DécouVerte du Vieux Lille samedi 20 juin
Cette fois, le départ est fixé Place Rihour : 31 personnes sont au rendez-vous, dont quatre éluEs EELV de Lille.
Le Vieux-Lille, un quartier dont la population a complètement changé depuis 1980
Contrairement aux DécouVertes précédentes, celle-ci est consacrée à un quartier que chacun connaît ou du moins pense connaître, très fréquenté par les touristes, qui n’a pas connu récemment (en dehors de la construction de logements à l’emplacement des anciens abattoirs) et ne va pas connaître prochainement de bouleversements spectaculaires : pas de grandes friches, pas de grosses opérations d’urbanisme. Mais pourtant un quartier qui s’est complètement transformé depuis quarante ans.
Quelques précisions apportées par notre guide habituel, Dominique Plancke, avant le départ : ce que nous appelons le Vieux-Lille aujourd’hui est une appellation relativement récente. Jusqu’à la première guerre mondiale, ce qu’on appelle le Vieux-Lille, c’est tout le Lille d’avant l’extension de 1858 qui avait vu le rattachement des communes de Moulins, Wazemmes, Fives et Esquermes. La percée de la rue Faidherbe au milieu du 19 ème avec l’arrivée du train, les destructions du quartier de la gare et de la rue du Molinel pendant la première guerre et surtout la rénovation du quartier St-Sauveur de 1930 à 1960 vont petit à petit réduire le Vieux-Lille au périmètre du quartier administratif qui porte ce nom aujourd’hui.
Le Vieux-Lille échappe de peu à la rénovation complète
Dans les années 1960-1970, la partie la plus ancienne du quartier du Vieux-Lille avec beaucoup d’immeubles des 17ème et 18ème siècles se paupérise. L’habitat sans confort, dégradé et souvent insalubre accueille des familles ouvrières et des immigrés. Les classes plus aisées sont déjà parties. La municipalité envisage alors de faire subir au quartier le sort qu’a subi St-Sauveur : la construction d’un quartier neuf après démolition complète de l’existant. On prévoit même la percée de la Treille, une « 4 voies » routière qui aurait relié le boulevard de la Liberté à la Gare, via la rue Thiers, le canal de Weppes, la place Louise de Bettignies, dont finalement seul le tronçon entre le boulevard Carnot et la Place des Buisses a été réalisé avec l’élargissement de la rue des Canonniers. Le combat contre cette percée a d’ailleurs été l’un des premiers combats écolos de Lille, au même titre que la sauvegarde des tilleuls de la Place de la République ou la lutte contre le projet de périphérique autour de la Citadelle.
La prise de conscience de l’intérêt patrimonial et touristique du Vieux-Lille émerge petit à petit au début des années 70 grâce notamment Renaissance du Lille Ancien. Un plan de sauvegarde est élaboré à partir de 1975 et publié en 1980. Pendant ces années, la dégradation se poursuit et la spéculation immobilière s’engage avec férocité.
La Place Rihour attend toujours son réaménagement.
Nous partons donc de la Place Rihour, qui accueille depuis 1983 une station de métro. A part ça, la Place ne ressemble pas à grand chose aujourd’hui. Le Palais Rihour en occupait la plus grand partie, mais depuis l’incendie de l’hôtel de Ville en 1916, c’est avant tout un parking pour voitures. Cela fait plus de 30 ans que des projets pour le réaménagement de cette place, qui accueille le Marché de Noël, sont annoncés et reportés faute de volonté et de financements. Une chose est claire, pour les écologistes, les parkings au sol n’ont rien à faire sur cette place.
Laissez-vous conter la Grand-Place
Julien Dubois, Adjoint EELV au Maire de Lille, délégué au patrimoine, présente le guide « laissez vous conter la Grand-Place« , édité par le service ville d’Art et d’Histoire de la Ville. Réédité, il sera bientôt de nouveau disponible à l’Office du Tourisme et en attendant vous pouvez le consulter ici
Vivement une Grand Place piétonne !
La Grand Place est depuis 2011 une zone de rencontre, c’est à dire que les piétons y ont la priorité sur les voitures, dont la vitesse est limitée à 20 km/h. Ce devait être une phase transitoire vers une piétonnisation, refusée par certains commerçants mais aussi malheureusement par Martine Aubry. Aujourd’hui le revêtement pavé (refait pour 2 millions d’euros en 2011) commence à se dégrader à nouveau. La situation actuelle, certes meilleure qu’avant, n’est quand même pas sécurisante pour les piétons et les cyclistes. Et les visiteurs d’autres régions s’étonnent de trouver encore des voitures sur une telle place (classée il y a peu 2ème plus belle place de France !)… La Voix du Nord rappelait il y a peu que la piétonnisation avait été un enjeu des dernières municipales.
Par la rue du Curé St-Etienne (qui évoque l’édifice religieux situé à ce endroit et détruit lors du siège de Lille en 1792) nous rejoignons la rue Lepelletier, à l’angle de laquelle nous pouvons admirer une enseigne « au sacrifice d’Abraham ».
De nombreux commerçants et artisans avaient au 18 ème siècle des enseignes de ce type, sculptées directement dans la pierre.
Par le passage piéton du 26 rue Lepelletier, qui dessert deux terrasses de restaurants, le groupe rejoint la rue Basse, dont la courbe enserre l’ancienne motte castrale sur laquelle est aujourd’hui édifiée la cathédrale Notre Dame de la Treille. L’Huitrière, dont le restaurant est aujourd’hui fermé, annonce la prochaine vente aux enchères de sa cave à vins.
Place du Lion d’or et place Louise de Bettignies, Julien Dubois précise que la Ville de Lille réfléchit à un nouveau plan de circulation. L’aménagement de ces places fait partie du débat ! Mais pour les écologistes, il faut limiter la place de la voiture dans ce secteur et supprimer le parking au milieu de la Place.
La médiathèque du Vieux-Lille est abritée par une maison, classée monument historique, qui a été démontée de la rue de Paris lors de la rénovation de St Sauveur et reconstruite sur cette place.
Aux origines de Lille
Au bout de l’avenue du Peuple Belge, on arrive sur ce qui était « le rivage du dessous », c’est à dire une partie du port de Lille. Le « rivage du dessus » correspond lui au Quai du Wault actuel. La ville a en effet été fondée sur une rupture de charge sur la Deûle. A la fin du 13ème siècle ces deux rivages accueillent un énorme volume de marchandises de toutes sortes.
La Basse-Deûle, devenue au fil des siècles un égout à ciel ouvert comme tous les nombreux petits canaux qui traversaient Lille, a été comblée en 1933. On peut visiter un petit morceau du Canal St Pierre (sous l’Hospice Comtesse), pendant les Journées du Patrimoine.
Lors de dernières élections municipales, la liste écologiste a proposé la remise en état de cet axe de l’avenue dyu Peuple Belge, après que le coûteux projet de remise en eau du canal porté un temps par Martine Aubry ait été abandonné.
A travers le jardin de l’îlot Comtesse, nous rejoignons la rue de la Monnaie. Dans l’impasse qui fait face à l’entrée du Musée subsiste la dernière maison à pans de bois de la ville de Lille, datée de la deuxième moitié du 16ème siècle, qui a été sauvée de justesse alors qu’elle était promise à la démolition.
Dans les années 70, une réalité très différente de celle d’aujourd’hui
Quand on passe aujourd’hui rue au Peterinck, Place aux Oignons ou rue des Vieux Murs, avec leur défilé de touristes , leurs restaurants et leurs boutiques branchées, on a du mal à imaginer ce qu’étaient ces rues à la fin des années 1970. Un médecin lillois, Antoine Duquennoy a publié en 2005 aux éditions de l’étagère, un très beau livre de photos qui rend bien compte de la réalité de l’époque. « Entre 1965 et 1970, on assiste à une profonde évolution de la population avec l’installation de nombreux immigrés, portugais et maghrébins »… « Il ne faut pas oublier que les conditions de vie étaient très difficiles : exiguité extrême des logements où des familles de 5 ou 6 enfants vivaient entassés dans une pièce ; beaucoup de toitures n’étaient plus étanches, ce qui accélérait la dégradation des maisons; il n’y avait pas le tout-à-l’égout ni l’eau courante, et chacun allait la chercher à l’unique robinet dans l’entrée ou la cour et la stockait dans des bassines sur la palier. il y avait un WC unique dans la courée pour 7 ou 8 familles voire plus, WC qu’il fallait entretenir soigneusement si l’on voulait éviter les odeurs pestilentielles ».
Un jardin méconnu : le refuge de l’Abbaye de Loos
En traversant la rue des 3 Molettes, nous pénétrons dans le jardin du refuge de l’abbaye de Loos (et non le jardin de l’abbaye de Loos !). Lise Daleux nous explique la remise en état récente de ce jardin méconnu, bordé par ce refuge, classé monument historique et transformé en logements, par des logements sociaux et par une maison de retraite. Le porche qui mène vers la rue Jean-Jacques Rousseau a été récemment réouvert, ce qui sécurise ce jardin.
L’abbaye de Loos, abbaye cistercienne a été transformée en prison, aujourd’hui à l’abandon, au bord de l’autoroute de Dunkerque, mais qui doit être réutilisée comme centre de détention dans les prochaines années. Le refuge permettait aux moines de se réfugier en ville en cas de guerre.
Au 19 rue Jean-Jacques Rousseau le groupe rend une (trop) rapide visite à la micro-brasserie « Les bières de Célestins ».
Un jardin de poche au pied de la tour
L’église Ste Catherine a été en partie restaurée à l’occasion de Lille 2004. Et le terrain vague au pied de la tour a été aménagé en joli « jardin de poche » il y a deux ans, sur les fondations de la première église du 13 ème siècle. Lise Daleux explique cette politique municipale des « jardins de poche » qui consiste à aménager en jardins, en concertation avec les habitants, de petits espaces délaissés ou négligés.Les paroissiens espèrent quant à eux toujours voir revenir dans l’église le tableau du Martyre de Ste Catherine peint par Rubens, qui a depuis longtemps trouvé refuge au Palais des Beaux Arts.
La rue Ste Catherine se caractérise par de nombreuses cours du 18ème siècle, qui datent donc d’avant la révolution industrielle qui verra la construction d’innombrables courées à Lille, Fives, Wazemmes, Esquermes et Moulins. De petite taille, elle abritent quelques maisonnettes.
Arrivés sur la façade de l’Esplanade, nous rejoignons la passerelle ou Pont Napoléon, qui vient d’être réouvert aux piétons. Construit en 1809 par l’architecte qui a aussi construit le conservatoire de la Place du Concert, le pont Napoléon a été reconstruit en 2014, près de 100 ans après avoir été dynamité par les troupes allemandes en 1918.,
Nous repartons vers le Vieux Lille par le pont du Ramponneau. Juste à droite, dans le Square du Ramponneau,le plus gros arbre de Lille avec ses 6,5 mètres de circonférence, un platane dont les branches surplombent le canal et qui a reçu le label « Arbre Remarquable de France » en décembre 2002.
Par la rue du Gros Gérard (non, personne ne sait vraiment pourquoi elle porte ce nom !) nous rejoignons la rue de Barre qui comporte de très beaux immeubles, et au n°55, à l’angle de la rue de la Halloterie, une jolie enseigne qui rappelle la légende des 4 fils Aymon sur leur cheval Bayard.
La triste histoire de Ruffina emmurée par son propriétaire
Le passage par l’étroite rue de la Halloterie est l’occasion de rappeler à nouveau que la transformation du Vieux-Lille ces 40 dernières années a parfois était brutale et violente pour certains habitants aux prises avec des spéculateurs sans scrupules. L’APU du Vieux-Lille, qui existe toujours est d’ailleurs créée en décembre 1979 pour défendre ces locataires.
Compagnie des Mines et francs-maçons
Au numéro 30 de la rue Thiers, l’ancien siège de la compagnie des Mines de Lens, récemment protégé au titre des monuments historiques est en travaux. Le temple maçonnique, au numéro 2 a été conçu dans un style égyptien, très à la mode à l’époque, par Albert Baert, architecte lillois et membre de la loge maçonnique « la lumière du Nord », qui a aussi construit ce qui est devenu le Musée de la Piscine à Roubaix.
Du Diplodocus au Nouveau Siècle
Avant de revenir Place Rihour, nous longeons le Nouveau Siècle, immeuble circulaire qui abrite des logements sociaux, des commerces en rez de chaussée, un parking en sous-sol, et des locaux du Conseil Régional, avec notamment l’auditorium de l’Orchestre National de Lille. Dans les années 1970, l’îlot des Poissonceaux, entre la rue de Pas et la rue du Nouveau Siècle, avait été rasé (avec l’accord des responsables de la communauté urbaine de l’époque) par un promoteur, au nom prédestiné de Vandaele, pour y construire un immeuble de bureaux de 75 m de haut. Le projet a défrayé la chronique et n’a finalement jamais abouti. Le trou est resté béant rempli d’eau pendant plus de 3 ans. Les pouvoirs publics ont finalement bouché le trou qui a eu le temps de servir de décor au film « le corps de la mon ennemi » avec Jean-Paul Belmondo sorti en 1976.
Prochaine DécouVerte le samedi 15 août. Cette DécouVerte estivale est par tradition (séculaire) consacrée à Euralille.