Peut-on encore inverser la vapeur ? Attirée dans un processus de globalisation mis en œuvre par le gouvernement Sarkozy-Fillon, affaiblie par les visées conquérantes de sa voisine grenobloise, projetée dans un projet de fusion à peine voilé mené par son actuel président, la jeune université de Savoie, qui vient juste de souffler en 2009 ses trente bougies, risque bel et bien de disparaître.
Cette université a été crée en 1979, grâce aux efforts opiniâtres et persévérants d’élus et d’universitaires qui voulaient donner à notre territoire ce service public indispensable à son développement et à son émancipation intellectuelle. Écrasée par la sphère d’influence de Lyon, mais surtout de Grenoble, notre université n’a jamais réussi à atteindre sa pleine autonomie. Certaines filières souhaitables pour notre région n’ont jamais pu être ouvertes. Les crédits universitaires apportés par l’État et la région Rhône-Alpes ont toujours été en grande partie absorbés par les universités grenobloises et lyonnaises sans égard pour la densité de population et de l’éloignement du territoire savoyard.
Néanmoins, l’université de Savoie a su mettre en place d’année et année un certain nombre de services universitaires, reconnus sur le plan régional : l’IUT, les écoles d’ingénieurs et de management, les facultés de lettres, d’histoire, de psychologie, de sciences, de droit et d’économie, l’institut de la montagne ainsi que récemment, l’institut national de l’énergie solaire.
La réforme ahurissante des universités
Depuis ces cinq dernières années, il semble que le ciel tombe sur la tête de l’UdS. Tout d’abord, la réforme dite de “l’autonomie des universités”, mise en place par la ministre Valérie Pécresse, sous la volonté de Nicolas Sarkozy. Cette réforme ahurissante ne s’explique que par la volonté de mettre en œuvre une idéologie ultra-libérale basée sur les bienfaits supposés de la globalisation et la compétition. Placées artificiellement dans une concurrence internationale, les universités françaises devraient se regrouper et constituer des pôles d’excellence pour ravir les premières places du très contesté classement de Shanghai (voir encadré). Dans cette course à l’élitisme, ce sont les petites universités qui en font les frais, et surtout les étudiants, car ce classement n’évalue que la recherche scientifique. Asphyxiées financièrement, plusieurs universités de taille moyenne, dont l’université de Savoie, ont été sur le point d’être mises sous tutelle en fin d’année 2011.
Cette réforme vantée par l’UMP comme une grande réussite du quinquennat de Nicolas Sarkozy est en fait très contestée dans le milieu universitaire. De nombreuses voix d’opposition se sont élevées pour dénoncer cette opération de destruction, comme celle par exemple de Jean-Yves Le Déault, vice-président de l’office parlementaire des choix scientifiques et technologiques : “avoir une stratégie, ce n’est pas se limiter à huit pôles d’excellence en France, dont quatre à Paris”.
Le classement de Shanghaï et ses limites
Il s’agit d’un classement mis en œuvre par des chercheurs de l’université de Jiao-Tong de Shanghai en Chine. Il a pour ambition de discerner chaque année les meilleures universités mondiales. Il s’appuie sur six critères n’évaluant que des aspects de recherche scientifique : par exemple le nombre d’anciens élèves ayant reçu un prix Nobel. Les questions de la qualité de l’enseignement, des relations université-société, l’insertion professionnelle ne sont pas considérées.
Le ministère de l’enseignement français s’est fixé pour objectif d’avoir des universités mieux placés dans ce classement. Pour cela, sa stratégie est de les regrouper, ce qui lui permet d’espérer atteindre un double objectif : améliorer l’excellence des universités retenues tout en faisant des économies par un désengagement financier sur les petites. Au final, on peut se demander ce qu’il restera de la mission de former des étudiants sur l’ensemble du territoire…
En France la première université française au classement de Shanghai 2011 est l’université de Paris XI (Orsay), fortement favorisée par la politique gouvernementale, elle progresse d’année en année, mais n’atteint néanmoins que la 40ème place en 2011. Selon le QS World University ranking, un autre classement tenant compte lui du taux d’encadrement des étudiants et des débouchés professionnels, cette même université ne se situe qu’à la 208ème place !
Quant à la première université mondiale, Harvard (n°1 au classement de Shanghai, n°2 au QS), il s’agit d’une structure d’élite, de taille moyenne (20 000 étudiants) et dont le coût par étudiant est estimé à 50 000$ par an en moyenne !
Source : http://regionsavoie.org/savoie/233-dossier-luniversite-de-savoie-a-t-elle-encore-une-chancen.html