine et Loire et la Loire Atlantique.
Nouvel adhérent chez les Verts à l’époque, je me suis retrouvé avec six autres camarades, au milieu d’une vingtaine de représentants des communautés de communes. De cette réunion d’information, 3 éléments essentiels étaient dégagés par les techniciens.
- La quantité de déchets ne ferait que croître.
- Les modes de traitement étaient un mix entre incinération, enfouissement, ou bien tri mécano biologique.
- Il n’était pas question d’exporter les déchets.
Les seules demandes de complément d’information furent du fait de notre groupe.
Pourquoi la constitution d’une entité regroupant autant d’habitants, à cheval sur deux départements ?
Pourquoi prévoir une augmentation des déchets et non pas une diminution.
Pourquoi ne pas parler de tri des matières fermentescibles.
Pourquoi ne pas parler de formation du citoyen.
Les réponses furent en substance :
La quantité de déchets a toujours augmenté, elle augmentera toujours.
Les économies d’échelles nécessitaient un vaste territoire.
Le compostage, le tri des fermentescibles est irréalisable à grande échelle. Et former le citoyen, ça demande du temps, et les structures devront être mises en place avant fin 2010.
Nous avons assez rapidement compris que l’objectif était la construction d’un incinérateur et qu’il fallait trouver un territoire capable de l’alimenter. Les élus pour qui les déchets sont toujours un problème délicat avaient là une solution toute trouvée: ils n’avaient plus qu’à signer , les contribuables assureraient le financement.
Nous sommes en 2012.
Il n’y a pas d’incinérateur. Le compostage individuel se met lentement en place, les communautés de communes ont fait un effort financier pour aider à l’achat de composteurs. (Un petit effort comparativement aux sommes qui ont été versées aux cabinets d’études –Merlin- et de communication- Parménion) Le compostage collectif en est encore à ses premiers balbutiements. La quantité de déchets a diminué. Des déchets sont exportés en dehors du territoire.
Que s’est-il passé ?
Fin 2004, sous l’impulsion de militants venus des Verts et d’Attac, le Collectif Déchets des Mauges regroupa 14 associations. Très rapidement, à force de recherches, d’informations, de rencontres avec des spécialistes militants, les simples citoyens que nous étions, rivalisèrent avec les techniciens et conseillers en communication du SMEVED. Nos propositions étaient basées sur l’incitation au tri des déchets, la formation des citoyens, la relocalisation et l’enfouissement des déchets ultimes, le refus des grosses structures, le refus de l’incinération. Mais de telles propositions suscitèrent souvent de la part de nos interlocuteurs, de vagues ricanements.
Malgré la présentation d’un plan de gestion des déchets proposé par le collectif, moins cher et plus écologique, le choix de l’incinérateur et de l’usine de tri mécano biologique, avec une petite partie de compostage, était décidé en avril 2005. Le collectif déchet des Mauges se réorganisa pour devenir non plus un collectif d’associations mais une association à part entière sous le nom d’ADM4R
De son côté, le SMEVED changea aussi sa structure et est désigné maintenant sous le nom de VALOR3E.
Cette décision de rejeter nos propositions engendra un retard que nous payons encore.
Car, sous le poids de la mobilisation, VALOR3E fut obligé de reculer. La mobilisation exemplaire contre l’incinérateur, contre l’usine de tri-mécano biologique du Vignoble Nantais, conduisit VALOR3E à modifier sa stratégie. De nombreuses communautés de commune développèrent le tri des déchets (verre, carton, plastiques, métaux). Puis, la plupart mirent en place la redevance incitative.(sauf dans la CAC) Enfin, la quantité de déchets à traiter s’avéra bien plus faible que les plus basses estimations réalisées en 2004, ce dont se félicitent actuellement dans la presse ceux qui combattaient cette possibilité le 14 avril 2004, comme l’actuel président de VALOR3E . Malgré cela, et à cause du retard pris dans la mise en place du compostage, plusieurs camions se déplacent quotidiennement pour exporter les déchets à l’usine d’incinération de Lasse.
La modernisation du centre de Bourgneuf en Mauges en Tri Mécanobiologique ( opération que nous avions dénoncée comme inefficace et coûteuse) n’est toujours pas au point un an après son « ouverture ». Le sera-t-elle un jour?
Ces 8 années montrent que les citoyens, mobilisés, se forment rapidement, au point de devenir des experts sur certains sujets. Ces 8 années montrent aussi que les choses peuvent changer, et que la mobilisation, lorsqu’elle est organisée et maintenue dans le temps, est gagnante. Nous avions pensé, en 2004, humain d’abord, car ce sont les dangers sanitaires, le manque de responsabilisation, les notions environnementales, qui ont conduit notre démarche. Puis, par la constitution du Collectif Déchets des Mauges puis de l’association ADM4R loi 1901 (adm4r.ouvaton.org), nous avons alors pensé Place à l’investissement citoyen.