Les Echos – 15 janvier 2010
En forçant le trait, c’est comme si le programme nucléaire français n’avait servi à rien. Ou pas grand-chose. L’année dernière, le solde commercial de l’électricité est retombé à son niveau des années 1980, lorsque la France commençait tout juste à récolter les fruits à l’exportation de son parc électronucléaire naissant.On ne dispose pas encore de chiffres consolidés sur toute l’année mais, sur les dix premiers mois, la balance commerciale électrique n’atteint que 874 millions d’euros, selon le Service de l’observation et des statistiques (Soes) du ministère de l’Ecologie et de l’Energie, contre 2,8 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année 2008. Sur un an, le solde devrait ainsi avoir fondu de 2 milliards d’euros dans la mesure ou sur les derniers mois de l’année, les exportations et les importations se sont équilibrées. Avec un « excédent électrique » d’à peine 900 millions d’euros, la France retombe à un niveau auquel il n’était pas retombé depuis 1983 et 1984.
Le constat est sévère pour EDF, à l’origine de cette évolution. Selon les chiffres publiés mercredi par le gestionnaire de transport RTE, l’électricien tricolore a produit 390 térawattheures d’énergie nucléaire l’année dernière, soit 7 % de moins qu’en 2008. En cause, des centrales qui produisent de moins en moins. Ces jours-ci, seulement 52 des 58 réacteurs nucléaires français étaient connectés au réseau.Normalement, au coeur de l’hiver, c’est la totalité du parc qui est sur le pont, de façon à répondre aux pics de consommation liés au chauffage. Mais le groupe est confronté à plusieurs problèmes : un outil de moins en moins fiable dans lequel il a sous-investi pendant des années, une grève au printemps qui a perturbé son planning d’arrêts de tranche, et une organisation qui ne fait pas l’unanimité. Pour couronner le tout, la production hydraulique, qui n’est pas le monopole d’EDF, a elle aussi chuté de 9 % du fait d’une pluviométrie moins bonne que d’habitude.Renouer avec un niveau de production optimal. Au total, le solde exportateur de la France a baissé l’année dernière de 47 % en volume, à 25 TWh. Comme l’a rappelé mercredi Dominique Maillard, le président du directoire de RTE : « Ceci continue à faire de la France le premier exportateur en Europe, mais l’écart se rapproche avec nos voisins. » Et, surtout, la France exporte essentiellement de l’énergie nucléaire, plutôt bon marché, tandis qu’elle importe essentiellement de l’énergie fossile, plus chère, qui lui sert à répondre à la demande de pointe.Le nouveau président d’EDF, Henri Proglio, est décidé à redresser la barre et à renouer avec un niveau de production optimal. Alors que les centrales nucléaires, qui assurent quatre cinquièmes de la production d’électricité en France, n’ont produit l’année dernière qu’à 78 % de leur capacité théorique, il vise un taux de 85 % ou 86 % « dans les trois ans qui viennent ».