La haute fonction publique sommée de se féminiser
Parité . Un décret impose l’instauration progressive, d’ici à 2018, d’un quota de 40% de femmes aux postes les plus élevés des services de l’Etat.
Combien d’ambassadrices pour combien d’ambassadeurs ? Seulement 17 contre 152. Combien de préfètes pour combien de préfets ? 19 pour… 192. Globalement, quel pourcentage de femmes a l’insigne honneur d’occuper un poste de haut fonctionnaire parmi une marée d’hommes ? Entre 14 et 15%, alors qu’elles représentent 60% de l’ensemble des 5,3 millions d’agents de la fonction publique.
Pavé. Stop. Depuis hier, un décret paru au Journal officiel impose enfin un quota de femmes hauts fonctionnaires. Un texte très attendu depuis l’adoption de la loi du 12 mars sur la précarité dans la fonction publique, comportant un volet sur l’égalité hommes-femmes. Obligatoire désormais, l’instauration progressive d’ici 2018 d’un quota de 40% de femmes parmi les hauts fonctionnaires nommés chaque année. Et ce sous peine de pénalités : 90 000 euros par «unité manquante».
«Une révolution», s’est extasié le ministre de la Fonction publique, François Sauvadet. «Une avancée» contre une «inégalité inacceptable», commente plus doucement Françoise Guégot (1), députée (UMP) de la Seine-Maritime, auteure d’un rapport sur l’égalité professionnelle hommes-femmes dans la fonction publique, remis en 2011 au chef de l’Etat la veille de la Journée de la femme. Un pavé dont s’est nourrie la loi.
«Viviers». «Lorsque j’ai mené ces travaux, j’ai été la première surprise par les écarts hommes-femmes alors que la fonction publique se doit d’être une institution exemplaire», insiste-t-elle avant de se faire plus analytique. «On invoque souvent une autocensure des femmes. Mais je pense que d’autres freins sont en jeu : la difficile conciliation vie privée-vie professionnelle quand elles ont des enfants, les sacro-saints critères de grande mobilité et disponibilité alors qu’on pourrait en mettre d’autres en avant…» assure-t-elle avant de souligner «le fait aussi que, dans ces viviers de recrutement que sont Polytechnique et l’ENA, les lauréates sont sous-représentées. Ce qui n’est pas le cas dans les grandes écoles de commerce. Pourquoi pas des préfètes issues d’autres écoles que l’ENA ?» lance celle qui préfère le mot «contrainte d’objectif» à «quota».
De son rapport qui pointe aussi des inégalités salariales dans la fonction publique via des «attributions indemnitaires» plus avantageuses pour les hommes, le législateur a aussi retenu l’obligation de faire chaque année une «vraie» photo des salaires.
(1) Voir la vidéo «Femmes & co» du 2 avril sur Liberation.fr »