Quel avenir pour nos campagnes ?

Tirées du dernier ouvrage de l’agronome Marc Dufumier, Famine au sud, malbouffe au nord, voici quelques pistes en direction d’une réforme de notre agriculture, dans la perspective notamment de la prochaine PAC (Politique Agricole Commune).

Il est urgent de mettre fin à la course au productivisme :

La France en effet ne peut pas produire des denrées standard à grande échelle.

Nos rendements céréaliers dopés aux engrais et produits phytosanitaires sont déjà au maximum (2 fois plus qu’aux Etats-Unis, 3 fois plus qu’en Ukraine), sauf à accroître encore plus les dégâts sur l’environnement et à augmenter les coût de production (incidence du coût du pétrole). La France ne peut concurrencer les pays exportateurs. Ceux-ci peuvent encore, grâce aux réserves de terres arables dont ils disposent, faire des économies d’échelle et accroître leurs rendements à l’hectare avec des coûts de production bien plus fables que les nôtres (en particulier de main-d’œuvre.)

Il faut donc « réorienter nos agricultures en tenant soigneusement compte des diverses potentialités productives et caractéristiques écologiques de chaque territoire. »

Il faut diversifier les systèmes de production  en proposant des produits fermier et bio du terroir, en assurant la qualité écologique des territoires. Il faut aussi remettre en culture les variétés abandonnées, effacées du catalogue officiel du GNIS sous la pression du lobby des grands groupes semenciers.

Libérer notre agriculture de sa dépendance à l’égard du Nouveau Monde (soja), découlant du choix politique de surproduire céréales et sucre au détriment de la luzerne et des fèves utiles à l’alimentation animale. Un autre aspect de cette réorientation sera de permettre la réduction de notre consommation d’engrais azotés de synthèse. Cela ne se fera que si parallèlement on instaure des droits de douane à l’importation des protéagineux, en fait le soja. Il faudra donc remettre en cause les accords internationaux de Blair House de 1992 selon lesquels l’Europe s’est engagée à ne pas recourir à un tel protectionnisme, mais garder les mains libres « pour subventionner directement ses agriculteurs pour des productions excédentaires, exportées à prix de dumping. » Nous devrons donc aussi arrêter d’exporter au Sud nos excédents de sucre, céréales, poudre de lait.

Il faudra aussi, en utilisant la restauration collective comme levier, développer les labels et la filière bio. Des municipalités ont déjà réussi à recréer des « ceintures maraîchère qui permettent un approvisionnement en circuit court, du champ dans l’assiette, des fruits et des légumes ». Les AMAP développent les circuits courts.

Quelles propositions pour la nouvelle P.A.C. 2013 ?

Les agriculteurs dans leur ensemble regrettent l’époque ou leur rémunération était assurée par la vente de leurs produits à des prix corrects et stables.

Il faut donc viser une politique de prix et non une politique de subventions. Il faut donc gérer des stocks régulateurs et imposer des quotas plutôt indexés sur le nombre d’actif que sur la surface des exploitations.

Renoncer à exporter vers les pays du Sud en pratiquant le dumping avec ses surplus de production.

Rémunérer directement les agriculteurs comme « jardiniers de paysage »

L’idée est de faire prendre en charge par la collectivité des services d’intérêt général environnementaux (protection des sources d’eau potable, entretien des bocages, élevage d’insectes pollinisateurs…)

Un bonus malus sur les productions agricoles, c’est-à-dire taxer les pesticides et redistribuer intégralement cette taxe à ceux qui se reconvertissent en bio, en laissant le choix aux paysans des techniques de culture et d’élevage.

 

En 2050, l’agriculture bio et paysanne peut nourrir la planète, ce n’est pas une utopie. En effet de récents rapports d’experts : le rapport Agrimonde ( 2009)et celui de l’IAASTD (Evaluation internationale des connaissances des sciences et des technologies agricoles pour le développement) vont dans ce sens.

Enfin le « Rapport sur le droit à l’alimentation » présenté à l’Assemblée générale de l’ONU en décembre 2010 montre que l’agroécologie pourrait doubler la production alimentaire des pays du Sud en dix ans.