Après la catastrophe de Fukushima en mars 2011 et après l’intrusion réussie de militants de Greenpeace dans plusieurs centrales nucléaires françaises en décembre dernier, les questions liées à la sureté du nucléaire commencent enfin à être débattues en France. C’est dans ce contexte que l’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN) a publié, début janvier 2012, son rapport sur les évaluations complémentaires de la sûreté des installations nucléaires . Plus personne ne peut ignorer que la sureté « parfaite », non seulement n’existe pas, mais que les exploitants français devront investir des dizaines de milliards d’euros pour répondre aux exigences minimum de sécurité formulées par l’ASN.
En matière de santé, une récente étude produite par l’INSERM avec l’IRSN a signalé un doublement de la fréquence des cancers du sang chez les enfants et adolescents habitant à moins de 5 km de l’une des 19 centrales nucléaires françaises .
Cette corrélation ne peut manquer d’interpeller en particulier dans notre région, la plus nucléarisée du monde, et dans un département concerné directement par deux installations encore actives, St Alban et Bugey, et une en démantèlement à Creys-Malville.
Cette mise en exergue de l’association entre la fréquence des leucémies infantiles et la proximité d’une centrale nucléaire ne met pas pour autant en évidence les facteurs pouvant expliquer plus précisément le lien ainsi établi. Pourtant, au regard de l’état des lieux de la recherche générale, les causes environnementales apparaissent de manière croissante comme prédominants dans la survenue des leucémies et plus largement des cancers dans leur ensemble.
En vue de parfaire la connaissance sur ce sujet essentiel, et au-delà des positions pro ou anti nucléaires, la nécessité se fait plus aigue encore de s’engager sur deux axes :
1/ L’extension du registre des cancers
L’incertitude portant sur la corrélation mise en exergue nécessite des recherches approfondies au travers de l’extension du périmètre du registre des cancers à l’ensemble de la vallée du Rhône. Politique soutenue de longue date par les élus écologistes, le registre des cancers constitue un dispositif ayant notamment pour vocation de développer les études approfondies sur les facteurs de risque de survenue de cancer, et donc d’asseoir la mise en place de politiques de prévention.
Plus encore, il est à notre sens indispensable que dans le cadre de ce registre, la recherche dans les domaines de la santé environnementale se développe en incorporant la santé au travail, avec les salariés directs ou indirects intervenant au sein des centrales nucléaires.
2/ La prise en compte du sujet par les commissions locales d’information (CLI) des centrales nucléaires de St Alban et du Bugey
Dans le contexte « post-Fukushima », les travaux des commissions locales d’information des installations nucléaires ont évolué depuis un an en se penchant particulièrement sur les conditions de sûreté, tant interne qu’externe, des 19 centrales atomiques en France.
En complément de cette orientation, il nous apparaît indispensable que l’état de santé, tant des salariés des sites nucléaires que des habitants des régions concernées, devienne un axe de travail important de ces instances.
Représentant le Conseil général de l’Isère au sein des commissions locales d’information de ces 2 centrales, nous demanderons que ces instances s’emparent rapidement de ce sujet.
Enfin, rappelons que les écologistes ont notamment révélé à plusieurs reprises dans les années 1970 à 2000, que la nappe phréatique du polygone de Grenoble avait subi les rejets de radioactivité du CEA et que la nappe phréatique du site de la société industrielle de combustible nucléaire (SCIN) de Veurey avait été polluée par de l’uranium. Si les opinions publiques sont surtout marquées par les catastrophes nucléaires de grande envergure, nous aurions tord de minimiser l’impact de ces multiples contaminations « du quotidien ».
Catherine Brette, Conseillère générale, membre de la CLI du Bugey
Olivier Bertrand, Conseiller général, membre de la CLI de St Alban