DécouVerte de Saint-Maurice Pellevoisin samedi 12 décembre 2015 🗓 🗺

C’est devant la médiathèque de St-Maurice Pellevoisin ouverte en mars 2014 après une si longue attente des habitants du quartier que nous nous retrouvons pour cette dernière découVerte de l’année 2015, toujours sous la conduite de Dominique Plancke, qui joue cette fois à domicile, dans son quartier, accompagné de plusieurs élus écologistes lillois : Lise Daleux, Michel Ifri, Christiane Bouchart et Stéphane Baly.

Et qui nous dresse un bref rappel historique : St-Maurice faisait partie jusqu’en 1858 de la commune de Fives, c’était le Faubourg de Roubaix, situé sur une très ancienne voie de Lille à Roubaix, qui est toujours aujourd’hui une route départementale, le CD14.

Un faubourg campagnard et industriel devenu essentiellement résidentiel

Dans la première partie du 19ème siècle, Fives se développe avec la révolution industrielle et l’arrivée du chemin de fer en 1842. Des dissensions se font jour entre les notables de Fives qui se développe plus rapidement et ceux du secteur qui n’est pas encore St-Maurice, dissensions qui se cristallisent autour de la construction de l’église paroissiale Notre Dame de Fives, qui tourne le dos au Faubourg de Roubaix.
Les habitants du Faubourg de Roubaix décident de construire leur propre église, St Maurice des Champs et demandent leur autonomie communale. L’absorption de Fives par Lille par décret impérial en 1858 met fin à la querelle. Fives et St-Maurice des Champs deviennent des quartiers de Lille. Il est à noter que la limite actuelle des quartiers de Fives et de St-Maurice Pellevoisin est celle fixée par l’évêque de Lille en 1860 entre les deux paroisses.
Lors de l’installation des 10 mairies de quartier à la fin des années 1970 à Lille, St-Maurice devient St-Maurice Pellevoisin pour prendre en compte le secteur situé au nord du quartier, vers Marcq en Baroeul, autour de l’église ND de Pellevoisin, construite elle en 1906.
Le quartier St-Maurice Pellevoisin est aujourd’hui un quartier essentiellement résidentiel, même s’il compte deux très gros employeurs : la MEL, rue du Ballon, et l’Hôpital privé de la Louvière. Mais au 19ème siècle et dans la première partie du 20ème siècle le quartier était aussi industriel. On y comptait en effet des brasseries, une malterie, une briqueterie, une imprimerie et plusieurs manufactures textiles.
Sur la rue du Faubourg de Roubaix, qui est aujourd’hui la colonne vertébrale du quartier, à l’angle de la rue St Gabriel (là où il y a aujourd’hui le Crédit Mutuel), on trouvait un estaminet à l’enseigne du Chevalier Français. A côté vers l’actuelle rue Gounod s’installe en 1834 sur une parcelle de 8603 mètres carrés la filature Edmond Cox, qui compte 250 ouvriers en 1859, et qui disparaît après la mort de son créateur en 1879.

Sur ce parvis de la médiathèque situé juste devant la sortie du métro, nous sommes sur l’ancien domaine de la famille Lenglart (Charles Lenglart fut entre autres négociant, député, conservateur du Musée de Lille), vendu en 1933 à des religieuses franciscaines pour y abriter un foyer de jeunes et leur Communauté. Celles-ci en vendent une première partie, là  où est aujourd’hui la station de métro, puis ne conservent que le fond de la parcelle pour y construire une maison de retraite, cédant le reste à l’Office d’HLM qui y construit en 1977 la résidence de la Briqueterie (numéros impairs).  L’autre partie de cette résidence, les numéros pairs, a été construite quant à elle sur un ancien dépôt de tramways fermé en 1966.

L’Accueil s’agrandit

Passant le long des HLM par un petit passage malcommode, et aujourd’hui gorgé d’eau, qui est le seul accès au métro pour toute une partie du quartier, notre groupe arrive devant un grand chantier de construction. C’est celui de l’extension de l’Accueil, un établissement pour personnes âgées construit en 1977 par la congrégation religieuse. L’Accueil est aujourd’hui géré par le Groupement des hôpitaux de l’institut catholique de Lille, et accueille 40 résidents, parmi lesquels treize religieuses et seulement quatre hommes. L’agrandissement en cours prévoit 70 places. Le bâtiment actuel sera démoli quand le bâtiment en construction sera achevé et un autre plus petit sera édifié à sa place.

Un quartier qui reste marqué par l’emprise foncière des établissements religieux.


Le grand séminaire
a été construit sur l’ancienne briqueterie sur un terrain de près de 3,5 hectares. La première pierre a été posée en 1930 et l’inauguration a eu lieu le 28 septembre 1931. Il héberge aujourd’hui  quelques séminaristes, mais aussi les archives diocésaines et des locaux pour des formations. L’ancien directeur avait remis en état le potager, le verger et installé un rucher qui sont aujourd’hui gérés par une équipe de jeunes chrétiens. Le terrain de football accueille le club de foot du quartier dans le cadre d’une convention avec la Ville de Lille. La chapelle du séminaire, qui avait hébergé quelques temps les répétitions de l’Orchestre National de Lille dans les années 80 vient d’être remise en état, débarrassée du faux plafond et du plancher surélevé installés à l’époque.
allée des buissonnetsLe quartier est très marqué encore aujourd’hui par les emprises foncières des établissements catholiques. Outre le Grand Séminaire et l’Accueil, on y trouve le lycée Ozanam, la maison de retraite des Buissonnets, la congrégation des Pères du St Esprit, le Couvent des Dominicains, les deux groupes scolaires St Denis et Ste Anne-St Joachim, sans compter la Mosquée El Forkane (qui n’est autre qu’une ancienne chapelle des Dominicaines)

Un petit air de Normandie :

Nous y pénétrons par la rue Gassendi : le Parc des Buissonnets a été ouvert au public en juin 2009. La Ville de Lille a acheté à la congrégation religieuse qui en était propriétaire depuis 1940 une grande partie du parc de l’ancienne maison de campagne construite au 19ème par la famille Decoster Droulers. Lise Daleux, adjointe au Maire de Lille en charge de la nature en ville qui nous accompagne dans notre DécouVerte nous explique l’intérêt de ce Parc pour le maintien et le développement de la biodiversité. Le bois mort est laissé sur place pour favoriser les insectes.
Au printemps et en été, quelques brebis Soay pâturent l’enclos situé au centre sous les pommiers de l’ancien verger.

Sur les hauteurs de Lille

rue du boisLa rue du Bois est un très ancien chemin qui menait de Lille à Marcq et qui apparaît dans le plan de 1744.
Arrivés au carrefour des rues du Ballon, de la Louvière du Bois et du Buisson, nous sommes sur la ligne de crête qui va d’Hellemmes à Marquette et qui a été utilisée par Louis XIV lors du siège de Lille en 1667. Nous somme ici sur l’un des points hauts de Lille que nous « surplombons » du haut de nos 40 m. Le dénivelé est aujourd’hui peu perceptible, sauf pour les cyclistes !
C’est rue de la Louvière qu’Alfred Mongy construit en 1886 un réservoir de 9500 mètres cubes pour approvisionner en eau le secteur. Jusque là, l’approvisionnement, notamment pour l’industrie se faisait à l’aide de forages dans la nappe. Le réservoir de la rue de la Louvière, toujours en activité, est de type « plat maçonné », avec des références aux fortifications de Vauban. Un autre château d’eau plus récent a été construit juste à côté, baptisé « la soucoupe volante » par les générations d’enfants du groupe scolaire Jean Zay situé à son pied.

louvière brasserie MaesLa clinique de la Louvière, dont nous traversons le parking pour rejoindre la rue de la Madeleine a été construite en partie sur l’emplacement de la Brasserie Maes, fondée en 1881, et dont l’activité s’acheva en 1964 après avoir employé jusqu’à 40 personnes. Il reste de la Brasserie une cave en briques sous la pelouse sur le côté gauche du terrain de la Clinique. Comme beaucoup de brasseries de l’époque, la Brasserie Maes possédait une quarantaine de cafés dans la métropole dont elle était le fournisseur exclusif, et elle avait un réseau très développé de livraison à domicile.

Du parking de la Clinique, en descendant un petit escalier qui atteste de la pente du terrain, nous apercevons l’arrière de deux autres maisons de campagne situées rue des Vicaires. Propriétés aujourd’hui d’une SCI liée à la Clinique, elles doivent être préservées dans le cadre d’un projet immobilier de plusieurs dizaines de logements qui doit se rélaiser dans les prochaines années entre la rue des Vicaires et la rue de la Madeleine.

Place aux piétons et aux cyclistes, pour une ville apaisée :

piste rue de la MadeleineLa rue de la Madeleine vient d’être réaménagée par la MEL pour y limiter la vitesse des voitures et sécuriser les cyclistes, avec une piste cyclable à contre-sens. Il reste à poursuivre cette piste vers la Madeleine d’une part et vers la rue du Ballon d’autre part pour rejoindre la rue du Bois et la rue du Buisson.  La rue du Faubourg de Roubaix devrait être réaménagée aussi prochainement pour laisser plus de place aux piétons et aux cyclistes. La rue de la Madeleine compte encore une courée, témoignage de l’habitat ouvrier qui s’est développé aussi à St Maurice au 19ème.  Notre balade d’aujourd’hui ne nous en laisse pas le temps, mais dans le quartier il faut aller voir la Cité St Maurice, rue de la Cité, construite en 1854 pour assurer aux ouvriers un logement convenable et une habitation à bon marché.

Le Cimetière de l’Est, un très beau lieu de promenade

gonnetPar le prolongement de la rue des Vicaires, nous accédons au cimetière de l’Est. En 1776, le roi interdit pour des raisons d’hygiène l’inhumation dans l’enceinte des villes. Les cimetières situés à côté des églises sont condamnés. La ville achète en 1778 des terrains à l’extérieur des remparts de la Porte de Roubaix pour remplacer les cimetières situés intra muros. Le cimetière de l’Est, malgré des débuts difficiles en zone inondable, sera agrandi 8 fois pour atteindre les 22 hectares d’aujourd’hui. Plusieurs Maires de Lille y sont inhumés, de Roger Salengro à Pierre Mauroy, mais aussi Alexandre Desrousseaux et de nombreuses personnalités lilloises. Parmi les nombreuses chapelles monumentales érigées par les grands familles, une est inscrite comme monument historique, la Chapelle Gonnet. Cette chapelle néo gothique est un peu « le pavillon témoin » de l’architecte Charles Leroy, qui construisit de nombreuses églises dans le secteur, comme St Maurice des Champs et Notre Dame de Fives, et qui débuta aussi le chantier de la Cathédrale de la Treille. Ce cimetière est un très beau lieu de promenade, avec des arbres remarquables et un parcours historique passionnant.

La Pépinière, des serres à la ZAC

à la fermeDe l’avenue de Muy par laquelle nous sortons du Cimetière, nous apercevons le terrain sur lequel doit se développer la Zac de la Pépinière, qui accueillera 250 logements, un foyer des Papillons Blancs et des locaux pour des professions libérales plus quelques commerces en front à rue sur la rue du Faubourg de Roubaix. Cela fait plusieurs dizaines d’années maintenant que certaines maisons ont été acquises par la ville et par la Communauté Urbaine pour éviter la spéculation aux abords d’Euralille. Mais la lenteur de l’opération a donné un aspect désolé à cette entrée de la rue du Faubourg de Roubaix avec de nombreuses maisons murées. Le nom de pépinière fait référence à l’établissement créé en 1840 sur ce terrain situé à proximité du Cimetière de l’Est par un jardinier, Séraphin Van den Heede, racheté en 1950 par Charles Vallez. 5 propriétaires de la rue du Faubourg de Roubaix ont jusqu’ici refusé de vendre à la SPL Euralille chargée de l’opération. Le prix proposé suite à l’estimation des Domaines ne leur permet en effet pas de retrouver un logement équivalent dans le secteur. Une déclaration d’utilité publique a été prise, mais cela va prendre du temps. Stéphane Baly, élu EELV qui siège au CA de la SPL présente l’opération et nous explique qu’elle est plus compliquée financièrement que prévu. Les démolitions ont commencé. On peut apercevoir au milieu du terrain dégagé une rocaille de Victor Tatoux,  (qui a aussi réalisé entre autres la grotte du jardin Vauban de Lille), qui était dans le magasin de fleurs et qui doit être conservée et déplacée.

L’hôtel Florin, témoin du Faubourg St-Maurice des Champs va disparaître

104 rue du Fbg de RoubaixAu débouché de l’avenue de Muy, de l’autre côté de la rue, Dominique Plancke nous présente l’immeuble du 104 rue du Faubourg de Roubaix, construit au début des années 1840 comme maison de campagne par Achille Florin, un industriel du Vieux-Lille. Cet immeuble, dont la façade sur jardin est remarquable et dont la dernière occupante est décédée il y a quelques années va malheureusement être prochainement être démoli pour laisser la place immeuble. Son inscription comme IPAP au plan local d’urbanisme n’aura pas permis de sauvegarder cet hôtel particulier victime du manque d’entretien, mais aussi des dégradations provoquées par la construction du métro en tranchée ouverte dans la rue il y a une vingtaine d’années. Stéphane Baly nous explique que les élus EELV continuent à se mobilier pour que le parc soit préservé et accessible au public. Sur les maisons de campagne de St Maurice, l’article de Mme Régnier-Labbée dans le bulletin de Renaissance du Lille Ancien fait référence.

Au 137 rue du Faubourg de Roubaix à l’angle de la rue de la Madeleine, un terrain en friches accueillait jadis une station essence. La Ville en a fait l’acquisition pour en faire un jardin. Le projet a un peu tardé, a été revu plusieurs fois, mais cette fois c’est la bonne, les travaux seront engagés en 2016.

Nous remontons la rue du Faubourg de Roubaix, dont les nombreux petits commerces participent à l’aspect village. Malgré la proximité du centre commercial Euralille et des supermarchés de Mons en Baroeul, les commerces indépendants de la rue se maintiennent bien en gardant une clientèle de proximité et de passage, et de nouveaux commerces voient régulièrement le jour.

Comme de nombreuses églises construites par l’architecte Charles Leroy et plus généralement sous le Second Empire, l’église St Maurice des Champs ne semble pas avoir été conçue pour durer.  Cette semaine la Ville de Lille a fait procéder à une mise en sécurité du clocher qui montre des signes de faiblesse.

Notre balade s’achève devant la médiathèque, en face du 188 rue du Faubourg de Roubaix où s’est installé depuis septembre 2014, à la place d’un ancien garage et à côté d’un salle de danse, « le 188 », une plate-forme collaborative destinée aux compagnies d’arts qui s’efforce aussi de participer à la vie du quartier en accueillant régulièrement des manifestations.

Quelques participants à la DécouVerte décident de prolonger l’après midi en allant visiter avant la nuit le Pré Muché, jardin ouvert et néanmoins clôturé dans lequel on pénètre en passant par le Centre Social, rue St Gabriel.

 

Pour en savoir plus sur le quartier : deux documents indispensables :

« Laissez vous conter St Maurice Pellevoisin » publié par le service Ville d’Art et d’Histoire de la Ville de Lille en mars 2014 : disponible à la Mairie de Quartier.
« En remontant le fil oublié » plaquette éditée par Les Amis du Chevalier Français en 2013 sur les manufactures de Saint-Maurice (épuisé, mais consultable ici )

Et sur les brasseries de Lille (et notamment de St Maurice Pellevoisin)  on trouve des éléments intéressants sur ce site .

Photos de Marc Santré et Julien Tabareau

Prochaines découVertes :
• A Lomme rdv le samedi 23 janvier à 14 h 30 au métro St Philibert pour découvrir le nouveau quartier Humanicité
• A Lille rdv le samedi 13 février à 14 h 30. Rdv à préciser.

Les actions Les découVertes
devant la médiathèque, à la sortie du métro St Maurice Pellevoisin Carte

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