Sport motorisé OU transition écologique
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Une semaine après le rendez-vous organisé par le Parc naturel régional des grands causses autour des « Territoires à énergie positive », voici que la Région Occitanie organise une table ronde intitulée « L’univers du tourisme et des loisirs face aux transitions », avec un ex-pilote de Formule 1 qui intervient sur le thème : « Sport automobile et transition écologique » !

Voilà un bel oxymore ! On peut proposer à la Région d’autres sujets tout aussi stimulants pour l’esprit : « Corrida et bien-être animal », « Chasse à la glu et protection des oiseaux », « Agriculture industrielle et sauvegarde des sols et des paysages » ou encore « Intégrisme religieux et émancipation des femmes »

Le « rallye des cardabelles », interrompu en 2019 après la mort d’un spectateur (plus quatre blessés dont un grave), puis annulé en 2020 pour cause de pandémie, a refait surface cette année. Pourvu que ce soit la dernière fois ! Sans respect pour les victimes de 2019 et leurs familles, et au mépris total de l’urgence climatique, la persistance de ce genre de compétition est une aberration, une survivance des excès du XXe siècle en plein XXIe siècle !

Comment peut-on justifier qu’avec les rapports du GIEC de plus en plus alarmants, on continue à lancer des bolides sur nos routes et nos chemins ? Comme le disait Albert Jacquard lors d’une manifestation devant le grand prix de Formule 1 à Magny-Cours en 2005 : « Quelle idiotie que tous ces engins surpuissants qui tournent en rond ! »

Comment peut-on prôner la sobriété énergétique et une sortie rapide des énergies fossiles, tout en favorisant ce genre de compétition ? Même remplis de biocarburants ou fonctionnant à l’hydrogène ou à l’électricité (le sport automobile est prêt à tout pour subsister !), les véhicules de compétition gaspillent une énergie précieuse au moment-même où le coût de toutes les énergies repart à la hausse.

Comment peut-on promouvoir une politique de sécurité routière ambitieuse et, quelques jours par an, laisser libre cours au fantasme (très masculin) de la puissance et de la vitesse ? Faut-il rappeler que la violence routière fait encore plus de 3 000 morts et 70 000 blessés tous les ans en France ? Au niveau mondial, le bilan est encore plus catastrophique : environ 1,3 million de morts par an et 50 millions de blessés. Au total, pas loin de 100 millions de morts sur les routes depuis 1900, soit plus que les deux guerres mondiales additionnées !

Le « en même temps » a ses limites. On ne peut pas à la fois se dire une collectivité locale soucieuse d’environnement et promotrice de « mobilités douces », et subventionner ou même laisser se dérouler ces parades de gosses de riches dans leurs joujoux bruyants et polluants.

Dans vingt ou trente ans, lorsque les causses subiront de plein fouet le réchauffement, et que même les cardabelles auront du mal à fleurir, que diront nos enfants lorsqu’ils apprendront qu’en 2021, plus de quarante ans après les premières alertes des climatologues sur le dérèglement en cours, on continuait à encourager de tels spectacles dignes des jeux du cirque ?

Thomas Lesay